Kelekt s'était mise à courir à toute allure en direction du campement. Elle n'avait pas laissé le temps à Idryss de répondre quoique ce soit. La rouge l'observa s'éloigner durant quelques instants, puis partit au galop elle aussi. Avec la réaction obtenue face à la bombe lancée, la cornue n'allait pas passer à autre chose maintenant. Elle sera là pour Kelekt, même si celle-ci lui a dit qu'elle réglera la situation toute seule. Elle allait continuer de la soutenir. Même si elle ne sera peut-être que spectatrice, au moins elle sera là. Elle pourra aussi intervenir si ça dégénère trop. Même si pour l'instant, l'idée de voir Kelekt tanner la peau de Deenos est une attraction intéressante.

Kelekt courait comme jamais, tellement prête à en découdre avec le mâle, que durant tout le chemin, une distance persistait entre les deux louves. Idryss l'avait un peu rattrapé, mais restait en arrière. Elle ne lui demanda pas de ralentir ou de l'attendre, car ça ne servirait à rien. Elle était capable de la suivre sans la perdre des yeux. De plus, arrêter la juge blanche attisera probablement un peu plus sa colère furieuse si c'est possible. Au fil de la course, l'énervement d'Idryss s'était tassé.

À la l'orée du campement, le pelage gris de Deenos fut aperçu. Elle crut entendre sa meilleure amie grogner. Ce devait être le cas remarque. Il lui sembla que l'assaillante venait d'accélérer. Je pensais pas qu'elle pouvait courir aussi vite !
Deenos avait tourné la tête vers elles. Idryss fronça des sourcils et un léger grognement s’échappa de ses babines. Il ne perdrait rien pour attendre ! Il ne pourra pas s'enfuir ! Le mâle ne bougea pas face à l'arrivée fulminante de Kelekt. Il s'était même tassé. La violente collision eut lieu. Le choc envoya Deenos par terre, ce ne serait même pas étonnant qu'il est la respiration coupée. Le mâle fut plaqué au sol, elle au-dessus, lui bloquant la fuite.

Bien joué !

Idryss s'arrêta et s'assit, ayant gardé une distance raisonnable et sécuritaire entre eux. Elle n'avait pas l'intention de se prendre un coup perdu après tout... Elle haletait, reprenant son souffle suite à course effrénée. Telle une fouine qui gueule, Kelekt se mit à hurler sur le fin guerrier. Il semblait à Idryss qu'elle venait d'atteindre un nouveau palier dans son timbre de voix... Si avant Kelekt fulminait sur place, maintenant qu'elle est en face de sa source de furie, sa colère a aussi atteint un stade jamais vu. La rouge n'enviait pas du tout le gris. Comment va-t-il se dépêtrer de cette furie légendaire ? Il a intérêt à avoir un excellent argumentaire !

Après un silence hébété de la part de Deenos, il finit par répondre, incertain : Kelekt...Tu m'as toujours dis que tu détestais les mâles. Je... Erf... Bien sur que j'avais remarqué ça, mais jamais je me serais lancé dans une supposition que je croyais blessante pour toi... Essaye aussi de te mettre à ma place.

...C'est ça son excuse ? Certes, l’aversion de Kelekt envers les mâles est connue des juges et de Deenos, mais quand même ! Au bout d'un moment, on voit le changement qui s'est opéré et il faut se lancer ! Surtout quand on remarque les choses : les avances et les ouvertures ! Mais bon, Kelekt n'avait sans doute pas été assez démonstrative pour lui... Peut-être aurait-elle dû chauffer bien d'avantage Deenos en roulant des hanches, en papillonnant des yeux et en laissant ses hormones prendre le contrôle comme le fit Triss. Du moins, c'est ce qu'elle avait entendu au sein de l'escadron de Jarodin durant un entraînement. Elle ne savait pas si c'était réellement vrai ou exagéré. En tout cas, ça avait fonctionné. Comme quoi, laisser parler les chaleurs et avoir une attitude "décadente et outrageante" comme l'avait exprimé Lord Jarodin, fonctionnait. Au moins, dans cette situation, Deenos n'avait eu aucun doute sur les intentions de Triss.

La fureur de Kelekt s'était meurtrie et la gêne l'avait remplacé. Idryss les observait sans rien dire, attendant la suite. Est-ce que ça allait vraiment suffire à calmer la fureur de Kelekt ? Visiblement, oui, car l'attitude de Kelekt continua dans ce sens. La juge blanche se sentait maintenant mal à l’aise. La situation avait viré à 180°C. Idryss était désappointée, ne comprenant pas. À sa place, elle serait encore furieuse d'autant plus qu'il rejetât la faute sur elle, comme si elle n'avait pas fait des efforts suffisants pour qu'il comprenne à 100%.

Je suis désolé Dame Kelekt...

Kelekt se recula, acceptant le pas vers elle qu'il venait de faire. Il s'excusait et c'était bien. Au moins, il reconnaissait son erreur, même s'il insinuait que c'était en grande partie à cause d'elle. Idryss espérait qu'elle ne laisserait pas trop passer ça tout de même. Sauf que ce ne fut pas le cas. Kelekt baissa la tête, les oreilles et d'une voix traduisant qu'elle se sentait minable, elle répondit :

J’ai voulu faire… Comme les autres… Provoquer l’intérêt de manière détournée… Faut croire que même ça… J’arrive pas à le faire…

Elle est sérieuse là ?! Commenta-t-elle pour elle-même à l'entende de ceci.

Idryss se leva et s'approcha d'eux avec la ferme intention de faire culpabiliser un peu plus Deenos. Pas question que Kelekt se sente aussi nulle alors qu'il n'avait pas eu les couilles de lui dire qu'il comprenait ses avances. Son amie se sentait limite comme une moins-que-rien de ne pas avoir pu attirer comme il se doit le guerrier alors qu'elle avait fait tout bien à sa façon.

Eh toi ! Elle se plaça entre les deux, forçant le passage, les faisant reculer l'un l'autre. Ses yeux braquait sur le mâle, elle poursuivit : Ne rejette pas toute la faute sur elle : ses signes étaient gros comme les montagnes du Néant ! Ok, son aversion pour les mâles n'est pas un mythe, mais ça a changé depuis qu'elle te connaît, surtout envers toi. Elle n'allait pas non plus se frotter à toi pour que tu la prennes et comprennes ! Les démonstrations qu'elle a faite sont déjà très biens.

Sur ces paroles, Idryss partit vers le campement, leur tournant le dos, les laissant se débrouiller tout seuls. Elle ajouta, plus pour elle-même, bien qu'ils l'entendront :

De toute façon, y a qu'avec les chaleurs que vous comprenez.

Maintenant qu'elle partait, il ne tenait qu'à Deenos de consoler convenablement Kelekt. Idryss avait bien vu que les reproches qu'elle lui avait fais l'avait agacé, mis en colère. Il ne se remettait donc pas en question et voulait poursuivre dans la décision que c'était entièrement la faute de Kelekt ? La juge rouge espérait que Kelekt reprendrait du poils de la bête et ne se ferait pas aveugler par les paroles du guerrier. La juge blanche ne pouvait pas se morfondre en remettant en question toutes ses approches et ses façons de faire.

Alors qu'elle poursuivait son avancée, souhaitant aller dans sa tanière secondaire présente au campement en attendant Kelekt pour remonter au palais, elle entendit un couinement de douleur venant de son amie. Elle tourna la tête, interloquée et remarqua avec stupeur le changement d'état de Deenos qui se transformait en quelque chose de reptilien. Elle remarqua aussi le sang tâchant et coulant sur l'épaule de Kelekt, contrastant parfaitement avec son pelage.

C'est quoi ce délire ? S'exprima-t-elle en voyant Deenos se transformant à ce qui s'apparentait à un dragon. Kelekt, éloigne toi de lui tout de suite ! Cria-t-elle en revenant vers eux, prise de peur qu'il ne lui fasse plus de mal.

Néanmoins, la transformation de Deenos s'acheva avant qu'elle ne puisse les atteindre et ainsi sauter sur Kelekt pour la saisir et la reculer. Elle s'arrêta net et recula doucement de deux ou trois pas voyant maintenant un jeune dragon noir en colère. Depuis quand Deenos peut se transformer en dragon ? Le clan était-il au courant ? Aucun ragot de ce type n'avait atteint les oreilles de la dompteuse de dragons. Un regard vers Kelekt lui donna l'information que c'était bien la première fois qu'il se transformait. La stupeur qu'elle montrait en disait long sur le fait que c'était bien la première fois que Deenos se montrait ainsi.

Soudain, le dragon se tourna vers elle et se mit à hurler. Idryss aplatit ses oreilles face au cris et serra les crocs. Le cri du dragon fit revenir la rouge à son état d'énervement qui s'était envolé de façon passagère. Sa fourrure se gonfla et sa queue se releva face à ce que le dragon noir venait de dire. Seule elle avait pu comprendre l'insulte qu'il venait de lui gueuler. Elle se retient néanmoins de tout commentaire qui attiserait un peu plus la colère de Deenos dragon. Elle grommela cependant et sa queue droite battit l'air tel un fouet.

Arrête Deenos ! Tu ne sais plus ce que tu fais ! Je ne veux pas que vous vous battiez…

Heureusement que Kelekt était là pour tenter de tempérer la situation. Idryss hésitait entre rétorquer quelque chose et continuer de se contenir, au point qu'elle en retenait sa respiration. L’œil d'Idryss tiqua et les muscles de ses pattes tremblèrent. Il fallait à tout pris qu'elle se retienne de dire quelque chose d'assez fort en draconique que ce sale abruti de pecnot comprenne. Les narines d'Idryss s'ouvrirent en grand tout comme sa gueule, reprenant sa respiration.

La juge fut alertée par les bruits de membres du clan, des gardes et guerriers notamment, arrivant déjà. Ceux-ci ayant été alertés par le rugissement. De plus, il est facile de se dire que Deenos devait être visible de certains endroits du campement. Ils sont à l'écart, à la lisière de la vie du camp, mais quand même, ce n'est pas comme s'ils étaient très loin. Justement, la colère d'un dragon dans un campement n'est pas à prendre à la légère. Idryss respira un bon coup pour se calmer. Elle devait agir avec le plus de calme possible pour user de son pouvoir. La vie de Kelekt était peut-être en jeu, tout comme celles des membres se postant à plusieurs mètres d'eux. Même si pour l'instant, toute l'attention du dragon furieux est sur elle, elle pourrait tout aussi bien dériver sur quelqu'un d'autre.
La louve au sang de dragon parla en cette langue inconnue des canins, élevant la voix, mais dans le but que Deenos entende distinctement.

Deenos, essai de te calmer : tu es devenu un dragon ! Concentre-toi sur toi, plutôt que sur moi, et nous verrons ensuite pour discuter. (85/100 pour l'emploi de son pouvoir)

Idryss n'était pas très convaincue par l'emploi de son pouvoir. Toute la colère qu'elle ressentait depuis le départ était dure à évincer. Il fallait qu'elle se concentre plus pour calmer la bête lui faisant face.
Quelques secondes après ses paroles, Fralëth se posa derrière sa mère. Celle-ci fut alertée par le cri haineux du dragon noir et entrait donc dans la possible bataille. Elle rugit en direction de Deenos, se montrant la plus imposante possible en gonflant ses plumes et étendant ses ailes, puis bombant le poitrail une fois ses vocalises terminées. (8/100 pour l'intervention de Fralëth) Malgré le fait que la dragonne se montre la plus imposante possible, elle prononça des paroles pacifistes visant à calmer l'individu en face d'elle. Son expression était calme et sa posture gonflée n'était qu'une précaution pour le dissuader de charger et d'attaquer.

Part de là dragonne, que ta mère paye de ses actes !

Ni les paroles de Kelekt, ni celles d'Idryss, ni celles de Fralëth ne réussirent à atténuer la colère de la bête. Cela ne réussit pas non plus à le raisonner quelque peu. Il semblait même plus furieux. Il voulait tuer Idryss, tout simplement. C'était clair. La dragonne émit une vocalise d'avertissement, gueule fermée. Néanmoins, le dragon d'en face voulait en découdre plus que coûte et il fonça sur elles.

(94/100) Fralëth se mit en suivant devant Idryss et avança un peu. Elle se campa sur ses pattes, prête à réceptionner Deenos. Elle souhaite l'arrêter en l'attrapant. Seulement, les chances sont plutôt minces : Deenos est un dragon volcanique et elle, une dragonne aérienne. L'écart de force est naturellement différent entre les deux espèces. Il est taillé pour le combat et la forte brute, elle est taillée pour le vol et la rapidité. Néanmoins, la fille d'Idryss est confiante et concentrée en cet instant. Malheureusement, cela ne suffit pas.
Le choc est violent. Deenos la percute fortement, la faisant basculer en arrière, et même tomber, manquant d'écraser Idryss. (68/100 pour l'esquive d'Idryss) Celle-ci entama un repli par le côté, néanmoins, elle se prit la retombée sans retenue de l'aile, la plaquant au sol, sous ce membre lourd de plumes.
(56/100 pour la fuite) Malgré le choc violent, Fralëth ne fut pas sonnée. Elle put réagir rapidement face à la menace qui s'abattra très bientôt sur elle et sa mère. Elle se relava d'un coup en rampant vers l'arrière et roulant sur le côté afin d'esquiver la proche offensive. Elle vit du coin de l’œil un point rouge au sol et l'attrapa d'une patte en sachant pertinemment qu'il s'agissait de sa mère. Puis, elle donna un grand coup d'aile en sautant en l'air afin de s'envoler le plus rapidement possible. Le souffle dégagé balaya les alentours. L'action se déroula en très peu de secondes.
Dans la patte de la dragonne, Idryss était molle et en état de semi-conscience : sa tête vacillait et elle voyait floue.
Le combat draconique qui s'est enclenché, va-t-il continuer dans les airs ? Dans le ciel, Fralëth était sûre et certaine de pouvoir fuir et le semer. C'est vers le désert que la dragonne partait à tir d'ailes. Elle devait mettrre sa mère en sécurité.