Maman était morte.

Elle était partie, et Duncan n'avait pas réussi à lui faire comprendre ce qu'il ressentait. Sa disparition avait provoqué en lui un effondrement quasi total. Il aimait si fort sa mère et n'aura jamais l'impression d'avoir été aimé autant par elle. Cela faisait deux jours, et Duncan n'arrivait pas à aller mieux.

Avant son effondrement, le chien loup passait beaucoup de temps avec son père, qui lui apprenait ce qu'un chef d'armée ne pouvait apprendre. C'est ce que Heimdall lui avait conseillé. Savoir se battre ne donnait pas le savoir d'un dirigeant, ni même la capacité à diriger. Heimdall enseignait à se battre, les stratégies de combat, ce genre de choses. Le jeune chien loup avait fait confiance en son chef d'armée, admirant son savoir dû à son ancienneté. Son père, après une longue discussion, avait alors accepté de l'emmener avec lui pour son travail de bêta, lui expliquant les choses quand c'était nécessaire.

Mais maintenant, Père était alpha, et Duncan ne lui prendrai plus son temps comme il l'avait fait jusqu'ici, il ne pourrait plus demander à Père de l'instruire. Mère n'avait jamais eu beaucoup de temps à lui accorder, parce qu'elle occupait son peu de temps libre avec Khan quand elle ne se reposait pas.

Khan...

Ce jour là, il avait accompagné Svalrog jusqu'au rocher, juste derrière lui comme son ombre. Il était resté proche, alors que tous les autres s'étaient tenus en retrait, assistant de loin à la scène. Khan lui avait suivit l'assassin de Maman jusque là bas. Cette pensée faisait grincer les dents du chien loup. Elle lui avait tout donné, à lui exclusivement, et Khan avait décidé de suivre un loup qui la tuerait.

La haine de l'hybride envers son frère n'avait fait que croître. Son frère n'était plus qu'un rival des bacs à sable, il avait trahit son sang et sa famille. Duncan ignorait quel lien avait lié Khan à Svalrog, mais peu importait, il n'avait pas eut l'air contraint de suivre le loup dragon, il n'avait pas eut l'air apeuré par la situation.

La famille s'était comme séparée depuis le combat. Père, dans un sale état, était toujours chez les médecins. Duncan avait peur d'aller le voir, peur de se confronter à cette réalité supplémentaire, que son père avait failli mourir lui aussi, et à présent, il pouvait représenter une cible. Duncan était si fier d'être son fils, d'avoir de son sang en lui, tout comme il avait été fier d'être le fils de Léone, et d'être le mélange entre ces deux êtres illustres. Mais Khan...

Durant la majorité de son enfance, le jeune avait tenté d'aimer son frère, de trouver n'importe quelle raison qui puisse être plus forte que la rivalité que khan avait installé entre eux. Mais maintenant, Duncan savait qu'il n'arriverait plus à essayer.

La scène de combat l'avait laissé dans un choc profond et le jeune loup avait déserté le camp pendant plus d'un jour. Personne n'était venu le chercher, il n'avait même pas pensé à cette éventualité. Comment aurait il réagit si quelqu'un était venu le trouver?

Il était revenu un peu après le premier jour. papa était toujours mal, Duncan avait l'impression de sentir l'odeur de son sang partout, sans avoir si c'était réel ou simplement une illusion. Mais cela ne le préservait pas des flash, voir son père se battre, avec tant de violence. Voir sa peau se déchirer, son bois se casser, Père avait failli mourir.

Duncan, après avoir mangé et être allé s'excuser auprès de Heimdall pour ses absences, était parti se réfugier chez lui. A peine était il entré que l'odeur de Maman lui avait sauté aux narines. Omniprésente, comme un dernier souvenir. Il avait péniblement marché jusqu'au fond, au plus profond de la grande tanière, et s'y était roulé en boule.

Là bas, en silence, il s'était laissé allé, pleurant de peine pour sa mère et de rage contre le loup avec lequel il partageait son sang.

Il ignorait combien de temps il était resté là, mais quelques temps après, une voix le fit revenir au temps présent, et il laissa là les souvenirs qui déferlaient. Aussitô qu'il reconnu la voix, Duncan ne pu empêcher un grondement menaçant sortir de ses entrailles. Il se releva lentement, le poil s'hérissant sur son échine et sa queue qui se relevait.

Il planta ses yeux d'or dans le regard de Khan qui se tenait devant lui, grondant, tous crocs dévoilés. Ses bois étaient encore petit par rapport à ceux de son père avant qu'ils ne se brisent, mais ils pouvaient encore faire mal.

Il ne prononça pas un mot à l'égard de son frère. Sa haine était si grande et féroce qu'il n'était plus capable que de grogner.

La réaction de son aîné ne fit que gronder Duncan plus fort. Comment Khan pouvait il croire que l'hybride tomberait dans le panneau? Le jeune se faisait violence pour ne pas faire un pas vers cet être qui faisait bouillir les moindres parcelles de sa fourrure. Le jeune sentait ses griffes palpiter, le démanger, La force qu'il mettait dans son contrôle se percevait sans doute, ses pattes tremblant, sa fourrure gonflant encore et toujours.

Malgré tout, Duncan ne sautait pas sur son frère. Il aurait pu le pousser, s'en aller, fuir tout contact avec celui à qui il devait tout son malheur. Mais il écouta. Sans faillir, il gardait ses yeux plantés dans ceux de l'autre. Il constatait avec dégout tous les efforts que son frère mettait dans ce cirque. Il n'avait plus personne à admirer, il n'avait plus personne pour l'admirer, alors il tentait de se rabattre sur ce qu'il restait. Mais Duncan ne tomberait pas dans le panneau, pas cette fois.

Avec une patience durement acquise, le chien loup laissa l'autre finir. Finalement, il fit un pas en avant, puis deux, lentement, sa patte tremblant sur l'effort qu'il fournissait pour ne pas dévisser la tête de son frère d'un seul coup. Sa voix lorsqu'il parlait fut glaciale, la phrase brève et crue, il n'y avait aucun amour en lui, pourquoi Duncan lui en donnerait-il?


La question, réthorique, n'exigeait aucune réponse. Duncan ne croirait aucune parole qui sortirait de la gueule de ce serpent. Mais puisqu'il était là, puisqu'il était aplati au sol comme l'insecte qu'il était, il était hors de question que Duncan laisse passer sa chance, Khan serait forcé de l'écouter.



Il avait craché ces derniers mots comme un venin. s'il avait pu lui planter ses crocs dans la gorge, sans doute Duncan aurait il cédé ainsi à sa douleur et à sa colère.

Le menton du jeune hybride tremblait, ses yeux brillaient de rage. Les larmes avaient cessés de couler mais ses joues étaient encore humides. Il doutait fortement que l'autre saisisse l'importance de ces paroles, mais Duncan n'en avait pas fini.


Il ignorait encore à quel point khan était lié à sa disparition, mais au fond de lui il en était persuadé, qu'il suive Svalrog à ce moment là n'était pas un hasard. Les machoires du chien loup se serrèrent, il avait envie de hurler, de gueuler, mais sa voix, contrastant avec son corps et sa posture, restait froide et sinistrement calme.



Il se tut, essoufflé, douloureux, grondant.

Les pupilles de Duncan se rétractèrent, il sentit comme une aura autour de lui, presque inconsciente. Il ne s'en préocuppa pas. Il ne quittait pas l'autre des yeux, retenant non sans mal le rire âpre et cru qui tentait de percer ses mâchoires. Toutefois, il n'interrompi pas son frère.

Duncan n'arrivait pas à déterminer les pensées de son frère, mais il devait admettre que Khan souffrait beaucoup. En quelques minutes tout son petit monde avait disparu, sa tour d'ivoire s'était effondrée. Duncan pouvait le haïr autant qu'il le pouvait, il ne pouvait balayer d'un revers de la patte la douleur que l'ainé devait aujourd'hui supporter. Ses yeux s'aggrandir, par rage et par stupeur. Il baissa le cou sans que son museau ne pointe le sol. Sa voix, jusqu'ici glaciale, s'était presque tue et ne fut plus qu'un murmure sombre.


Tout son corps tremblait de ce qui bouillonnait en lui. Il redressa sa tête, comme pour être plus grand encore. Il plissa les yeux.



Encore une fois l'hybride n'attendait aucune réponse, il était déjà persuadé de la connaitre. Il soupira et ferma les yeux, sa colère ne se dissipait pas, et sans doute lui faisait elle perdre la tête. sans même qu'il ne s'en rende compte. Duncan se fit dur.


Ça n'était qu'une douce justice pour tout ce qu'il avait provoqué dans sa jeune vie.

Duncan était fatigué. Il n'arrivait plus à bien se contrôler, s'il savait qu'il s'en délecterait, qu'il se sentirait mieux après, il ne lèverai pas la patte sur lui. Il fit un pas en avant, il allait sortir de cette tanière et laisser son frère tout seul dans cette tanière où l'odeur de mère parcourait les murs.

Toutefois, alors qu'il le dépassait, il s'arrêta, son épaule à hauteur de celle de son frère. Il renifla et tourna son regard d'or dans celui de Khan.


Puis il détourna son attention de son frère et repris sa route. Le voir se morfondre lui était insupportable.