Okazeh était partie et le temps semblait avoir drastiquement ralenti. Aslan dormait seul dans la tanière avec ses enfants, sans sa compagne, pour la première fois depuis des lustres. S'il supportait mal la distance qui le séparait de sa louve, il pouvait faire comme si de rien. Il avait vécu la majorité de sa vie seul, il connaissait la solitude, mais aujourd'hui heureusement ses enfants étaient encore avec lui.


Le bêta gardait la forme, la vieillesse ne semblait pas avoir d'emprise sur lui. Le printemps était définitivement de retour, et l'air se réchauffait. Comme il faisait beau, Aslan après avoir fini son travail de bêta, entrepris un petit trot le long du fleuve. Les eaux pourpres étaient traitresses, il ne fallait pas boire dedans, aussi le mâle avait apporté avec lui une gourde de peau qui pendait à son cou.

Alors qu'il faisait sa petite course, il aperçu une silhouette se relever et reconnu son fils unique. Pas de doute, il était bien son fils, couvert en majorité du rouge de son père. Heureusement les deux grandes ailes plumeuses qui le portaient faisaient de lui un authentique loup du désert. L'interpelation du chasseur fit se dresser les oreilles du bêta qui trotta plus vite pour le rejoindre.



Mais une fois l'un à côté de l'autre, Aymeric se tut et ne dit rien. Aslan ne le poussa pas et en profita pour déboucher sa gourde afin de se dessécher la gorge. Il voyait le malaise de son fils ailé mais ne dit rien et fit comme s'il n'avait rien remarqué. Aslan reboucha sa gourde et la posa par terre avant de s'étirer nonchalamment pour calmer ses muscles.

Finalement, à la question d'Aymeric Aslan s'assit. Techniquement il avait déjà posé la question.... Trêve de plaisanterie, Aslan hocha la tête.

Aslan écouta attentivement son fils assis en face de lui. Oui il l'avait constaté, mais n'y avait pas donné tant d'attention, cela lui avait semblé être une situation logique, la dernière fois avant le combat où son fils avait trainé avec la Démonia, Aslan avait du aller le rechercher dans le désert avec une patte cassée. Mais Aymeric avait changé d'attitude, visiblement cette situation d'éloignement avec la démonia ne lui avait guère plus. Aslan ne s'était pas posé plus que de questions, les enfants avaient encore beaucoup de mystère qu'il n'avait résolu....

Aslan hocha de nouveau la tête. Eris était une démonia et ces derniers étaient réputés pour leur sang chaud... Mais également pour leur savoir vivre. Il savait Eris douée de civilité et n'était donc pas étonné qu'elle aie souhaité remettre les choses à plat avec Aymeric. Aslan hésitait presque à se dire que c'était certainement dû au fait que son fils était enfant de deux bêtas, et pourrait être à l'avenir un bon allié pour elle.

Plus Aymeric parlait plus il était démonstratif, ce qu'il voulait dire lui tenait beaucoup à coeur et il ne comprenait sans doute pas la situation dans laquelle il était. Aslan resta attentif pour son fils. Il garda un contrôle total de ses expressions. Son fils avait fait pleuré une démonia! Il pouvait presque en être fier, mais Aslan ne le dirait certainement pas.

Il continua d'hocher la tête sans cesse, écoutant encore et toujours le discours de son fils. Aslan ne connaissait pas Eris, il ne pouvait juger selon lui s'il était étrange que quelqu'un vienne s'excuser, m'enfin si Aymeric le disait. toutefois il hocha la tête. Il savait qu'il y avait des critères de sélection dans cette famille bien qu'il ne connaissait pas les tenants et aboutissants précis. Mais du peu qu'il avait observé de la relation entre Aymeric et Eris, où chaque rencontre finissait mal, il lui semblait beaucoup de dire qu'ils étaient amis, même si Aymeric disait le contraire. Et maintenant cette jeune avait envisagé de l'utiliser lui, son fils, comme mâle pour sa lignée?

Lier les démonias avec les Genesis n'était pas une mauvaise idée en soi mais Aslan s'y serait sans doute opposé, il avait pris soin de faire de son nom le premier porté par les loups de la race du désert, c'était son souhait le plus cher que le nom que ses enfants portaient reste un symbole d'unité et de grandeur dans la race qui les caractérisaient, mais cela n'était pas possible si son nom rejoignait celui de démonia, car sans nul doute serait-ce ce dernier qui serait affiché ensuite, et le nom Genesis serait alors oublié.


Puis Aymeric lui dit qu'il ne correspondait pas, et les oreilles d'Aslan se dressèrent. Donc les loups du désert ne convenaient pas aux démonia, alors si une descendance entre les genesis et les démonias devait avoir lieu, les petits pourraient certainement porter le nom de sa famille. Tout compte fais, peut être aurait- il laissé un mariage se faire entre les deux....

Aymeric était agité et termina tout son discours en clamant qu'il ne comprenait rien, Aslan ne dit rien et le regarda, réfléchissant. Les réactions de la louve pouvait indiquer bien des choses, mais le bêta n'était pas un professionnel du coeur, pour preuve c'était Okazeh qui avait du lui montrer que lui aussi était amoureux.

Aymeric confirma les pensées d'Aslan, il l'estimait et aimait être avec elle, il la voyait comme une amie. Il ne voulait lui parler d'amour aujourd'hui, son fils resterait toujours son petit enfant et il l'estimait de toute façon trop peu mature pour envisager quoi que ce soit. Aslan s'allongea en sphynx et regarda l'eau rouge couler.


Après tout, la mère démonia n'avait pas non plus choisi un partenaire par amour mais par sélection. Peut être que ces paroles suffiraient au petit mâle ailé. Même s'ils n'expliquaient pas ces crises de larme de la femelle, mais les femelles... Aslan ne les comprenait pas toujours.

Aymeric ne réagit pas plus. Finalement, les paroles d'Aslan semblaient suffire au loup rouge. Si cela lui permettait d'y voir plus clair, mais l'air candide qu'il lui montra fit dresser les oreilles du père. Il le regarda puis se racla la gorge avant de tourner la tête vers l'horizon.



Il retourna son attention vers son fils.

Son fils semblait en plein réflexion et Aslan sourit en se redressant pour s'étirer. S'il restait trop longtemps immobile après sa course, il risquerait d'avoir des crampes. Patiemment, il attendit qu'Aymeric sorte de sa sorte de transe, tout en travaillant ses pattes.

Au bout d'un moment, son fils se releva et Aslan s'immobilisa devant lui, tout sourire, ravi d'avoir pu éclairer Aymeric. Il ne comptait pas rprendre son jogging, maintenant qu'il s'était étiré c'était trop tard, mais il pourrai exécuter quelques exercices sur le chemin du retour vers le camps. Le bêta hocha la tête face aux remerciement d'Aymeric et ne put s'empêcher de rire à son clin d'oeil. Il ne bougea pas en le regardant partir d'un petit trot heureux. Finalement, il le suivit pour rentrer.