Ce rp se déroule aux tanières

-Kuma-

Cela faisait maintenant plusieurs mois que Kuma avait rejoint les Terres solitaires après la bataille des cavernes. Elle avait cessé de se demander ce qu'il était advenu de son clan, de sa famille, de son Alpha et de sa fille, pour à la place s'occuper d'elle, et de la portée qui grandissait doucement dans son ventre. Paradoxalement, même blessée, aveugle et loin de son clan, elle n'avait jamais été aussi heureuse. Elle se sentait enfin pleine, enfin louve, et remerciait la déesse Amiria pour ce cadeau chaque jour dans sa piété habituelle, convaincue que ses prières avaient enfin été entendues.

La vie n'était pourtant pas facile, mais la présence d'Imryu la rendait moins dangereuse. Kuma ne mourrait pas de faim, et même si elle était encore faible, elle était toujours en vie. Elle avait gagné peu à peu confiance en cette mère qui avait eu pitié d'elle, et savait pertinemment que sans elle, elle et ses enfants seraient morts. Cependant, le futur était toujours aussi sombre. Elle ne voulait pas revenir chez les cavernes avec des nouveaux-nés que Yogrenn pourraient facilement tuer. Pourtant, si ce que Heimmdall était vrai, c'était Sygrid qui aurait prit la tête du clan. Cette dernière était une femelle, et malgré son ascendance, serait peut-être plus encline à laisser Kuma et ses petits regagner le clan. La louve rayée se devait de tenter le coup, elle ne pouvait pas vive aux crochets d'Imryu toute sa vie, mais elle devrait attendre que ses petits sachent se déplacer correctement ...

Elle pensait à tout cela tous les jours, alors que sa grossesse avançait. Elle n'avait pas compté les jours, mais elle sentait son ventre la tirer de plus en plus, et ses mamelles se gonfler de lait. Cela ne devrait plus tarder, selon ses prognostiques, et c'était tant mieux car elle avait du mal à bouger. Elle se contentait d'aller à la rivière, essayer d'attraper quelques petites proies ou poissons. C'était d'ailleurs ce qu'elle faisait aujourd'hui, sous la chaleur étouffante de l'été. L'ombre des arbres était une bénédiction, et si malgré cela elle continuait de suffoquer, elle pouvait toujours se tremper les pattes dans le cours d'eau. La louve avait ce jour là les deux pattes avant dans l'eau, tentant tant bien que mal de chasser à l'ouïe. Elle s'améliorait mais la chose était toujours extrêmement difficile, et elle finissait souvent par se blesser le museau. Soudain, une sensation violente la prit à l'abdomen, la faisant grogner. Une contraction ? La chaleur en provoquait parfois, mais celle-ci était bien plus douloureuse ... Un pressentiment la prit et elle marcha lentement jusqu'à sa tanière ou elle avait aménagé son lit, en proie à des contraction de plus en plus régulières.

La caverne s'installa dans son lit et laissa son instinct lui dicter quoi faire. Elle n'avait pas osé appeler Imryu, par pudeur et de peur qu'un autre solitaire l'entende et vienne lui rendre visite dans cette situation de faiblesse. Elle souffla, laissant passer contraction après contraction, restant le plus calme possible. Après tout, des générations de mères avaient mis bas seules et sans aide, ce ne serait pas la première fois. Et elle avait confiance en Amiria : elle ne lui avait pas permis d'avoir une portée pour lui retirer dés la naissance. Le temps s'étira, et au bout d'un moment elle sentit le premier louveteau sortir. Elle l'attrapa doucement, le léchant et le ramenant tout contre son ventre. Elle le lécha longuement, le stimulant, faisant confiance à son instinct maternel. Son corps se calmait peu à peu également, les contractions s'espaçant, signifiant la fin du travail et une dernière contraction la délivra du placenta, qu'elle ingurgita. La fatigue la faisait trembler, mais une sensation douce de chaleur l'envahissait peu à peu alors qu'elle ne réalisait qu'à peine : elle venait de devenir mère.

-Kuma-

La caverne reprenait peu à peu ses esprits, chassant la douleur. Elle sentait, béate, les petites pattes et le corps chaud du louveteau qui têtait ses mamelles afin d'en tirer le colostrum. Elle ne pouvait plus s'arrêter de sourire, se sentant comme dans un rêve. Une odeur douce perça jusqu'à ses narines, celle d'Imryu. Elle l'entendit s'approcher. Peut-être était-elle restée à l'entrée de la tanière, Kuma s'en savait rien tant la mise bas avait été prenante. Un instinct violent de protection naquit dans ses entrailles, lui dictant de chasse l'intruse, et elle retroussa les babines, prête à grogner.


La voix douce d'Imryu retentit dans ses oreilles, calmant son instinct de mère. Elle avait confiance en cette dernière, d'ailleurs elle savait probablement mieux qu'elle quoi faire après une mise bas. Elle fit un pas, et Kuma sentit l'odeur d'une proie fraîchement chassée. Son ventre grogna : elle se rendit compte qu'elle était affamée, et assoiffée.

Kuma ne bougea pas, son sourire ne quittait pas encore ses babines. Malgré la douleur toujours présente de l'accouchement, elle se sentait divinement bien. Elle acquiesça, et répondit calmement :

Oui

Elle donna une léchouille à son petit, sentant sa peau chaude et douce contre sa langue. Elle n'avait aucune idée du sexe, ni de ce à quoi il ressemblait. Elle releva la tête alors qu'Imryu s'avançait. peut-être pouvait-elle l'aider, sûrement même. Elle se devait de nommer ce petit être qui venait d'entrer dans sa vie, et pour cela, il lui fallait le sexe ! Elle dit d'une voix douce, plus douce que jamais elle n'avait parlé :

Tu pourrais me dire si c'est un mâle ou une femelle ? Si tu veux bien ...

-Kuma-

Elle entendait les pas d'Imryu se rapprocher lentement, mais elle ne bougea pas. Son instinct s'était tu, et elle acceptait de laisser cette mère qu'elle n'avait jamais vu entrer dans sa tanière. La louve fit rouler une proie vers Kuma, et cette dernière sentit son estomac se tordre de faim en flairant le fumet qui s'en dégageait. Elle eut une pensée qui la fit rire : Imryu avait déjà eut une portée, elle devait être au courant de la fameuse faim de loup post-partum ! La louve se rapprocha encore, acceptant la demande de Kuma. Elle ne toucha pas le petit, ce qui la soulagea, mais elle sentait des mouvement d'air à côté de son ventre. Puis finalement, une voix :


La caverne sentit son cœur se serrer d'une joie immense, profonde. Un petit caverne, ou plutôt demi-caverne ! Elle ne pouvait plus s’empêcher de sourire, et déglutit. Imryu continua, décrivant l'aspect physique de la petite boule de poil qui tétait ses nombreuses mamelles. Au moins, il ne mourrait pas de faim !

La louve rit, et Kuma pouffa aussi. Pouffer ? C'était bien la première fois qu'elle riait avec autant d'insouciance depuis ... De puis son enfance. Le petit avait donc hérité de la crinière de son père. Kuma n'arrivait plus à se souvenir si cette dernière était fournie ou nom, et donc de quel niveau d'entretien il lui faudrait !


La solitaire s'arrêta. C'était amplement suffisant à Kuma pour faire un portait de ce petit être qui venait de naître. Elle baissa la tête, le léchant encore une fois alors que l'émotion la submergeait. Elle sentit son unique œil la piquer alors qu'une larme en coulait, larme qu'elle chassa bien vite. L'instinct des cavernes était resté, même si elle n'avait plus besoin de cacher sa faiblesse.

La louve n'avait pas tellement réfléchis au nom qu'elle donnerait à ses louveteau, ne sachant pas combien ni de quel sexe ils seraient. Le fait qu'il n'y en ai qu'un lui facilitait la tâche. Elle voulait un nom facile à porter, peut-être qui rappelait celui de son père ... Ce dernier n'était finalement qu'un géniteur, mais peut-être seraient-ils amenés à se rencontrer dans le futur, qui sait. Elle était en train de réfléchir quand elle entendit Imryu renifler, et tourna la tête vers elle, légèrement inquiète.

Ça va ?

-Kuma-

La femelle sentait Imryu agitée. Elle bougea les oreilles , partagée entre l'incompréhension et le désir d'en savoir plus. Mais elle ne connaissait finalement la solitaire que très peu. Les deux avaient passé un accord tacite non-dit de ne pas révéler leurs passés. C'était mieux après tout pour leur cohabitation, même si une nappe de mystère trainait toujours entre elles, et traînerait probablement à jamais. La louve éternua, puis répondit :


Elle entendit dans un bruissement la louve s'éloigner, puis s'ébrouer. Kuma était toujours dans le flou quant aux sentiments de l'autre, le fait de ne pas pouvoir voir son visage n'aidait pas. Mais elle acceptait ce flou. Peut-être voulait-elle partir, se sentant mal à l'aise ici ? Kuma n'était pas contre du temps avec son petit, mais c'était Imryu qui l'avait aidée, qui lui avait décrit son apparence, et elle en était reconnaissante. Et à vrai dire, elle avait un peu peur de ne pas faire les choses bien, de ne pas voir une blessure, ou une gène à cause de son handicap. Finalement, elle s'approcha de nouveau, s'asseyant à côté de Kuma. Cette dernière lui sourit. Ses cicatrices la tiraillait à chaque sourire, mais elle n'avait aucune idée de la tête qu'elle avait. Au moins elle qui voulait paraître impressionnante, elle le pouvait encore.

Kuma pencha la tête. Elle y avait réfléchi pendant ces quelques minutes, et maintenant en visualisant le petit, un nom lui venait en bouche. Un nom qui sonnait bien, qui ressemblait un peu à celui de son père, un nom qu'elle avait déjà apprivoisé. Il ne lui restait plus qu'à le prononcer à voix haute pour la première fois.

Heindrick. Ça sonne bien j'trouve.

Elle émit un petit rire. Elle ne savait pas comment les autres loups choisissaient les noms des petits, mais pour elle si ça sonnait bien, c'était bon signe. Heindrick, c'était un nom avec lequel elle était prête à vivre tous les jours. Elle tourna la tête vers Imryu, sentant le petit Heindrick encore contre elle s'endormir.

Comment tu as choisi le prénom de ta fille, toi ?

-Kuma-

A la suite de la question de Kuma, le silence tomba dans la tanière. Le louve aveugle fronça très légèrement les sourcils, alors qu'elle sentait l'atmosphère changer, devenir plus froide. Son instinct, un peu comme un sixième sens, lui disait que quelque chose n'allait pas. Mais elle n'avait jamais cru à son instinct, et c'était bien pour cela qu'elle avait choisi de neutraliser son pouvoir dès qu'elle l'avait découvert. Maintenant, les pouvoirs étaient partis, mais elle espérait tous les jours qu'ils reviennent, car son œil pourrait au moins lui permettre de percevoir les autres loups. Elle ne serait plus tout à fait aveugle ... Elle bougea légèrement, enveloppant Heindrick comme pour le protéger, son corps bougeant presque seul selon son instinct. C'était néanmoins subtil, et elle détestait avoir ce pressentiment qui n'avait aucun fondement logique. Finalement, Imryu bougea, et finit par bégayer :


Kuma sentit son cœur se serrer. La louve semblait dans un état d'émotion intense. Kuma avait eut une pensée fugace, lorsqu'elle avait compris qu'Imryu était accompagnée de son unique fille, qui lui revenait à présent. Les louves mettaient bas en général plusieurs louveteaux, et même si elle n'avait eut qu'un fils, c'était compréhensible. Mais Imryu avait eu une portée plus jeune ... Peut-être qu'il était arrivé quelque chose à ses enfants. Et Kuma ne pouvait pas imaginer la douleur incommensurable que cela lui provoquerait si quelqu'un touchait ne serait-ce qu'un poil argenté du crâne de son fils. Puis, Imryu se racla la gorge, un peu plus proche de la sortie. Kuma ne l'avait pas entendue s'éloigner.


Sa voix était un peu tremblante, et elle sorti comme une bourrasque de la tanière, laissant la nouvelle mère et son enfant seuls. Kuma posa la tête sur ses pattes, des pensées emplissant son crâne. Puis, le sommeil fini par l'emporter, doux et profond.