Falaise haute perchée

YSTRELLE

La chasseuse était parti explorer de nouveaux territoires de chasse. Les ratons volants devenaient moins nombreux, il était donc temps de les laisser refaire un peu leur population. Les plantes mouvantes étaient son terrain de prédilection, les grandes plaines étaient celui des chasseurs de grosses proies. On pouvait certes y attraper des lapins, de mulots, des campagnols, mais on risquait en général de déranger une chasse plus importante.

C'était pour cette raison que la petite louve verte s'était aventurée sur les anciens territoires de l'eau. Elle avait trouvé des salamandres luminescentes dans la caverne crystaline mais elle doutait que ce soit comestible. Elle était maintenant sur les hauteurs de la Falaise Haute-perchée. Elle n'avait trouvé traces que d'oiseaux marins, mais certains avaient la bêtise de faire leur nid à même le sol, vaguement dissimulés sous des rochers. Elle nota les emplacements qu'elle trouvait, il faudrait revenir avec une besace pour transporter tous ces oeufs. Avec de la patience, elle pensait qu'il était également possible d'attraper quelques adultes, mais il faudrait choisir les plus petits chasseurs du clan, l'herbe était trop rase pour qu'un individu plus gros puisse s'y dissimuler.

Elle s'installa au bord du vide pour faire une pause. Il faisait un grand soleil. La mer venait lécher tendrement les pieds de la falaise. Il faudrait qu'elle organise un groupe d'ex eau pour faire des campagnes de pêche. Le poisson était assez rare à leur menu, ça ne pouvait pas faire de mal de varier un peu?

YSTRELLE

les yeux rivés sur les vagues, la chasseuse ne pensait plus à la chasse mais à sa fille. Les éléments se dechainaient contre la paroie de la falaise, et même elle cédait du terrain un peu plus à chacun de ses fragment qui s'abîmaient dans les profondeurs de la mer. Verd n'avait jamais été aussi solide que cette falaise, elle avait endurci son cœur, mais au fond il restait celui de la petite louvette douce qu'elle avait été. Les événements des dernières années avaient érodé la carapace qu'elle avait érigé autour de son cœur. La mort de Ragnar lui avait porté le coup fatal. Il n'y avait plus de mur infranchissable, et de son cœur sourdait une douleur noire que sa famille ne pouvait panser.

Rahawk était venu plusieurs fois pour la voir, ses frères le lui avaient dit. Mais il avait battu en retraite, à chaque fois. Elle poussa un soupir. Voir son frère pour qui elle avait tout sacrifié rendrait-il le goût de la vie à la princesse crystalline? Ou lui en voudrait-elle ? La chasseuse soupira. Ses enfants étaient une cause constante de soucis, jamais cela ne cesserai car jamais elle ne pourrait les voir autrement que les petites boules de poils chaudes qui dormaient contre son ventre. Voir sa fille avec le cœur brisé déchirait son propre cœur mais elle ne savait que faire. Elle ne savait pas même ce qu'elle ferait quand Gothic partirait. Il était beaucoup plus âgé qu'elle, elle savait que le jour viendrait où il n'y aurait plus qu'elle. Elle refusait d'y penser alors qu'il était bien vivant auprès d'elle chaque nuit. Ce que vivait sa fille devait s'apparenter à une marche dans des enfers nébuleux.

La voix de Tanyxoth la tira de ses pensées. Elle ne l'avait pas senti arriver, la truffe emplie de l'odeur des embruns. Il y avait longtemps qu'ils ne s'étaient pas vus. L'une des dernières fois, elle lui avait planté ses dards d'argent dans le postérieur. Elle sourit à ce souvenir vestige d'un passé insouciant. Jusqu'à ce qu'elle perde ses pouvoirs, c'était encore une menace très efficace sur les membres de sa famille. Après tout elle était la plus faible, la plus petite, si elle voulait se faire respecter dans cette famille de grandes brutes, il lui fallait s'imposer avec toutes les armes dont elle disposait. Heureusement pour elle, ses petits étaient maintenant tous grands et elle n'avait plus besoin de son pouvoir.

Bonjour Tanyxoth. Je suis heureuse de te voir.

Elle ne voulait pas mentionner Ragnar. Elle lui avait déjà présenté ses condoléances et elle portait elle aussi le deuil de ce jeune loup qu'elle avait accueilli chez elle comme un fils. Elle lui était plus redevable que personne d'autre au camp de la source et sur tout elementloups. Grâce à lui, la chair de sa chair était vivante. Grâce à lui, Rahawk était libre.

Tu es venu admirer la mer ?