Trinity marchait, depuis qu'elle avait été miraculeusement guérie de sa douleur et de ses blessures, elle marchait. Certes pas aussi bien qu'avant, son pas était pataud, elle boitait, mais au moins elle avançait. Son flanc et sa cuisse étaient couvert de larges cicatrices, séquelles des brûlures de Guerre, les poils recommençaient lentement à pousser, mais nous pouvions imaginer sans peine les blessures qu'elle avait du subir. A défaut de comprendre comment elle avait pu guérir si vite, elle qui peinait à se tenir debout, les médecins lui avaient conseillé de faire de longues randonnées pour réhabituer ses pattes. ça n'aura rien de difficile, elle n'avait de toute façon rien à faire de la journée.

L'oméga était donc partie pour une longue balade, informant les médecins qu'elle longerai la côte. Elle était partie, sans rien prendre avec elle. Elle trouverai de quoi manger et boire quand elle en aurait besoin. Elle avait pénétré les plantes, les regardant s'écarter sous son passage. Les plantes étaient elles capable d'empathie? Pouvait elles comprendre la douleur psychologique dans laquelle la louve s'était plongée toute seule par ses bêtises?

Elle était ensuite arrivée à la plage et avait entamé sa longue marche au bord de l'eau. Elle marchait dans le sable, ne laissant l'eau la toucher que pour lécher ses pattes. Si un autre loup se serait arrêté pour admirer ses pattes disparaitre, elle s'en fichait, elle sentait toujours ses membres,et elle marchait, c'était ça son objectif, marcher.

Elle se rappelait son chez elle, les terres de l'eau. Elle sentit son coeur se serrer mais elle ne s'en occupa pas. Le camp lui manquait, la forêt lui manquait aussi, sa tanière, froide et peu accueillante, lui manquait tout autant. Trinity continuait de marcher.

Au bout du premier jour, elle s'arrêta sur la plage. Elle avait décider de passer la nuit à côté de la forêt, pour ne pas se faire surprendre par un adepte dans un état lamentable. Elle chassa un lapin, enfin, le troisième qu'elle avait seulement réussi à attraper, puis s'installa contre un arbre, mangea, bu un peu, et dormi.

Elle se réveilla tôt le lendemain, mangea à nouveau, bu encore, puis reparti. Elle avait peu dormi, mais elle avait suffisamment économisé ses forces pour presser le pas quand elle arriva proche de la frontière du château. Les médecins, les gardes et les sentinelles après eux, chacun lui avait dit de rebrousser chemin avant d'arriver près des frontières avec le domaine, mais Trinity les avait entendu, et avait secoué la tête sans rien dire.

Elle n'ignorait pas les dangers du domaine d'Akui, mais elle savait qu'il ne lui arriverait rien, elle en était persuadée. Elle se rapprocha de la mer, et le pas vif comme elle pouvait malgré sa démarche claudiquante.
Après un temps indéfini, l'odeur changea et quand elle tourna la tête à sa gauche, le domaine avait disparu et les steppes pointaient à l'horizon. Trinity pris une grosse bouffée d'air, sans le savoir, elle était presque arrivée.

Elle avait été plus lente que prévu. A la fin du deuxième jour elle n'avait toujours pas fini de traverser la plage, elle ne devait être qu'à la moitié de la longueur des steppes. Elle n'avait pas pensé être aussi lente, les médecins devraient sans doute commencer à s'inquiéter de ne pas la voir rentrer, saufs s'ils s'en fichaient, car après tout elle n'était quelque chose que pour très peu de monde. A la fin du deuxième jour, elle se dénicha un maigre repas, et alla dormir.

Elle se réveilla à nouveau le lendemain, encore une fois elle n'avait pas beaucoup dormi, et la fatigue commençait à la gagner, combiné à la douleur de ses membres qui n'étaient plus habitués à une marche pareille. Elle avait plein de courbatures, mais elle était trop loin pour rentrer. Elle se remit en route.

En fin de matinée, elle s'arrêta, elle voyait des troncs dépasser de l'horizon. Elle pris une grande respiration et se dirigea vers eux. Quand elle fut arrivée, s'étendait devant elle la forêt Talaiala.

Si quelques dizaines d'arbres proches de la plage avaient survécus, il était aisé de distingué le chemin que Guerre avait pris, une large bande d'arbres morts, calcinés s'étendait vers l'est. L'hiver avait été rude, la nature n'avait pas encore eu de quoi se reconstruire. Après quelques instants, Trinity se retourna, elle avait encore de la marche à faire.


Même lorsque le clan de l'eau existait toujours, Trinity s'était très peu rendue à cet endroit, pourtant la falaise était un lieu époustouflant. L'escalade fut compliquée, ardue et même éprouvante. Trinity avait l'impression d'avoir ses pattes liées entre elle, compliquant l'ascension. Mais finalement, après mains efforts, Elle posa la patte au sommet, et observa, le souffle coupé, le paysage sous ses yeux.


Au loin, on distinguait très faiblement les hauteurs du chateau, savoir qu'elle le voyait l'angoissait, si elle voyait, on pouvait la voir. Mais être à une hauteur telle donnait la vue sous une autre perspective. De l'autre côté, elle voyait la forêt, sa bande calcinée, et les steppes un peu plus loin. Puis quand elle regardait à gauche, la mer, l'océan, qui se jetaient dans un monde inconnu. Que pouvait il y avoir là bas? Y avait-il seulement quelque chose d'autre?

Trinity s'approcha lentement du bord, précautionneusement, pour regarder en bas. Elle n'avait pas le vertige, elle observa les vagues se fracasser contre la falaise. Elle déglutit, elle pourrait se faire briser comme une brindille. Soudain, un grand fracas retentit. Elle se retourna en sursautant, pour voir un groupe de mouettes décoller. Ces oiseaux étaient bruyants, elle pris de longues respirations pour se calmer, ça n'avait été que des mouettes.

Mais alors qu'elle s'éloignait du bord et de la mer dont elle tournait le dos, elle sentit le sol sous ses pattes arrières s'effriter, et avant qu'elle n'aie pu se rendre compte de ce qu'il se passait, le sol sous Trinity s'effondra, et Trinity tomba dans le vide.


Le choc fut effroyablement violent. Si la roche sur laquelle elle se tenait était tombée dans l'eau avec un grand fracas, Trinity avait atterrit sur une sorte de promontoire, un appendice de pierre pointant vers la mer et dépassant de la falaise. Le bruit de la pierre tombant dans l'océan avait été si grand qu'il avait réduit à silence le bruit de ses os qui se cassaient. Une douleur atroce lui vrillait les pattes avant, elle ne sentait plus sa queue, elle était couchée sur le flanc.

Relevant douloureusement la tête, elle observa les alentours, l'appendice s'enfonçait dans la roche des deux côtés. Il n'y avait que deux moyens pour la louve de s'en sortir, remonter par le haut, ou tomber dans l'océan. Dans le second cas, sa survie était quasi nulle, dans le premier cas, elle ne pourrait pas monter à cause de ses pattes avant cassées.

Elle reposa la tête au sol, le sang lui vrillait les tympans, si personne ne l'avait vu tomber, elle devrait attendre que quelqu'un cherche à la retrouver, si quelqu'un aurait l'idée de la chercher. Pour une fois, elle se mit à espérer qu'on se soit inquiété de son sort dès le deuxième jour après son départ. Seule sur son rocher, elle ferma les yeux et attendit. En dessous d'elle, la mer léchait la roche, engloutissant tout sur son passage.

Après ce qui lui semblait être une éternité, elle entendit des pas sur la roche au dessus d'elle. Elle leva les yeux, son souffle était court et elle avait du mal à respirer. Quelques instants plus tard, une tête surgit par dessus la falaise. Elle était touffue et était plus canine que lupine. Trinity reconnu Léone, la bêta issue de la terre. La bêta en personne était venue ici, était-ce du simple hasard ou l'akita avait décidé de partir à sa recherche elle même?


Trinity avait sans doute déjà subit les affres d'un alpha, mais ceux là elles les avait mérités, la bêta au dessus d'elle ne lui faisait pas peur, elle avait confiance, elles étaient du même clan. Léone la héla, les oreilles de Trinity se dressèrent mais la louve ne bougeait pas, ayant trop mal pour s'en sentir capable.


C'était les infos de base, dis sur son ton neutre. Elle ne se sentait pas le besoin de préciser quelle patte était évoquée, vu l'angle peu anodin que prenait son antérieure gauche. De plus, parler lui faisait mal, elle avait sans doute eu un mauvais coup aux côtes. Si elle souffrait, seul sa respiration rapide trahissait de sa douleur. Elle voulu essayer de se lever à nouveau mais évita. Elle ignorait à quel point la roche qui supportait son poids était friable, un geste pouvait la déstabiliser et faire tomber le maigre plateau sur lequel elle se trouvait, et Trinity n'avait pas envie de mourir aujourd'hui.

Elle regarda la bêta, comment comptait elle aider Trinity?

Trinity hocha la tête, Léone devait s'absenter pour trouver quelque chose. Jusque là rien de compliqué, Trinity attendrait ici et Léone reviendrai. La tête de l'akita disparu et Trinity se retrouva seule. Ce n'était pas dérangeant, ça ne faisait rien à Trinity d'être seule, seulement le sol sous elle pouvait se casser n'importe quand.

L'attente fut très longue, Trinity se déshydratait, elle n'avait pas bu depuis trop longtemps et elle n'avait pas pensé à emmener de quoi boire après l’ascension. Elle ouvrit la gueule pour y laisser pendre sa langue, elle avait si soif... La douleur était supportable au début, mais elle l'était de moins en moins. Elle commença à voir des points noirs devant ses yeux. Si elle ne sentait de sa patte endommagée que la douleur, elle commençait à ne plus sentir les autres. Sa respiration s'accéléra, elle se surpris à prier que Léone revienne vite.


Au bout d'un moment sans doute trop long, elle entendit Léone aboyer, elle rouvrit difficilement les yeux. Elle regarda au dessus d'elle juste assez tôt pour voir les lianes tomber. Elles étaient lourdes et leur atterrissage sur les flancs de la louve lui arrachèrent une grimace de douleur. Une grimace de douleur à la Trinity. Malgré les lianes que Léone tenait dans la gueule, Trinity compris ce qu'elle devait faire. Elle agita les oreilles pour lui dire OK. Bouger son corps allait être dur au vu des vertiges qu'elle ressentait déjà.

Elle bougea lentement les pattes arrières, décidant de soulever son corps le moins possible. Elle ne les sentait plus et il était difficile pour elle de savoir si elle tenait la liane ou pas, elle leva lentement la tête pour se diriger à la vue. Grâce à ça, elle pu glisser la boucle sous ses pattes, il ne manquait plus qu'à resserrer la boucle pour qu'elle se serre autour de ses talons.

Elle prit la seconde boucle dans ses crocs et d'un mouvement de tête la jeta sur ses pattes avant. Elle ne pourrait pas faire en sorte que ce soit ses pattes qui soient coincées dans la boucle. Sa patte cassée lui ferai trop mal et laisser tout le poids de son corps reposer dessus risquait d'aggraver les choses. De sa patte valide, elle passa la boucle sous sa seconde patte, et ne pu retenir un gémissement de douleur en soulevant cette dernière.

Elle entendit alors des bruits en haut, des paroles, quelqu'un parlait à Léone mais Trinity ne pu reconnaitre la voix. Elle se figea et ne bougea plus. Le bruit de sa chute avait peut être attiré des loups? L'aboyement de Léone aussi? Si elle ne reconnaissait pas la voix, cela pouvait être n'importe qui, un loup du clan, un solitaire, ou pire. Rapidement, elle logea la seconde boucle derrière le creux de ses coudes, juste derrière les épaules. L'effort à déployer fut si intense que quand elle reposa la tête au sol, elle ne voyait plus que flou tant les vertiges l'assaillaient. Elle espérait que la bêta soit assez forte pour la tirer de là. Trinity se savait légère, mais elle était si bas.


Elle regarda vers le haut, se concentrant du mieux qu'elle pu pour savoir ce qu'il s'y passait, les bribes de conversation lui venant n'étaient pas déchiffrables.

Trinity était inquiète, elle avait peur. Elle voulait savoir ce qu'il se passait en haut, elle aurait voulu voir à travers les yeux de Léone, mais elle ne pouvait pas, Léone était bêta, à l'autre bout de la hiérarchie, alors que Trinity était tout en bas. On n'entrait pas dans l'esprit d'un bêta. Et ignorant la nature de l'autre individu, elle ne pouvait se permettre de risquer le coup. Les lianes serrées autour de son corps, l'oméga ne pouvait qu'attendre. Si Léone s'engageait dans un combat alors Trinity serait perdue. Mais l'ancienne polyvalente savait qu'elle allait s'en sortir, Léone n'était pas bêta pour rien et elle avait confiance en elle. Pas une confiance absolue, certes, mais une confiance quand même. Si Trinity avait du mal à s'habituer à la fusion et à supporter les loups de la terre, il fallait reconnaitre que sa terre d'accueil n'était pas hostile. Peut-être que le sauvetage d'une louve issue de l'eau par une bêta issue de la terre calmerait les tensions, mais Trinity n'espérait rien, ce n'était pas son genre et de toute façon elle était une oméga.

Soudain, elle sentit les lianes se tirer. Sa respiration fut coupée tandis qu'elle était brutalement soulevée. Elle eut le sentiment d'être soulevée aussi rapidement qu'elle fus tombée. L'atterrissage tout aussi brutal fut si violent qu'elle ne pu s'empêcher de retenir un cri de douleur atroce. Heureusement, elle avait atterrit sous le bon angle et elle n'eut rien de cassé en plus de ce qui l'était déjà. Sans même avoir le temps de dire "ouf" elle se sentit tirée, loin du rebord meurtrier.

Léone s'éloigna d'elle et Trinity reconnu tout de suite l'inconnue à côté. Si elle ne lui avait jamais parlé, voir Odine la soulagea, une vague déferla dans son corps, retirant tout reste de stress. Elle connaissait Odine des récits, parfois la louve verte passait au clan. Trinity se laissa choir, sans aucune force pour se mouvoir. Elle voulait remercier Léone de l'avoir tiré de ce mauvais pas, mais la bêta était occupée. Si Trinity avait bien compris en arrivant, Léone n'était pas née ici, elle n'avait pas grandis ici, elle ne connaissait donc pas Odine et sa réaction était alors parfaitement logique.

Trinity sentit alors d'un coup les répercutions de la chute, et puis de son atterrissage. Si elle avait atterrit dans un bon angle, la violence du choc avait aggravé son cas, elle avait sans doute une commotion. Elle ne sentait plus son corps, elle voyait trouble et elle avait si soif, pourtant sa respiration avait ralentie, un peu trop sans doute. La migraine s'amplifia, elle dut fermer les yeux pour ne pas la subir trop fort.

Les yeux fermés, elle se sentit alors très légère. Les voix des autres près d'elle semblaient lointaines, irréelles, alors que sa respiration restait rapide et affolée, elle sentait son coeur lentement se calmer, se détendre. Elle avait chaud, et froid en même temps. Elle sentit quelque chose de doux sur on flanc et une chaleur rassurante l'envahit. Trinity poussa inconsciemment un long soupir, sa respiration se calma. Sa migraine disparu lentement mais elle n'osait pas rouvrir les yeux. Respirer ne lui faisait plus mal, seule sa patte l'élançait encore.

Elle entendit quelque chose murmurer à ses oreilles, une douce voix chaleureuse. Le bruit de ses oreilles se calmait, elle n'entendait plus son sang battre ses tempes, mais la voix était tout aussi lointaine que les précédentes, son corps semblait si léger, elle n'avait plus mal qu'à la patte mais lentement elle se sentait partir.

Mais soudain, elle sentit un éclair dans sa patte, comme si on voulait arracher son membre. Elle sursauta, ouvrant brusquement les yeux et les gardant écarquillés, fixés devant elle, dans le vide. Si elle ne se contrôlait pas si bien, elle aurait hurlé à s'en casser là voix, mais seuls ses yeux trahissaient la douleur atroce qu'elle ressentait à ce moment là. Et si elle se taisait, elle hurlait dans sa tête, en silence.

Lentement la douleur s'atténua à son tour, pour finir après un temps à être beaucoup moins gênante qu'au début. Elle leva les yeux vers la louve verte. Elle voyait des points noirs, beaucoup de point noirs, elle n'avait pas de migraine, mais la soif lui procurait des vertiges affreux. Elle ouvrit la gueule et voulu murmurer un merci, mais un son rauque proche du râle en sortit à la place. Elle ferma les yeux avant de les rouvrir en regardant face à elle.

Du coin de l'oeil, elle vit Léone partir. Essoufflée, elle ne la quitta pas des yeux jusqu'à ce que cette dernière disparaisse derrière la roche. Elle sentait cette chaleur douce continuellement en elle, et des douleurs si présentes en elle, au point où elle s'était habituée à leur présence, disparurent. Elle se sentait alors si légère. Un bruissement se fit entendre et elle tourna les yeux ainsi que les oreilles vers Odine, la fixant.


Trinity la regarda, sans bouger, sans rien dire. Plongée dans les yeux de l'envoyée des dieux, Trinity se sentait mise à nue, elle sentait ses barrières mentales s'effondrer comme du sable, ces barrières solides depuis des années, grandes et fortes, s'effondrant comme des feuilles mortes sous le vent léger du matin.

Ses yeux s'embuèrent, son museau se retroussa. Elle n'avait qu'une vie, elle devait en prendre soin, mais quelle vie? Elle avait en une vie apporté l'honneur sur sa famille, et avait réduit en miette ce même honneur, en une vie elle avait perdu sa dignité, elle avait été défigurée. Elle sentit un liquide couler sur ses joues. C'était salé, c'était âcre, ses yeux piquaient atrocement. Elle les ferma, serrant les paupières, baissant la tête, elle ne dit rien.

Elle entendit des pas de revenir et ouvrit lentement les yeux rouges au son de l'eau qui clapotait. Elle regarda Léone porter une écorce pleine d'eau. Trinity était toujours couchée, elle n'avait plus mal, tout était engourdit. Pleurer avait encore plus asséché sa gorge, pourtant Trinity continuait de pleurer. C'était la seconde fois. La première fois qu'elle avait pleuré, c'était quand Trinity était devenue Oméga. Elle n'aimait pas pleurer, c'était douloureux, c'était salé, c'était humiliant.

Léone posa le récipient devant la truffe de Trinity, cette dernière leva des yeux humides, les joues trempées, pleins de reconnaissances vers la bêta. Mise à nue par Odine, elle n'arrivait plus à se retenir, mais elle devait retrouver cet air si familier, cette armure, avant qu'elle ne retourne au camp.

Elle roula sur elle même d'un quart, pour se retrouver sur le ventre. Elle posa ses pattes de sorte qu'elle se stabilise. La patte auparavant brisée était engourdie, Trinity ne la sentait pas, mais elle savait la bouger, elle ne tarderait certainement pas à retrouver ses sens. Mais quand elle voulu se hisser pour arriver à l'écorce, elle eut un vertige. Elle s'arrêta quelques secondes, se concentrant sur son objectif. Puis quand ce fut passer, elle passa le museau dans l'eau, et but allègrement tout son contenu.

C'était précieux, elle sentait l'eau couler dans sa gorge, cela faisait tant de bien. Quand tout fut bu, Elle s'assit, lentement, prenant garde à ne pas perdre l'équilibre, regardant, abasourdie, sa patte qui s'était brisée. Cependant elle ne s'appuyait pas dessus malgré qu'elle soit posée au sol. Elle gardait la tête basse et regardait les deux louves en face d'elle.


Sa voix était rauque, basse, mais c'était compréhensible et bien mieux prononcé que son premier essai. Elle fixa le sol.

Lentement, l'oméga vit sa bêta se rapprocher, et de s'assoir près d'elle. Pas douée pour un sous pour le contact qu'elle était, Trinity ne saisit pas tout de suite la signification du geste de la bêta. Mais Trinity ne dit rien, regardant l'Akita, tentant de décrypter. Keiss lui disait tant de mal des loups de la terre, et pourtant là c'était un tableau de douceur et d'entraide que leur bêta lui dressait. Trinity était lucide, elle savait que la bêta n'utilisait pas cet instant pour parfaire son image.

Au lieu de ça, elle vit de la compassion dans le regard de l'akita, de la douceur dans ses gestes, Trinity sentit une sensation étrange au plus profond d'elle, Elle renifla, hochant la tête, ne pouvant retenir mieux que ça ses larmes de couler. Elle entendit la solitaire, elle parlait doucement, elle aussi. Alors Trinity s'en voulu de monopoliser autant de mondes. Odine pouvait aller devant, sauver d'autres vies, au lieu de ça elle s'occupait de l'oméga. Léone avait certainement une masse d'affaires à régler dans ce clan, au lieu de ça elle s'occupait de l'oméga. Un poids écrasant l'étouffa, le poids de la culpabilité.

Elle se leva lentement, sa patte douloureuse supportait le geste mais pour ne pas tenter le diable elle ne s'appuya pas plus dessus.


Odine disait devoir s'entretenir avec les alphas, elle n'avait pas de temps à perdre avec une oméga blessée. Et avec une invitée pareille dans le clan, Léone enverrait une bien meilleure image d'elle en rentrant avec elle, plutôt qu'avec l'oméga. Souvent, aider les plus faibles provoquait le plus de moqueries. Elle ne voulait pas qu'on s'en prenne à l'akita, juste parce qu'elle avait été stupide.

Trinity garda son regard bas, en signe de soumission, mais répondit à Léone par un hochement de tête. Elle ordonnait, l'oméga exécutait. D'un autre côté, Trinity ne se voyait pas rentrer seule sans que ça ne lui prenne plusieurs jours, et le fait qu'elle se retrouve à nouveau seule en cas de danger, avec sa patte porteuse en mauvais état, était un paramètre inacceptable. Tout compte fait la proposition de Léone était somme-toute salvatrice. Trinity appréciait de plus en plus la bêta, mettant de côté tout ce que Keiss lui avait dis et raconté sur les loups de la terre.


Odine s'approcha d'elle pour lui parler, Trinity secoua la tête.


Toujours debout, elle fit un pas en avant pour appuyer ses dires. Elle reviendrait probablement à la falaise, elle aimait cet endroit et s'était souvent tenue là où la roche s'était effondrée, mais la prochaine fois, elle ne viendrait pas seule. Elle pensa à Fuurin, la jeune messagère n'était peut être jamais venue ici, Trinity devrait lui poser la question. Si on omettait la fraicheur mordante et le vent qui pouvait parfois siffler trop fort, l'endroit était beau.

Elle fit un nouveau pas, évitant de poser sa patte trop longtemps au sol, et ainsi inévitablement, boitait. Le chemin était abrupte et pentu, elle devait faire attention à poser sa patte en des endroits qui pouvaient stabiliser son passage, mais les pierres roulaient et Trinity trébucha plusieurs fois. Cependant si elle perdait souvent l'équilibre, elle ne tombait jamais et arrivait rapidement à reprendre la route. La descente était le plus compliqué, après il n'y aurait que la plage, un terrain somme toute assez plat, avec le sable pour amortir le poids sur sa patte.

Elle lança un regard vers les deux femelles, elle avait repris un peu d'assurance, mais quand elle serait rentrée, elle savait qu'elle dormirait probablement pendant plusieurs jours. Au moins elle aurait marché, on pourrait presque oublier qu'elle était partie pour ça... Si Trinity n'était pas friande de compagnie, savoir qu'elle avait une bêta mastodonte à ses côté ainsi qu'une guérisseuse la rassurait, elle dégageait un peu plus de confiance et d'assurance, surtout en elle. Le trajet serait des plus facile avec elles.