Trinity allait étrangement beaucoup mieux depuis qu'elle avait vu Keiss. Les médecins avaient été abasourdis et avaient décidé d'arrêter sa rééducation, en effet, Trinity n'avait plus aucune difficulté à marcher bien que sa démarche était encore saccadée et qu'elle aie toujours moins d'endurance qu'auparavant.

Etant ce qu'elle était , elle cherchait une réponse rationnelle à ce phénomène, et le seul qu'elle avait trouvé était l'effet d'un potentiel pouvoir, mais elle se refusait d'approcher son ami de nouveau pour lui poser la question, au risque qu'il absorbe le peu de mal qui restait à l'oméga.

Les médecins avaient exigés d'elle qu'elle passe régulièrement à leurs tanières, histoire de voir si cet effet miraculeux était définitif ou provisoire. Car si c'était provisoire, ils ignoraient encore à quel point et dans quel état se retrouverait à nouveau la louve si elle récupérait toute sa douleur et son incapacité. Mais pour l'instant, c'était assez prometteur. Les médecins avaient exigés qu'elle reprenne un entrainement léger pour refaçonner ses muscles, et comme elle n'avait pas le droit de participer aux entrainements des escadrons, elle s'entrainait seule ou avec les médecins parfois.

Elle revenait d'un de ces entrainements éreintant, pleine de courbatures et fatiguée, se dirigeant vers les chutes pour se laver, quand elle fut appelée.

Ses oreilles se redressèrent et elle se retourna vers son amie, qui se trouvait être dans un état déplorable. Fuurin faisait partie du peu d'ami qu'elle avait, et parmi les meilleures, mais c'était Trinity, elle n'avait pas passé du temps avec la messagère depuis leur arrivée ici.

Certes, Fuurin venait l'aider, souvent d'ailleurs, mais alors quand elles se voyaient c'était pour autre chose que juste pour se voir. Fuurin prenait soin de Trinity quand cette dernière était au plus mal, c'était à son tour maintenant.



Elle semblait faiblarde, elle tremblait et en plus son ventre grognait, pourquoi ne mangeait elle pas si elle avait faim? C'était pourtant simple, de manger.

Elle sourit de manière gênée et Trinity s'assit près d'elle, indifférente. Fuurin se balança et tomba ensuite, Trinity ne bougea pas. Elle était déjà tombée, pourquoi bougerait elle? maintenant que son amie était affalée au sol au moins, elle ne pourrait plus tomber. Puis elle leva un sourcil face à l'explication de Fuurin. Elle avait peine à y croire, rationnelle comme elle était, mais pourquoi Fuurin la contredirait elle? Tinity la regarda.


Fut sa seule réponse face à l'explication désespérée de son amie. Elle la regarda, suspiscieuse, lécher le sol alors qu'un médecin la réprimandait. Si elle ne pouvait plus manger de viande, avait ell déjà essayé les fruits? c'était peu nourrissant mais au moins, ce n'était pas viandu. Trinity ne dit rien, elle n'était pas médecin, ce n'était pas son taf de la soigner. Toutefois elle ne pu s'empêcher à la manière dont fuurin avait pris soin d'elle, quand c'était elle qui était terrassée et malade. Elle écouta à nouveau le récit de la messagère et son sourcils se leva d'autant plus alors qu'un "tsk" s'échappait de sa gorge. Ce loup indien n'était même pas capable de protéger son amie. Il y avait une règle d'or, quand on voyait quelque chose d'inconnu et qu'on ne pouvait éloigner, c'était de s'enfuir. Elle secoua la tête, imprimant bien les avertissements de son amie.

Alors elle se leva, laissant Fuurin seule, sans explication, et quitta la tanière. Elle revint quelques temps plus tard, elle ne sut dire quand. Elle avait trouvé un pommier et tenait entre ses crocs le fruit délicat. Les loups étaient carnivores, ils ne mangeaient pas de fruits ou en tout cas pas exclusivement. Mais quitte à manger autre chose que ce qu'il fallait d'habitude, un fruit était un paramètre acceptable comparé aux roches et au sable. Elle déposa le fruit juteux et sucré devant la truffe de Fuurin, et pencha la tête pour voir si ça, elle allait le manger.

Fuurin sembla perplexe, Trinity ne pouvait pas lui en vouloir. Mais elle avait intérêt à manger cette foutu pomme! La messagère malade se leva et gouta le fruit, elle ne semblait pas particulièrement conquise par le gout, mais rapidement elle reprit un bout, puis mangea la pomme entière. Bien. Trinity lança un regard au médecin.


Fuurin se ralongea, elle avait tout mangé et pour l'instant ne renvoyait rien par la porte d'entrée. C'était probablement bon signe, Trinity n'en savait rien, elle n'était pas médecin. Elle hocha la tête, satisfaite. Fuurin la remercia. Pourquoi? Trinity n'avait rien fait d'extraordinaire. Elle avait aidé son amie quand elle en avait besoin comme quand Fuurin l'avait aidé quand elle en avait besoin. C'était normal d'aider, pourquoi remercier. Trinity pencha la tête mais ne dit rien. Elle devait maintenant surveiller son amie. Elle s'allongea à côté de Fuurin et posa sa tête sur ses pattes en regardant la messagère. Elle ne disait pas grand chose, mais elle était bien déterminée à faire en sorte que son amie aille mieux. De toute façon l'oméga ne pouvait plus assister aux entrainements à cause de son statut, autant occuper ses journées.

Trinity était restée allongée et n'avait pas quitté son amie du regard. Lorsque cette dernière tomba dans le sommeil, elle jeta un regard au médecin qui lui lança une besace. Trinity s'en alla donc récolter quelques pommes en plus, pour les rapporter. Elle n'était pas pro en matière de fruits mais elle savait qu'en hiver peu de fruits poussaient, elle avait déjà eu de la chance de trouver un pommier avec des pommes encore en relativement bon état, il ne fallait pas les gâcher.

Mais alors qu'elle revenait de sa récolte, la besace lourde et remplie d'une dizaine de pommes, elle vit Fuurin sortir de la tanière du médecin en courant, suivit par le médecin en furie qui s'égosillait pour l'appeler. Trinity pesta, jeta la besace dans sa tanière et se mit à la poursuite de la louve.

Elle ne courrait pas bien, séquelles de ses blessures, et elle était trop loin pour entrer dans l'esprit de Fuurin et la faire s'arrêter, elle jura et continua à courir, rapidement essoufflée. Il lui fallait juste rattraper un peu, il ne lui fallait que dix metres pour activer son hacking, juste dix mètres...

Elle profita d'un promontoire pour sauter, rapidement elle rattrapa son retard, et quand elle sentit l'esprit de Fuurin près du sien, elle ne perdit pas une seconde. Activer son pouvoir en pleine course était toujours dangereux pour elle. Alors qu'elle se sentait pénetrer dans l'esprit de la louve messagère, elle vit comme à la troisième personne, son corps tomber et faire plusieurs roulades avant de s'arrêter. Les possessions paralysaient toujours le possédé. Même si elle ne le voyait pas très bien, elle savait que Fuurin s'était arrêtée.

S'introduire dans l'esprit d'un autre c'était quelque chose de mal, une violation de sa vie privée, elle se concentra du mieux qu'elle pu pour que cela paraisse agréable à Fuurin. Elle voyait par les yeux de la messagère le médecin qui rappliquait, il ne comprenait rien. Trinity se mit à parler à Fuurin dans sa tête.


Elle ne pu pas tenir plus longtemps, elle lâcha Fuurin et réintégra son corps, sentant immédiatement les éraflures que sa chute avait causées sur ses cicatrices. Elle grogna en se relevant, secouant la tête, lançant un regard noir à quelques regards trop curieux. Elle s'avança lentement vers Fuurin, penchant la tête, avait elle compris?

Fuurin s'était arrêté, Trinity avait réintégré son corps et s'était ébroué. Les égratignures étaient certes assez grandes, elles étaient très peu profondes et n'avaient rien d'inquiétant. La louve ne s'en préoccupa pas, on ne verrai plus rien demain. Elle vit Fuurin la regarder avec des grands yeux avant que le médecin ne l'interpelle.

L'oméga ne s'occupa pas de savoir si le doc se préoccupait d'elle, la priorité c'était de ramener Fuurin et de s'assurer qu'elle y soit en sécurité. Le médecin repris le chemin de sa tanière tout en guidant Fuurin, Trinity referma la marche en regardant Fuurin.


Elle ne répondait pas à sa question car elle jugeait la réponse évidente. Elle suivi les médecins jusqu'à la tanière, puis s'assit devant, Fuurin n'avait pas intérêt à s'échapper de nouveau, sinon Trinity ne se contenterait pas de simplement lui parler mentalement. Elle leva la patte pour lui désigner le sac de pommes.


Les médecins ne pouvaient pas s'absenter pour cueillir de bêtes pommes, ils avaient autre chose à faire, ce qui n'était pas le cas de Trinity qui elle, n'avait rien à faire.

Trinity hocha la tête, Fuurin n'avait pas besoin de s'excuser. Elle était malade, on ne se contrôlait plus quand on était dans un état pareil. Elle regarda la messagère croquer la pomme, elle semblait moins aimer ça.



Puis elle se leva et trotta vers le médecin. Elle lui chuchota quelques mots, le médecin ne sembla pas d'accord, Trinity continua de chuchoter et après quelques minutes, il opina. Trinity acquiesça à son tour. Pendant toute la discussion, elle jetait de petits regards furtifs à Fuurin pour voir si elle allait bien.

Elle se retourna et choppa la besace avant de l'enfiler, et elle jeta un regard à Fuurin.


Elle trottina vers l'extérieur, tendant l'oreille pour savoir si Fuurin la suivait. Elle n'avait pas besoin d'être constamment chez le médecin, juste d'être surveillée. Etre dans un endroit si antipersonnel flanquait un coup au moral, Trinity savait ce que ça faisait. Elle se rendrait chez le médecin chercher les antidouleurs les moments où Fuurin dormait, entretemps il restait des pommes.

Trinity continua d'avancer sans se retourner. Ses oreilles tenues vers l'arrière lui confirmèrent que Fuurin se levait, en même temps Trinity ne pouvait pas la blâmer, tout était mieux que cet endroit. L'oméga sentit le petit coup de truffe de Fuurin, elle ne dit rien, espérant juste que son mal n'était pas contagieux bien qu'elle en doutait au vu du peu d'isolation qu'elle avait avec le reste du clan. Déjà que Trinity n'était pas bien crédible en oméga, si elle se mettait à bouffer du gravier...

Trinity avait sa tanière dans les galeries. Malgré que son statut d'oméga ne lui avait autorisé à prendre sa tanière qu'en dernière, il y avait encore nombre de tanières vides sous le camp. Celle que Trinity avait trouvé était pas mal, elle se tenait bas et descendait plus bas sous terre. Il fallait parcourir un petit tunnel de deux ou trois mètres s'enfonçant dans le sol. Cependant, comme toutes les autres tanières du camp, la sienne était éclairée par de légers sillons dans le sol, provoquant des jeux de lumière intéressants sur les murs. Si ces sillons ouvraient sur l'extérieur, les larges branchage de l'immense arbre protégeant les galeries empêchait l'eau d'y rentrer pendant les pluies.Si sa tanière était reculée et n'attirait personne, elle était belle, et pas mal spacieuse, bien qu'à deux on pouvait commencer à s'y sentir à l'étroit.

Elle conduisit donc Fuurin devant l'arbre, puis la regarda, lui indiquant qu'elle comptait entrer dans les galeries. Si l'eau vivait ici depuis quelques mois, cet aspect du camp pouvait paraitre assez étrange, Trinity ignorait où était la tanière de Fuurin.

Elle se glissa souplement entre les racines, chose qu'elle n'aurait pas pu faire quelques semaines auparavant, avant sa guérison miraculeuse. Puis elle passa la tête et enfin le corps dans le trou de l'arbre millénaire. Après quelques minutes supplémentaires de marche, elle arriva au tunnel étroit qui donnait sur sa tanière. Elle laissa passer Fuurin devant elle avant de s'y engager à son tour.

Dans le fond, il y avait de la fourrure épaisse posée sur un épais tas de feuilles et d'herbe sèche, il avait fallu beaucoup de temps à Trinity pour le composer, quand elle avait pu avoir sa tanière elle y allait petit à petit, à vrai dire elle n'avait pu le finir qu'à sa guérison. L'épaisseur des végétaux procurait un certain confort qui aidait la louve à calmer ses douleurs articulaires encore présentes. De plus la douceur de la fourrure était agréable sur sa peau dénudée. La fourrure était aussi isolante, elle montait sur la roche tout autour, Trinity l'avait fixé avec des os. Ce petit coin dans la tanière était vraiment agréable pour y dormir.

Alors Trinity s'avança vers la couche et posa sa besace pleine de pommes à côté, puis elle regarda Fuurin.



De l'autre côté , à l'opposé de la couche, Trinity avait creusé une petite cavité où elle avait remarqué que l'eau coulait malgré les protections de l'arbre. Comme ça elle y récoltait le peu d'eau qui y tombait, c'était suffisant pour qu'elle boive sans devoir reparcourir tout le trajet des galeries, sans pour autant inonder la tanière car l'eau qui y tombait n'était pas abondante. Pour une louve qui n'aimait pas forcément la compagnie, ne pas devoir sortir à cause de la soif était important. Elle montra la cavité à Fuurin.


Puis elle s'allongea sur la pierre, proche du tunnel, histoire de prévenir une nouvelle crise. Elle s'étira alors, grimaçant sous les courbatures et les égratignures qui tiraient sa peau fragile.

Couchée, elle regardait Fuurin du coin de l'oeil. Elle hocha la tête aux remerciements de la louve malade, être un faux ami ça n'avait pas de sens, Trinity devait à Fuurin toute l'aide qu'elle lui avait apporté.

Finalement, la petite louve grise s'endormit. Trinity leva la tête, l'observant, la surveillant. Elle jeta un oeil rapide au sac qui était plein à craquer. Tant mieux, l'oméga ne devrait pas retourner chercher de quoi manger pour la louve de si tôt. Mais une chose était sûre, si la louve grise et noire avait faim, elle devait éviter de manger sa viande devant la messagère au risque de réveiller de nouvelles crises.

Elle se retourna pour faire peser son corps sur l'autre côté, mais quoi qu'elle fasse elle savait qu'elle ne dormirait pas comme il faut. Elle le savait déjà en emmenant Fuurin chez elle, mais Trinity était en bonne santé, elle pouvait se le permettre.

Après une bonne heure, étant sûre que la louve grise dormait bien, Trinity se leva lentement, douloureusement, et sorti pour manger. Toute cette journée épuisante lui avait creusé l'estomac. Heureusement, elle pourrait à présent refuser ce qu'on lui demanderai de faire, tant qu'elle abritait la louve malade. Ainsi l'oméga pourrait aussi se reposer, bien qu'elle ne doive rester coucher sur le sol rocailleux de sa tanière.