Lagherta

Rattraper le temps perdu

La fusion était à présent belle et bien là. Hier, dans la journée, le clan de l'eau avait débarqué au camp de celui de la Terre, désormais, nous ne formerions plus qu'une seule meute. Le voyage avait été long et éprouvant, surtout pour certains loups pas encore totalement remis de leur blessures après le passage de Guerre. Après l'annonce de la fusion, l'interdiction de sortie des souterrains avait été levée, mais le camp restait basé sous terre, notre ancien camp avait été dévasté de façon irrécupérable par les flammes. J'avais intégré l'escadron de Valkaa, devenant véritablement une guerrière de la meute, cette fois. Keiss avait totalement récupéré, il avait lui aussi intégré l'escadron de Valkaa. Alors qu'il allait de mieux en mieux, de façon progressive, il s'était opéré une séparation entre nous. Alors qu'il devenait de plus en plus autonome en récupérant de son état, nous nous étions quelqu peu éloigné, de façon naturelle. Puis, lorsqu'il avait été de nouveau totalement autonome, j'avais pris ma propre tanière et lui la sienne. Nous nous voyions encore souvent, même en dehors des entraînements. Nous étions devenus très proches, des amis. Des confidents l'un pour l'autre. J'aimais cette relation qui s'était construite entre nous, mais il me manquait beaucoup... Plus que ce qu'il devrait alors que nous étions amis. J'avais constaté, il y a quelques semaines, à me dire que je ne ressentais pas que de l'amitié pour lui, qu'il y avait plus que cela. Puis, au fil des semaines, la vérité s'était offerte à moi, j'étais tombée amoureuse de ce loup si torturé... Je l'aimais... Mais je n'avais osé lui en parler. Ressentait-il la même chose ? Serait-il seulement capable de s'autoriser à aimer de nouveau après ce par quoi il était passé durant toute sa vie. Tous les loups qu'il avait aimé, qui lui avait été proche, il les avaient vu mourir... Je me doutais qu'une peur que cela se produise également avec moi, s'il s'autorisait à m'aimer devait le tarauder... Alors, tant que je n'étais pas certaine de mes sentiments à son égard, j'avais décidé de ne pas aborder ce sujet-là. J'avais également peur que si mes sentiments n'étaient pas réciproque, notre relation changerait, pour se détériorer probablement, et c'est tout ce que je ne voulais pas... Trinity allait beaucoup mieux elle aussi, mais elle n'était pas encore totalement rétablie, elle boitait encore.

Lors de l'arrivée de l'ancienne meute de l'Eau au sein du camp de la Terre, j'avais décidé de me prendre une tanière rapidement. Je n'étais pas restée bien longtemps parmi la foule, préférant la solitude et le repos après un si long voyage. J'avais décidé de prendre une tanière un peu à l'extérieur du camp, sans pour autant trop m'en éloigner. Ces terres étaient désormais les miennes, mais je ne les connaissais pas encore, il faudrait que je m'accorde un peu de temps pour visiter. D'ailleurs, ce matin, en le levant, je fus prise d'une envie d'aller voir le terrain d'entraînement. Bien évidemment, il y avait eu des remaniements dans les escadrons, histoire de mélanger les deux clans, qui n'en formaient plus qu'un à présent. J'avais été contente d'apprendre que je restais sous les ordres de Valkaa et que Keiss demeurrait dans le même escadron que moi.

Pour une fois, je m'étais accordé le loisir de faire une grasse matinée. J'avais bien dormi, ce qui se faisait rare depuis l'attaque de Guerre... Lorsque je me levais enfin, le soleil était déjà haut dans le ciel. Je me rendis à la réserve pour casser un peu la croûte puis je décidais d'aller visiter un peu les terres qui étaient désormais les miennes... Je laissais mes pas me guider au gré de leur envie, ne me fixant pas de destination précise. Après avoir traversé les plantes mouvantes qui protègeraient le camp des intrusions non désirées, je débouchais sur les rives d'un petit fleuve. Je m'approchais de l'eau, et constatait avec surprise qu'elle était rouge. Cette couleur me surpris un peu, et bien que j'avais soif, je choisis de m'abstenir de la boire. A la place, je décidais de profiter de cette journée de repos pour m'allonger au bord de l'eau et laisser le temps passé, tranquillement, à ne rien faire. Il y avait des mois que je n'avais pas eu une journée à ne rien faire. Cela me ferait le plus grand bien. Je laissais tremper mes pattes arrières dans l'eau et posant la tête sur mes pattes avant, je regardais mon reflet dans l'eau rougeoyante un moment, avant de finalement fermé les yeux pour somnoler un peu, restant tout de même sur le qui-vive. Je songeais à Keiss, à ce que je ressentais pour lui, tentant de faire le point. Il faudrait aussi que je me mêle un peu aux anciens loups de la terre, histoire de faire leur connaissance. Mais pas aujourd'hui. Aujourd'hui, je restais tranquille, profitant pleinement de ma journée de libre pour me reposer, quelque chose que je n'avais pas pu faire depuis une éternité, me semblait-il.

Je ne saurais dire depuis combien de temps je somnolais au bord de l'eau lorsque j'entendis les pas d'un loup s'approchant. Mes sens en éveil, je ne bougeais pas, dans un premier temps, attendant de voir la suite. Puis l'odeur de nouveau venu me parvint à la truffe et après un temps de latence, je bondis. Cette odeur, je pourrais la reconnaître entre mille. Jamais je ne pourrais l'oublier, elle était gravée dans ma mémoire à jamais. Certes, il y avait quelques nuances nouvelles qui s'y mêlait, telle que l'odeur des loups de la terre, mais le fond n'avait pas changé. Je bondis sur mes pattes en exerçant un demi-tour en même temps, incapable d'y croire sans le voir de mes propres yeux. Et ma truffe ne m'avait pas trompée. Il était bel et bien là, devant moi, bien vivant et à voir, parfaitement bien portant. Il était devenu un montagne de muscle, mais je voyais encore le petit louveteau qui avait préféré abandonné la vie, plutôt que de la passé ainsi traité par ses propres parents.



c'est le seul mot qui sorti de ma gueule avant que mon coeur ne prenne le contrôle de mes pattes pour me jeter sur lui, trop heureuse qu'il soit vivant, finalement et de le revoir. Pas un jour n'avait passé sans que je pense à lui depuis sa "mort"... Toute rationalité m'avait abandonné, je n'étais plus capable de penser à rien d'autre que... Mon frère est vivant !

Lagherta

Rattraper le temps perdu

Il y eut un léger temps de latence qui ne dura pas, durant lequel j’entendis, presque comme un chuchotement le son étant atténué par la distance, sa voix devenue celle d’un mâle adulte :



Sa voix était devenue grave, mais à cet instant, dans ces circonstances, elle était la plus douce des mélodies à mes oreilles. Mon cœur bondit, tout autant que mes pattes et je me précipitais vers lui, mes pattes avalant la distance qui nous séparait comme si elle n'existait pas, tant la joie de le revoir était incontrôlable. Je ne pouvais pas y croire, il était vivant, bel et bien là. Il s’en était sortit finalement, et vu la montagne de muscles qu’il était devenu, il s’en était même très bien sorti. Je bondis sur lui et nous roulâmes tout deux au sol. Il ne broncha pas sous l’impact et lorsque enfin notre roulade cessa, je me retrouvais au dessus de lui, qui était allongé dos au sol. Des larmes coulaient sur ses joues, tout comme sur les miennes. Je léchais ses larmes frénétiquement. Alors qu’il me serrait entre ses pattes, je me blottis contre lui, nichant ma tête dans son cou et respirant son odeur à pleine truffe, comme si je ne réalisais toujours pas. Mes larmes des joie continuaient de couler, j’étais si heureuse qu’il ne soit pas mort et qu’il aille bien. Je ne parvenais plus à réfléchir et mes paroles s’enchaînèrent à un rythme hallucinant.



Je nous fit rouler sur le coté, puis me relevais, cette position était très certainement pas très agréable pour lui, même si la joie semblait le submergé autant que moi. Je m’allongeais à coté de lui, me collant contre sa fourrure chaude, refusant de rompre ce contact qui m’avait manqué tous les jours depuis son départ. Puis mon flot intarissable de paroles reprit sans que je ne puisse me contrôler.



Je lui souris franchement en pensant que je l’avais appelé petit frère, alors qu’il était désormais bien plus grand que moi, et qu’il était aussi bien plus musclé et donc lourd. Mais je restais la première née et donc sa grande sœur. Je me remis à lécher son visage, je ne pouvais m’en empêcher. Plus jamais je ne laisserais la vie nous séparer. Le pauvre, je lui posais tant de question et je ne lui laissais même pas le temps de répondre avant d’en posé de nouvelles. Mais j’étais absolument incapable de me contrôler. Ma queue battait l’air avec une énergie jamais ressentie jusqu’alors. Me forçant à le laisser parler, j’enfouis ma tête dans la fourrure de son cou et me tus enfin, profitant de sa chaleur, de ce contact, de son odeur, de sa présence. Bref, je retrouvais mon frère !

Lagherta

Rattraper le temps perdu

La joie de retrouver mon frère me submergeai à un tel point que j'étais plus vraiment maîtresse de mes actes. Mon flot de paroles impressionnant en état la preuve d'ailleurs. Alors que je le léchais, et profitait de ce contact qui m'avait tant manqué, ses babines se relevèrent un instant. Cela ne m'échappa pas, et je me forçais à calmer légèrement mes ardeurs, néanmoins, il ne dit rien, et ne chercha pas à fuir. J'avais l'habitude des loups pas très tactiles, et pas très bavard, surtout grâce à Keiss, même, si avec moi, il avait fait de réels progrès, énorme même. Notre lien était devenu fort et robuste, mais surtout unique. Et je savais que mes sentiments pour lui avaient changés. Son amitié seule ne me suffisait plus, je voulais plus. Je l'aimais. Cette vérité m'avait percutée il y a seulement quelques semaines, mais je faisais avec. Pour le moment, je ne lui avais rien dis, de peur que mes sentiments ne soient pas réciproques et qu'il ne décide de mettre de la distance entre nous, c'était tout à fait son genre. Mais je savais que bientôt, je devrais lui avouer mon amour et en subir les conséquences... J'avais peur.

Son énorme patte se posa doucement sur ma joue, comme une douce caresse, et j'appuyais ma joue contre elle, fermant les yeux, profitant de ce contact. Il semblait avoir autant de mal que moi à réalisé ce qu'il se passait en ce moment-même. Je sentis son front se poser contre le mien, mes yeux s'ouvrirent, alors que les siens étaient fermés. Je profitais de ce moment pour le détaillé intimement. Je voulais que chaque traits de son visage soit imprimé à jamais dans ma mémoire. Après un moment passé dans ce contact intime, je lui demandais comment il avait survécu, que lui était-il arriver, de me raconter sa vie. Puis je nichais ma tête dans la fourrure de son cou et il appuya la sienne sur la mienne. Cela me faisait plaisir qu'il cherche ainsi à garder ce contact physique avec moi et je souris, malgré moi, attendant sa réponse. Celle-ci me déçu quelques peu. Très courte et très évasive. Il avait répondu à mes questions, mais ne s'était pas étalé dans les détails :



Ma concentration était totalement hors service, et je ne contrôlais donc pas mon pouvoir. C'est ainsi que soudain, je sentis une certaine appréhension émaner de mon frère et je m’inquiétais soudain également. Je relevais la tête, doucement, pour ne pas le frapper au passage et plongeai mon regard azur dans le sien. Qu'est-ce qui pouvait bien l’inquiéter alors même que nous nous retrouvions tout juste ? Avait-il peur que je le rejette pour une quelconque raison ?



Je vins lui câliner la joue avec la mienne, alors que ma patte se posait sur la sienne en signe de réconfort, de soutien, ou de quoi que ce soit qui puisses lui indiquer que ce n'était pas des paroles en l'air. Je ne pensais pas au fait qu'il ne connaissait pas la nature de mon pouvoir et que le fait que j'ai sentis son anxiété devrait probablement le choquer. Tous les loups que je connaissais savait pour mon pouvoir, et avec mon état émotionnel du moment, je ne pensais pas à lui indiquer comment il était possible que je sache ce qu'il ressentait...

Beaucoup de questions me tordaient les entrailles, tant elles avaient envie de sortir, mais je me retins, pour l'instant. Ce n'était pas un interrogatoire, mais des retrouvailles, et il fallait que je me calme, si je ne voulais pas lui faire peur...

Lagherta

Rattraper le temps perdu

Sa queue battait de joie sur le sol, tout comme la mienne, mais quelque chose l’inquiétait, je l'avais sentis avec mon pouvoir, sans le faire exprès. Lorsque je lui posais la question, il soupira et me regarda, d'un air triste, et mon angoisse monta encore d'un cran en le voyant ainsi. J'attendais sa réponse alors qu'une boule se formait dans mes entrailles :



Mon coeur manqua un battement aux mots "bientôt partir". Partir, comment ça partir. Non, impossible... Mon oreilles mobile tomba d'un coup, ma queue cessa de battre le sol et un petit gémissement sorti de ma gorge. J'entendis le reste de sa réponse, sans vraiment l'écouter, la tristesse m'envahissait. Je ne pouvais pas risque de le perdre à nouveau... Un artefact permettant de vaincre Akui, c'est sur que c'était important, et qu'il était donc nécessaire de le trouver. Mais cela me déchirait le coeur que ce soit lui qui doive aller le chercher, alors que nous venions juste de nous retrouver. Qui plus est, un artefact permettant de vaincre un dieu ne devait pas se trouver à la vue et portée de tous, sa quête serait donc probablement périlleuse. En reviendrait-il seulement ?



Je me blottis encore un peu plus contre lui, câlant ma tête dans son cou, profitant de ce contact si doux et chaud. Il fini par reprendre la parole et je l'écoutait sans bouger de ma place :



Je me redressais d'un seul coup, plantant mon regard dans le sien, sincèrement heureuse d'apprendre cette nouvelle. Pas qu'il ne partirait pas seul, mais qu'il avait une compagne.



Les derniers mots avaient eu de la peine à trouver le chemin de mes babines, un autre voulant prendre sa place. Plus que tout je souhaitais que Keiss devienne bien plus que mon meilleur ami, mais sans lui parler de mes sentiments, c'était chose impossible. Puis, le sujet qui m'avait attristée me revint en mémoire et je répondis d'une voix douce, me montrant raisonnable, une fois n'est pas coutume :



Ma voix avait assurément pris un timbre triste pour ma dernière phrase. Je souffrais atrocement de la distance que P'pa avait insstauré entre nous, d'autant plus que maintenant, nous ne nous voyions quasiment plus vu que j'avais pris ma propre tanière, jugeant que j'étais assez âgée, et surtout ne supportant plus de ne pas pouvoir profiter de mo père quand nous étions seuls... Malgré tout, je ne doutais pas de son amour à mon égard, tout comme je ne doutais absolument pas des réponses de P'pa et de Keiss si je leur parlais de partir pour cette quête, qui seraient assurément du même avis, quitte à m'enchaîner pour être surs que je ne parte pas... De ce coté-là, ils se ressemblaient un peu...

Lagherta

Rattraper le temps perdu

Après un moment, Ragnar finit par mettre un peu de distance entre nous, tout doucement. Je sentais ses émotions, il commençait à être un peu mal à l'aise, le même genre de malaise qu'avait Keiss au début lorsque je le touchais. Alors je ne dis rien et le laissais faire. Avec Keiss, j'avais appris à ne pas me vexer lorsque l'on s'éloignait de moi pour rompre un contact physique, j'avais appris, et j'étais désormais capable de comprendre que tout le monde ne pouvait pas être aussi tactile que moi.

Gentiment, il m'expliqua pourquoi c'est lui et sa compagne qui partaient pour cette quête, et cela me permis de mieux comprendre. Il avait raison. Y envoyer le pire guerrier, c'était du pure suicide et envoyer le meilleur, c'était mettre en danger la meute. Akui ou ses adeptes pouvaient décider d'attaquer n'importe quand.

Lorsque je lui demandais s'il me présenterai à sa famille, il fini par hocher la tête et me répondre par l'affirmative. Puis ses sourcils se froncèrent et sa voix se fait plus dure lorsqu'il reprit :



Bien malgré moi, cette phrase m'arracha un sourire, et je répondis :



Je lui souris, et il vint me lécher la truffe, un simple petit coup de langue, mais j'appréciais ce contact à sa juste valeur. Je fini par reprendre, d'une voix plus raisonnable, mais néanmoins emprunte de tristesse :



Il reprit ensuite la parole, revenant ensuite sur un sujet plus joyeux :



J'avais vu plusieurs loups cerfs parmi les membres du clan de la Source, trois il me semblait. Mais effectivement, les plus gradés avaient été présentés à tous le monde et les chefs d'armée en avaient fait parti.



A présent, Ragnar était debout face à moi, seul son poitrail et ses côtes bougeaient, sous l'effet de sa respiration. Quelque chose dans son attitude me faisait penser que cette posture lui était habituelle. C'était une posture assez sérieuse. Pour ma part, je me contentait de m'assoir en face de lui. J'avais beau être une guerrière redoutable grâce à mes entraînements privés, je restais une louve relativement joviale et ouverte. Et puis, c'était Ragnar, je n'avais nul besoin de montrer ma force avec lui, ou d'établir qui était le plus dominant des deux. Je n'avais pas envie de jouer à ce jeu-là avec mes proches. Je préférais éviter les confrontations de dominance lorsque je le pouvais, surtout avec mes proches. Je n'étais pas une louve soumise, de loin pas, mais pour mes proches, pour ne pas créer de disputes, je ne cherchait pas les conflits de dominance, et si vraiment il devait y avoir, je préférerais me soumettre plutôt que d'entamer une dispute.

Lagherta

Rattraper le temps perdu

Il hocha la tête, signifiant son accord lorsque je parlait de le présenter à P'pa et Keiss. J'étais heureuse qu'il accepte. J'espèrais que nous pourrions passer beaucoup de temps ensembles avant son départ. Il me manquerait atrocement, encore plus que ce qu'il m'avait manqué jusqu'à ce matin, lorsque je le croyais encore mort...

Il fini par se lever et faire marche en direction du campement avant de se retourner vers moi et de lancer :





Je lui emboîtait donc le pas en direction du campement. Nous marchâmes un moment puis arrivés à l'entrée du campement, je lui fais un dernier câlin de la tête en guise d'au revoir avant de le quitter pour prendre la direction de ma tanière, et surtout celle de Keiss, qui se trouvait non loin de la mienne, elle-même proche de celle de P'pa. Je regardais encore une dernière fois derrière moi et sourit à mon frère, heureuse de l'avoir retrouvé.