J'étais plongé dans mes réflexions. Je pensais beaucoup à mon père, et à ma mère. Le coup était dur et ils avaient du mal à accuser ça. Alors j'avais essayé de me montrer plus présent pour eux, je ne savais pas si ça avait été efficace, parfois ils s'evitaient, ça ne pouvait plus durer.

Je pensais aussi à ma sœur. Je n'en avait pas encore parlé à Verd, et plus le temps passait plus elle risquait de nous voir et de mal interpréter les choses. Seulement je ne pouvais pas les présenter comme ça. Verd se demanderai pourquoi je n'avais jamais parlé de Lagherta avant, elle pouvait potentiellement ne pas comprendre.

Je devais lui parler de tout ça, de ce passé mais je ne trouvais jamais le bon moment. En fin de compte, y avait il un bon moment ?


Les escadrons avaient changé et j'avais eu la chance de rester avec mon père. Je ne sais pas si j'aurai tenu mentalement autrement. Que je me sentais pris d'angoisse, je le regardais et il le sentait. Il me souriait alors et ça allait mieux. Il me souriait, malgré sa douleur. J'étais fier d'être son fils.


Je réfléchissais à tout ça au fond de la tanière que j'avais aménagé, la tapissant de fourrure et d'herbe tendre pour les couches. J'entendis des pas s'approcher et Verd apparu dans l'entrée. À l'annonce de son retour je levais la tête et la regardais en souriant un peu. Elle me lechouilla la truffe et j'eus un petit sursaut suivit d'un rire court.



Je la regardais entrer, et je me rendis alors seulement compte d'à quel point elle m'avait manqué. Ma queue se mit à battre lentement mais c'était déjà beaucoup de signe d'expression pour moi. Une angoisse me prit alors. J'avais vu lagh plus tôt dans la journée, son odeur parcourait mon pelage. L'odeur du clan de l'eau.

La manière dont je cachais l'existence de ma sœur et les rendez vous que nous nous fixions me donnais l' impression d'être infidèle, et même si je savais que c'était faux, la honte me couvrit. Mes oreilles se tournèrent vers l'arrière.




Je devais prendre les devant, avant qu'elle n'aie le temps de se poser des questions. Et si elle devait m'oublier, je voulais qu'elle m'oublie en sachant entièrement qui j'étais.

Elle s'installa contre moi et comme à notre habitude, je posais ma tête sur elle. Ce contact me faisais du bien, me detendais. Je ne parlais pas tout de suite, laissant le silence s'installer. Ce n'avait jamais été facile pour moi de parler de ça, de tout. C'était extrêmement douloureux à chaque fois. Je pris une grande respiration en plongeant ma truffe dans son pelage, et quand je me sentis prêt, je levais la tête pour la regarder.


Je pris à nouveau une grande respiration.



Je fermais les yeux, tentant de chasser ce flot de souvenir. J'avais dis nous, d'entrée de jeu.


Mes pattes tremblèrent. Et mes yeux toujours fermerment fermés me piquerent.

Je tremblais. Ni de froid ni de peur, mais je tremblais. Toutefois la chaleur de son corps contre le mien me calmais, m'apaisais, me faisais du bien. Elle était la première ormis mon père a qui je donnais le droit de savoir. J'en avais vaguement parlé à ystrelle, mais en bonne mère elle savait déjà tout. Je déglutis avant de reprendre. J'ouvris les yeux.




Mes yeux étaient ouvert, mais je fixais le vide. Je revoyais la flaque d'eau croupissante, je ressentais les crocs de ma mère dans mon dos, mais surtout, je vis ma sœur s'éloigner. Les larmes coulèrent d'elles même.

Verd ne le savait sans doute pas, mais elle avait un fort pouvoir d'apaisement sur moi. Elle me rassurais et tentais de me déculpabiliser. Mais même si j'avais retrouvé lagherta, jamais je ne pourrai me pardonner. Oui, s'ils ne m'avaient pas trouvé, jamais je ne L'aurai connue, elle. Le soleil dans ma vie. J'enfoui ma tête dans son cou quand elle me dis qu'elle m'aimait. Non pas pour me cacher mais pour lui montrer que moi aussi, car je n'étais pas capable de le prononcer.

Soudain je me senti oppressé, étouffé. Je relevais la tête et retirais cette écharpe qui me serrais le cou. Verd savait ce qu'il y avait en dessous. Elle avait déjà vu les cicatrices, à plusieurs reprises. Mais peut être qu'à présent elle faisait le lien, peut être qu'à présent elle devinait leur origine. Comme sa mère, elle me proposa d'aller la chercher. Mais c'est tout autre chose que ce que j'avais répondu à Ystrelle, que je lui répondis. Je tournais vers elle mon regard douloureux.



Je la fixais, puis deglutis.



Je repensais alors à ces retrouvailles. J'avais pensé à un mauvais tour, et j'avais encore du mal à y croire, mais elle était là. J'avais senti son odeur, senti sa fourrure, sentis ses larmes, entendu sa voix, elle était là, si proche.



Je la fixais, mon cœur battait à tout rompre, le passé douloureux se mêlait à la joie de ces retrouvailles. Je regardais verd, elle savait tout ou du moins tout ce dont je me souvenais.

Verd sembla enchantée, ravie, même après le choc de ma première phrase. Elle était contente, moi aussi je l'étais. Mais je ne pouvais me résoudre à ne pas être anxieux à l'idée de les faire se rencontrer. Je ne savais pas comment Lagherta allait réagir, c'était ma soeur, mais.... Je ne connaissais rien d'elle, nous avions toute une jeunesse à rattraper. Quelle était sa fleur favorite? Quelle était sa saison préférée? Je n'en savais rien, et j'avais peur qu'elle soit jalouse de Verd à qui j'avais offert ma vie.

De même, je savais au plus profond de moi que Verd l'accueillerait bien, elle montrait en ce moment même sa bonne volonté. Mais... Le doute était en moi, je faisais confiance en ma compagne, elle me faisait confiance également, je le savais.Cependant malgré tout ça, je ne pouvais m'empêcher d'avoir peur.

Comment allaient elles se trouver? Lagherta allait elle plaire à Verd? Elle était si... collante. C'était mignon, mais ça pouvait être lourd si ça allait trop loin. Et Verd allait elle plaire à Lagherta? Tant de questions qui pouvaient gâcher ce moment.

Demain? Oui, pourquoi pas. Mais nous ne devions pas perdre de vue leur objectif. Je ne voulais pas partir sans que ma sœur ne sache pour Verd. Je hochais la tête. Au plus tôt c'était, au mieux c'était. Alors j'enfouis ma tête dans son cou. Elle avait changé de ton. Je ne voulais pas qu'elle s'inquiète trop. Je frottais ma tête contre sa fourrure.



J'étais vraiment inquiet. Et cette foule incessante et oppressante ne m'aidais pas à aller mieux.

Elle me laissait me blottir contre elle, je n'avais pas souvenir d'une seule fois où elle m'aie rejeté, ormis ce moment dans les plantes, juste après notre visite chez Léone. Il faudrait d'ailleurs que nous pensions à aller la revoir, elle ou une autre. Nous devions partir, mais nous ne pouvions pas y aller sans en avoir l'autorisation. Perdre nos pouvoir rendrait cette quête complètement inaccessible, nous avions besoin du pouvoir de Verd, et comment pourrais-je la protéger au mieux si je perdais le mien?

Elle était si gentille avec moi. Quand je prenais le temps d'y réfléchir, je ne comprenais pas pourquoi elle restait avec moi, ni pourquoi elle avait voulu venir me voir, en ce temps où je repoussais tout le monde. Je souris. Verd était sérieuse, mais si gentille, elle était persuadée que ça allait bien se passer, pourquoi ça se passerai mal alors? Je lui fit une léchouille sur la truffe


Je ne sais pas pourquoi cette précision est sortie, Verd ne m'avait pourtant pas demandé à qui Lagherta devait sa survie. A vrai dire, quand ma soeur me l'a dit, je n'avais pas su comment réagir, aurait-je le droit de l'approcher sans encombre, en sachant qui est son père? Un loup éclopé sans doute, borgne et blessé, mais pour qu'il en arrive là il devait certainement été l'un des plus vénérables soldats. On n'attrapait pas de telles blessures de manière stupide.

Peut être que, maintenant que ce loup était notre alpha, nous pourrions aller lui demander. Je doutais qu'il fasse des faveurs s'il apprenait que j'étais le frère de sa fille, mais sans doute avait il assez de rancunes en lui contre le dieu qui a détruit sa vie pour nous donner le droit de partir.


Je l'avais déjà perdu une fois, il était hors de question de la perdre encore. Je voulais la savoir en sécurité et elle ne le serai pas en nous suivant. De plus Verd risquerai de ne pas supporter cette pipelette à la longue....

Je souris et alors qu'elle se blottissait contre moi, j'installais ma tête contre elle. J'aimais nos contacts qui me faisaient du bien, je fermais les yeux un instant. La conversation était close. Verd savait, à présent, et demain nous irions voir Lagherta. Cela se passerait bien, elle me l'avait assuré. Le sujet était donc clos.

J'ouvris alors les yeux et la regardais à nouveau, sans rien dire. Elle était si belle, si petite et si douce. Un joyau pour moi, j'en avais de la chance. Un instant j'hésitais. Je voulais reparler, mais elle semblait si lasse, si fatiguée. Il n'était pas vraiment tard, mais la nuit était déjà là. Et si le bruit dans les galeries des familles se réunissant pour le soir raisonnait encore, il s'était affaibli par rapport à il y a quelques minutes.

Toutefois ça me titillais, depuis qu'elle m'avais posé cette question. Ce jour où je lui avais dis oui, ce jour où elle m'avais dis oui. Ça ne m'empêchais pas de dormir, ça n'occupait pas mes pensées entières non plus. Mais quand j'y pensais, j'avais du mal à penser à autre chose. Je décidais de parler.



J'attendis un signe, voir si elle acceptait de parler où si elle voulait dormir, puis je repris.


Je détournais le regard, gêné.



Je doutais fortement qu'elle se dise en des temps pareils qu'elle voulait devenir mère. Mais au moins c'était clair, et si un jour ça lui traversait l'esprit, elle n'hésiterai pas à m'en parler. Je voulais aussi qu'elle connaisse mes doutes, même si je ne voulais pas que ça entre dans la balance. Je frottais ma tête contre elle, peut être qu'elle ne voudrai pas répondre, je ne lui demandais pas ça. Quoi qu'elle désire, je le lui accorderai.

Elle me rassurait, elle essayait du moins. Mais il était mon père, son sang coulait en moi, ses gènes m'avaient fait, un jour peut être que je deviendrai comme lui, même si ça me terrifiait, et même si je n'en avait pas envie. Je n'arrivais pas à la croire. Je savais que c'était ce qu'elle ferai quand je lui en parlerai mais ce n'était pas ce que je lui demandais.

Je lui était reconnaissant, elle faisait tant pour moi. Mon regard était plongé dans le sien, je ne dis plus rien. Il n'y a qu'une seule chose qui pourrai me dire que je n'étais pas comme lui, pas comme ce monstre à qui je devais la vie.

Et si je réagissais mal, quand elle m'aurait oublié? ça non plus, je ne savais pas l'anticiper. Je ne pouvais pas me dire comment je réagirai, je ne pouvais pas me dire si j'allais l'accepter. Mais nous devions partir, et si elle m'oubliait, comment pourrions nous un jour avoir des enfants? Je fermais les yeux. L'avenir me faisais si peur. Une larme coula.

Je soupirai et essuyais ma larme d'un geste presque rageux. Je ne devais pas pleurer, je ne pouvais pas. pas devant elle. Je devais être fort et la protéger, et je n'y arriverai pas en pleurant. Elle pouvait pleurer, ça lui faisait du bien, ça la remontait, moi je ne pouvais pas. Je le vis bien, qu'elle tentait de sourire, et qu'elle n'y arrivait pas. Elle était contre moi et c'était tout ce qui importait. Je posais ma tête au sol et la frotta contre la sienne. Puis je fermais les yeux, ne rompant pas le contact, et je soupirai encore un fois.



Au moins ça, c'était évident. Si je doutais de tout je ne doutais pas de ça, si je pensais que tout pouvait arriver je savais que je ne cesserai jamais de l'aimer. C'était, au final, ça le plus important.