- RP effectué à la caverne Troglodyte. -

LAÏDA

Après plus d'une année d'errances et de découvertes, la louve était de retour. De retour au pays qui l'avait vue naître. Sa soif de nouveauté, de liberté avait partiellement été étanchée. Elle avait eu le mal du pays et s'était dit qu'elle pouvait toujours aller explorer les territoires solitaires, ce qu'elle n'avait pas fait au moment de son départ. Elle était revenues dans les montagnes en passant par des terres arrides, avec peu de proies. Mais elle avait appris à se contenter de peu pendant son voyage. Elle s'était affinée par rapport à ses rondeurs de jeunesse dues à l'abondance de la nourriture dans le clan.

Elle avait trouvé à se nourrir dans la savane, aux pieds de la montagne, un espèce de grosse musaraigne beige qui se tenait debout comme une stalactite. Elle était remontée avec sa proies dans les grandes cavernes qu'elle avait aperçu depuis en bas. Elle s'était dit que ça lui ferait un bon abris pendant quelque temps, le temps d'étudier les proies et les plantes du coin. Mais en y pénétrant, elle avait lâché son repas sur le sol.

Les murs étaient couverts de dessins, des proies, mais aussi d'énormes loups qu'elle identifia tout de suite comme des Ytens. Ils avaient la même robe brun/noir, les mêmes marquages tigrés et pommelés, ces mêmes bleus que les cheveux de son père. En s'enfonçant un peu plus dans les pièces creusées dans la pierre, elle vit des Oshurs, presque effacés par le temps avec leurs couleurs claires. Ils n'étaient pas représentés en scènes de chasse, mais elle avait du mal à déterminer ce qu'ils faisaient.

Son estomac gronda et elle fit le choix de retourner sur ses pas. Installée ici, elle aurait tout son temps pour étudier ces dessins. Il n'y avait pas trace du passage d'un congénère depuis longtemps de toute façon.

LAÏDA

Elle avançait dans les couloirs rocheux quand elle entendit des pas précipités se diriger vers elle. Elle n'était pas idiote, elle avait vu ce dont les solitaires étaient capables, et gratuitement, elle en gardait le souvenir cuisant sur son flanc. Elle avait eu le malheur de passer trop prêt du terrain de chasse d'une louve avec ses petits, elle s'était montrée beaucoup plus prudente depuis. Ici, elle n'avait pas d'échappatoire, elle devrait donc se battre, mais au moins serait-elle prête cette fois.

Les pas s'approchaient et elle se tenait prête, mais jamais elle ne se serait attendue à voir celle qui arriva devant elle. Widys la dévisageait, et elle avait probablement la même expression qu'elle à cet instant. Un petit frisson lui parcourut le dos, elle s'était tellement attendue à devoir se battre que son corps ne savait plus comment réagir.

La.. Laïda ? C'est... C'est bien toi ?

Sa mère bégayait, tremblotante, elle fit un pas dans sa direction, comme si elle n'était pas certaine de ce qu'elle voyait. Pourtant, si elle arborait une nouvelle cicatrice au flanc et qu'elle avait maigri, Laïda n'avait pas beaucoup changé, elle était resté en plutôt bonne santé.

Maman?

Dans sa voix perçait surtout la surprise de voir sa mère si loin de chez elle. Elle avait vieilli et des poils blancs ornaient maintenant son museau, mais elle avait l'air de plutôt bien vivre sa vieillesse, ce qui n'était probablement pas le cas de son père. D'ailleurs elle s'étonnait qu'elle vienne aussi loin en le laissant seul, quoi que Balder devait sûrement prendre le relais dans ce cas là.

LAÏDA

La queue de sa mère s'agita violemment et elle lui sauta dessus, couvrant sa truffe de léchouilles, s'interrompant quelques secondes pour la regarder avant de reprendre avec un enthousiasme débordant autant que les larmes qui roulaient sur ses joues. Laïda s'était tendue sous le débordement d'affection de la médecin, elle n'avait jamais été très câline, mais elle supporterai, ça faisait longtemps qu'elles ne s'étaient pas vues, elle pouvait bien prendre sur elle quelques minutes. Enfin, tant que ça ne virait pas au comportement obsessionnel qu'avait parfois la louve crème.

Tu m'as tellement manqué ! Je suis si contente de te revoir !

Elle continuait à se frotter frénétiquement à elle, la reniflant avec attention avant de recommencer à lui donner un coup de langue sur le museau, son arrière train dansant furieusement au rythme du métronome de sa queue. Finalement, ce fut plus que n'en pouvait supporter la jeune louve et elle recula.

Maman! Stop, tu m'étouffes!

Sa queue battait aussi, mais avec moins d'énergie que celle de son aînée bien qu'elle fut aussi heureuse de la revoir. A vrai dire, elle ne pensait pas que ça arriverait un jour, quand elle était partie, elle était de fait devenue une ennemie de la Source. Elle avait déserté, elle savait donc qu'il valait mieux qu'elle évite au maximum les frontière du clan et par là même, les membres de sa famille. Pire, si elle s'était trouvée face à Gladys, il aurait été obligé de la combattre. C'était donc une agréable surprise que de rencontrer sa mère ici, surtout qu'aucun loup n'était venu dans ces cavernes depuis un bon moment.

Qu'est-ce que tu fais si loin du clan, seule? C'est dangereux les terres solitaire mman...

Ca cicatrice au flanc en était la preuve, et elle avait eu une formation militaire, pas sa mère...

LAÏDA

Ce n'est pas dangereux ici. Il n'y a plus de présence régulière depuis que les Cavernes se sont dissous. Et je te rappelle qu'il m'arrive de sortir des terres du clan quand je cherche des plantes et autres ingrédients.

Widys balaya ses inquiétudes d'un revers de patte, Il était vrai que les anciennes terres Cavernes ne semblaient pas très peuplées, en particulier les cavernes elles-mêmes, mais la jeune solitaire avait quand même croisé quelques pistes quand elle avait chassé dans la savane. C'est vrai que sa mère s'éclipsait souvent du clan pour ses récoltes, mais de mémoire, elle ne lui avait jamais dit être allée aussi loin, et puis aujourd'hui, elle n'avait pas sa sacoche... Mais sa mère pouvait être plus têtue qu'une mule alors elle ne dit rien.

Le sourire de la louve crème s'effaça et sa queue cessa de remuer, son air se fit plus sombre. La solitaire commença à s'inquiéter de ce changement brusque d'attitude, mais elle n'eut pas le temps de poser la question, la réponse lui tomba dessus en une pluie de mots précipités.

Pourquoi tu es partie ?! Ton père t'a cherché partout, il était seul quand tu es parti ! Gladys, Balder, Horik et Lagherta étaient au Désert avec moi : personne ne pouvait l'aider ! Je reviens des jeux entre deux épreuves pour remplir mes stocks et j’apprends que tu as disparu ! Pire, que tu as déserté ! Et pour quoi ?

La fourrure de l'Oshur s'était gonflée et elle avait pris une posture menaçante, Laïda recula d'un pas, ramenant sa tête et plaquant ses oreilles en arrière. Elle avait des larmes dans les yeux et le poil de sa fille commença à se hérisser devant la pluie de reproches. Le clan l'étouffait, elle ne l'avait jamais caché à ses parents, depuis son enfance sa soif de découverte l'avait amenée à aller toujours plus loin. Avoir un rang l'astreignait à une discipline qui l'empêchait de faire ce qu'elle aimait. Elle avait arpenté chaque mètre carré du territoire de la Source et avait le sentiment d'y être emprisonnée.

J'avais laissé un message, je disais de ne pas me chercher, que j'allais bien. Evidemment que je n'allais pas vous prévenir, vous auriez essayé de me dissuader de partir. Et je suis partie pendant les jeux parce que la surveillance avait drastiquement diminué et que ma désertion serait moins remarquée et plus tardivement. Evidemment. Le clan m'a toujours étouffée! Vous le saviez tous! J'ai appris plus de choses en quelques mois loin d'ici qu'en toute une vie à la Source.

Elle regrettait que son père ait tenté de la retrouver mais il avait été stupide de la chercher alors qu'elle avait laissé un message. Il n'aurait, de toute façon, jamais pu la rattraper avec son infirmité. Le premier jour, elle avait couru toute la journée, n'avait dormi qu'une heure ou deux, puis avait repris sa course jusqu'à la frontière du pays. Gaor aurait été incapable de faire la moitié du trajet qu'elle avait parcouru, sans même imaginer la rattraper.

Elle aimait sa famille, mais sa soif de connaissance était inextinguible, elle avait toujours plus compté pour elle que tout le reste. Elle désigna le long couloir derrière elle qui menait à la salle des peintures.

Il y a ici tout un pan de l'histoire de notre espèce, marquée sur les murs. Je suis sûre que ni toi, ni papa n'avait la moindre idée du quart de ce que j'ai pu y voir à peine ce matin! Je me sens enfin libre! Je n'ai plus l'impression de porter le poids de chaînes monstrueuses, je suis née pour être ici, pas enfermée dans un clan à répéter chaque jour, inlassablement les mêmes actions!

Les yeux de la fille de Gaor flamboyait, elle ne se laisserait plus enfermer, elle avait gagné encore plus de caractère lors de son voyage, si c'était possible. Ses parents ne l'avaient-ils pas mise au monde pour qu'elle soit heureuse? Si elle était restée au clan, elle aurait fini par perdre tout ce qui la faisait vivre, il était hors de question qu'elle laisse sa mère la culpabiliser.

LAÏDA

Sa mère gronda et sa queue se dressa sous les paroles de sa fille. Oui Laïda n'avait pas mâché ses mots, elle n'avait jamais trop supporté l'autorité de Widys et se prendre des reproches dans la gueule alors qu'elle n'avait rien demandé. Ce n'était pas elle qui était revenue comme une fleur au camp, demander à être réintégrée. C'est sa mère qui l'avait trouvée ici.

Tu crois que je ne te t'aurais pas comprise ? Nous sommes pareilles sur ce point ! On aurait pu trouver une autre solution que la désertion. Mais tu t'en fiches de toute façon : tu ne t'excuses même pas du mal que tu as fais ! Tu aurais pu avoir la décence de le faire, même si tu ne le penses pas ! Tu me dis que tu as appris plus de choses loin d'ici qu'à la Source alors que j'ai toujours voulu te montrer et t'enseigner, mais tu m'as toujours repoussé. Alors tu ne peux t'en prendre qu'à toi-même ! Ce n'est pas faute d'avoir essayé de te faire découvrir des choses !


Non, elles n'étaient pas pareilles, sa mère était obsédée par les plantes et la médecine. Laïda s'intéressait à des sujets biens plus vastes. Certes la faune et la flore avait fait partie de ses sujets d'études, mais rien tant que le secret des origines lupines, au delà des divinités n'avait jamais enflammé son âme. Quant à l'éducation de l'Oshur, elle avait toujours eu son cher Balder pour lui transmettre tout ce qu'elle voulait. Le parfait, patient, intelligent Balder... Non elle ne comptait pas s'excuser d'avoir pris une décision en tant qu'adulte, elle avait quitté la tanière familiale dès qu'elle en avait eu l'age, pour ça non plus elle n'avait pas demandé. Elle ne comprenait pas que sa mère n'accepte pas que la famille n'était pas sa principale priorité. Elle allait rétorquer mais Widys ne lui en laissa pas l'occasion.

Maintenant, tu es une ennemie de la Source.

Pour ce que ça lui changeait, elle n'avait pas l'intention d'y remettre les pattes de toute façon. Elle avait accepté l'idée de ne plus voir sa famille quand elle était partie. Ça ne voulait pas dire qu'il ne lui avaient pas manqué, ou qu'elle n'avait pas pensé à eux, juste qu'il ne lui était pas indispensable de les avoir dans sa vie pour les aimer.

N'espère pas avoir un peu d'aide de notre part ou revoir quelqu'un de la famille. De toute façon, tu n'en fais plus partie : tu nous as renié, tu as fais du mal à tout le monde et tu n'étais même pas là pour ton père quand il est mort.


Elle ne s'attendait pas à en avoir, elle avait très bien vécu jusqu'ici sans appeler sa maman et son papa, elle n'était plus une louvette. Sa fourrure se hérissa de nouveau, "renié"?! A aucun moment elle ne les avait renié, elle avait juste choisi de vivre sa vie... Puis son coeur sembla lui tomber dans l'estomac. Gaor était mort? Widys était partie sans lui en dire plus. Mais pourtant il était encore "jeune" quand elle était partie. Il était abîmé par la vie, mais elle ne voyait pas en quoi cela avait pu affecter son espérance de vie. Cette nouvelle l'avait sonnée, elle ne comprenait pas. Elle savait qu'elle n'aurait de toute façon pas pu être là pour sa mort, mais elle avait compté laisser un nouveau signe qu'elle était là, indiquer où elle était pour qu'on puisse la prévenir et qu'elle puisse se recueillir. Mais elle n'avait jamais pensé qu'il partirait si tôt! Elle avait besoin de savoir comment il était mort, si c'était dans une attaque au camp elle s'en voudrait, forcément, elle avait été guarde, défendre le camp avait été son devoir avant qu'elle ne parte.

Elle avança lentement dans les couloirs, suivant les traces de pas de sa mère dans la poussière de la grotte. Elle n'était pas loin, elle devait lui dire comment il était mort. Elle avait besoin de savoir. Sa mère était assise dehors, elle pleurait.

Comment? Il est mort comment?

LAÏDA

Sa mère pleurait à l'entrée des cavernes, peut-être s'était elle arrêté le temps d'y voir à travers ce rideau de larmes? Elle savait à quel point la vieille médecin avait aimé son guerrier de père, ce n'était donc pas surprenant qu'aborder son décès la mette dans cet état, cependant, Laïda s'était aussi pris la nouvelle en pleine face, accouplée à une avalanche de reproches et elle n'arrivait pas réellement à en prendre conscience.

Il est mort entouré de sa famille.

Sur ces mots, elle s'enfuit de nouveau. Le message était plus que clair. Entouré de sa famille, elle qui n'avait pas été là, n'était plus de la famille. Une boule se forma dans sa gorge, Widys l'avait déjà dit un peu plus tôt, mais il y avait une différence entre quelque chose de lâché sous le coup de la colère, et un message entre les lignes alors qu'on était en pleurs. Laïda s'assit, interdite. Elle avait quitté la Source oui, était-ce si mal que ça que d'avoir eu envie de vivre sa vie ? Elle était certaine que Gaor aurait compris, lui. Sa mère avait toujours été obtue quand il s'agissait de sa fille.

Elle se leva et retourna dans les cavernes, la tête haute, mais le coeur serré. C'était probablement la dernière fois qu'elle voyait la louve qui l'avait mise au monde, celle qu'elle n'aurait plus jamais le droit d'appeler sa mère. Mais réaliser ses rêves nécessitait parfois des sacrifices. Après tout, n'était-ce pas ainsi que fonctionnait le puit au voeux? Laïda rêvait d'une vie de découvertes, de sciences, d'histoire. Le clan de la Source et sa famille ne lui auraient jamais offert cela. Il était temps de blinder la part de son coeur qui était restée tendre.