-Shaya-

Shaya s'était réveillée ce matin, comme tous les matins depuis quelques temps, auprès de son compagnon Gladys. Depuis que les températures avaient baissées, elle pouvait s'autoriser des journées plus longues, cependant elle veillait à ne pas prendre froid. Avec sa maladie, un simple rhume pouvait faire beaucoup de dégâts à ses poumons, les docteurs lui avaient bien dit. Aussi, elle privilégiait les moments ou le soleil était chaud, et évitait les journées pluvieuses.

Shaya bailla, avant de remarquer la raison de son éveil : sa petite soeur était venu lui rendre visite. La jeune louve grandissait comme un champignon en automne, rendant fou de bonheur son papa. Cependant, voir l'enfant et Urielle était à chaque fois un coup de poignard de plus dans le cœur de Shaya, qui digérait encore le fait de ne pas pouvoir avoir d'enfants venant d'elle, de ses entrailles. Elle essayait de le cacher, avec succès d'ailleurs, se réfugiant dans la prière et espérant que sa Déesse lui donne un chemin à suivre, mais pour le moment aucun signe ne lui était parvenu.

Coucou Sha' ! Dis, on va voir la colline blanche ! S'teeeee plééééééééé !

La voix fluette de sa sœur la sortit définitivement de son sommeil léger, et Shaya ouvrit les yeux avant de se relever, et de s'étirer. La petite en face d'elle était excitée au possible, alors que lesoleil venait juste de se réveiller. La louve brune lécha le museau de son compagnon pour lui signifier que tout allait bien, puis se reconcentra sur Aeryldis. Elle voulait voir la colline, celle avec les cendres ? C'était un endroit que Shaya essayait d'éviter, mais pour sa soeur elle pouvait bien faire une exception. La petite était si mignonne ! Elle s'abaissa à son niveau, lui donnant un petit coup de museau avant de répondre en chuchotant, essayant de ne pas réveiller Gladys plus que cela :

Bonjour Aeryldis. Si tu veux on peux y faire une tour, je t'y accompagne !

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'Hasard' :

-Shaya-

Les deux soeurs se mirent en route vers la colline, lentement. Si l'hiver était bénéfique pour Shaya, les efforts lui étaient toujours plus difficiles que pour les autres, et elle avait prit l'habitude de marcher d'un pas plus lent, une marche de promenade. Elle avait ainsi tout le temps qu'elle voulait pour admirer les paysages qu'elle traversait de ses yeux de perpetuel louveteau. De plus, sa soeur était encore petite, et si elle était capable de faire le trajet sans problème, aller trop vite la fatiguerai démesurément. Tout était une affaire de mesure.

Petit à petit, la colline, blanche et duveteuse, s'approchait de Shaya. Le soleil, encore bas dans le ciel, mouchetait d'or le sommet du monticule, comme si tout en haut de cette colline, un trésor inestimable se trouvait. Une armure en métal, peut-être, ou bien d'anciennes pièces en or ? Shaya laissait ses pensées vagabonder vers de fantastiques horizons, peuplés de monstres oniriques et de loups mystérieux. Elle aurait aimé parcourir le monde, en découvrir ses beautés secrètes, voir de ses yeux ce que nul autre n'avait vu. Mais elle ne le pourrait jamais, et n'en était pas amère. La beauté, Iria lui avait appris, se trouvait dans toute chose.

Soudain, un éclair noir passa entre les fourrés devant eux. Shaya s'immobilisa, attentive, mais sans peur. Après tout, pourquoi avoir peur ? Ses dernières rencontres avec des animaux lui avait prouvé une chose : les Dieux veillaient sur elle. Sinon, elle serait déjà morte à trois reprises. Sa soeur s'avança doucement, et Shaya serra les dents. Cette fois-ci, si quelque chose arrivait, personne ne pourrait la sauver.

C'était quoi ça ?

La louve avança de quelques pas, sa longues queue trainant au sol en un bruit feutré. Elle vint se placer de nouveau aux côtés de sa petite soeur, protectrice, puis avança le museau et renifla. Un nouveau bruissement se fit entendre, brisant le silence qui s'était installé. Shaya ne dit rien, mais son odorat ne sentait pas de danger potentiel, juste une odeur animale. Alors qu'elle s’apprêtait à répondre, l'ombre s'approcha, et une petite tête noire apparut à travers les fourrés. La petite bête devant faire une trentaine de centimètre, et ressemblait à un lapin, si ce n'était pour une particularité : elle avait des cornes !

Shaya souffla : c'était un lièvre cornu, une espèce peu dangereuse du coin. Enfin, peu dangereuse à part en période de reproduction, de ce qu'un chasseurs lui avait un jour rapporté, revenu d'une chasse plein de bleus. Ces petite proies étaient assez peureuses, mais bien plus téméraires que les lièvres classiques. Leur cornes offrait un très bon moyen de défense contre les chasseurs, et leur permettait de creuser des galerie impressionnantes. Shaya avait également entendu dire que leurs cornes, réduites en poudre, avait des effets bienfaiteurs ... Le lièvre s'avança, visiblement curieux, reniflant le sol devant lui. Shaya chuchota sans tourner la tête :

C'est un lièvre cornu, il ne nous fera pas de mal, mais ne l'attaque pas.

-Shaya-

La petite louve ne tenait pas en place, mais un sourire éclaira son jeune visage : elle ne connaissait à priori pas cette espèce ! Shaya sentit une espèce de fierté étrange, et un sentiment émouvant, celui d'avoir appris quelque chose à un être pour la première fois. Un sentiment que chaque parent connaissait, chaque nourrice aussi probablement, mais qu'elle ne connaîtrait ... jamais peut-être ? Un nuage passa de nouveau sur son visage, figeant son sourire doux sur ses babines en un espèce de rictus faux.

Mais la fraction de seconde d’inattention de la fille de l'alpha suffit à sa soeur pour lui passer sous la truffe en sautillant. Shaya lui emboitant le pas, mais la marche s'arrêta très vite : la petite trébucha sur une racine, et vint s'écraser la truffe sur le sol. Elle se mit immédiatement à pleurer :

La brune s'avança rapidement tout en approchant sa truffe avec un geste doux et inquiet

Oh non, non, ma pauvre

Elle regarda la petite louve sous toutes les coutures, et en déduit que sa truffe avait prit la majoritée des dégâts. tout le museau était très sensible, aussi ce n'était pas étonnant que la douleur de tomber sur le sol violemment fasse pleurer la petite. Shaya lécha délicatement le museau de sa soeur, pour en nettoyer le sang, tout en consolant la petite d'une voix douce et rassurante :

Voila, un bisou magique pour réparer la truffe

Un sourire maternel flottait sur ses babines, alors que ses gestes étaient naturellement doux. Shaya avait la maternité dans le sang jusqu'au bout des griffes, ce qui rendait son impossibilité encore plus difficile pour la louve.

-Shaya-

Merci Shaya !

Le sourire était retourné sur les babines de sa sœur, et elle repartit aussi sec. Ça avait fonctionné merveilleusement bien, ce "bisou magique" que Shaya avait appris avec son papa, ou avec les nourrices, elle ne savait plus. La louve sourit, mais le pincement de son cœur restait. Elle avait tellement d'amour à donner, mais que très peu de possibilités. Elle marcha encore un peu, ses pattes soulevant de plus en plus de pollen. Le lieu n'était pas idéal pour elle, mais elle savait qu'elle supporterait de rester quelques temps, tant qu'elle ne courrait ou ne se roulait pas. Calmement, elle surveillait sa soeur tout en montant la colline.

Au bout d'un moment, les deux sœurs arrivèrent auprès d'un arbres, un grand arbres, probablement plus vieux que Shaya et même que son père, et son père avant lui. Elle leva le museau, admirant le soleil filtrant à travers les hautes branches et les feuilles, faisant briller le pollen autour de lui comme s'il était entouré de dizaines de lucioles.

C'est super beau par ici !! Regarde l'arbre comme il est grand !

Shaya sourit, donnant un petit coup de museau au passage à Aeryldis. C'était la première fois qu'elle venait ici, et tout était source de découverte. Elle avait envie de l'emmener au bout du monde, de lui montrer plein de choses ! Elle répondit :

Il doit être très vieux, il était déjà là quand je suis née !

Elle lança un regard malicieux à la petite louvette qui ne tenait pas en place. Shaya savait que la petite louve tenait de Fuurin, la messagère grise, et il semblait qu'elle en avait tiré sa vigueur et son endurance. Peut-être que sa proposition lui plairait ...

Tu sais, le mieux quand on est ici, c'est de descendre la pente en roulant !

-Shaya-

Toute une panoplie d'expressions passèrent sur le visage de la petite louvette : elle était si expressive, c'était un régal à regarder. Shaya savait que souvent les louveteaux avaient cette candeur dans leurs expressions, candeur qui disparaissait alors qu'ils devenaient grands. Elle en profitait au maximum, avant que sa sœur ne change trop, ne grandisse.

A la fin de sa phrase, sa petite sœur ouvrit grand ses yeux d'un bleu glacé, avant de s'élancer sans demander son reste. Son petit corps un peu boudiné roula, roula, jusqu'en bas de la colline, soulevant un véritable nuage de cendre. Shaya sourit, la queue battant l'air dans son dos. Il ne serait pas raisonnable de la suivre, non, et pourtant ... Pourtant, sa soeur lui rappelait tellement son enfance, cette enfance qui avait été ternie par la mort de sa mère et la tristesse de son père. Elle avait envie de s'amuser elle aussi, de retrouver un peu de paix. D'un bond, elle se roula au sol, et se mit à dévaler la pente tout en retenant sa respiration. L'adrénaline faillit la faire crier, mais elle n'en fit rien : la cendre volait tout autour d'elle, et ses poumons étaient trop fragiles.

Une fois en bas, elle se redressa, et reprit sa respiration, un sourire franc sur ses babines rougies par le froid et l'excitation. Sa soeur s'était assise près d'elle, et la regarda en souriant, visiblement un peu fatiguée :

Shaya ? Pourquoi je suis petite moi ?

Shaya réfléchit un instant : elle ne comprenait pas tellement la question, mais les enfants étaient comme ça souvent. Ils posaient beaucoup de questions.

Et bien parce que tu n'as pas terminé de grandir. Un jour tu seras aussi grande que moi, et aussi sage aussi !

Elle fit un clin d’œil à la petite, avant d'éternuer. La cendre n'était pas rentrée dans ses poumons lors de sa descente, heureusement, mais rester trop longtemps était néfaste pour sa santé. Elle lécha le front de la petite louve, avant de lui proposer :

On rentre ? Sauf si tu veux encore t'amuser ?

-Shaya-

La petite loupiote leva ses grands yeux bleus vers Shaya. Elle avait l'air fatiguée, mais heureuse, ce qui ravit la prêtresse : au moins la ballade lui avait plu !

La louve brune sourit tendrement, avant de donner un petit coup de museau dans le cou de la louvette, puis de lui lécher le front. Elle montrait le chemin vers le camp, au cas ou la jeune louve n'ai pas encore le sens de l'orientation assez aiguisé. Elle espérait néanmoins qu'elle aurait la force de rentrer, car Shaya ne pourrait pas la porter jusqu'au camp !


Aeryldis leva un regard supplicateur vers Shaya, qui hésita une fraction de seconde. Il faudrait sûrement qu'elle demande à Urielle, mais la nourrice serait surement d'accord pour qu'Ae passe une nuit avec sa soeur et son "beau-frère". La prêtresse rit légèrement avant de répondre :

Oui, bien sûr ! On passera demander à maman avant.

Maman ... C'était comme ça qu'elle appelait Urielle lorsqu'elle était avec sa sœur, mais cela était un peu étrange pour une louve qui n'avait pas son page. Enfin, la ituation était complexe, mais la caverne était une bonne mère, et sa sœur s'épanouissait bien malgré la famille recomposée. C'était le principal ... Shaya continua son chemin, tout en réfléchissant : peut-être ... peut-être qu'adopter finalement était une bonne solution, pour elle et Gladys.

Finalement les deux louves arrivèrent au camp, fatiguées. Elles passèrent directement voir Urielle, qui donna son accord pour que sa fille reste avec Shaya le soir. Gladys ne vit pas d'inconvénient, pour une nuit, à laisser la petite louve dodue s’immiscer entre lui et sa bien aimée.