-Kaleea-

La louve sombre faisait les 100 pas hors de sa tanière, sa longue queue sale trainant par terre en soulevant des nuages de poussière. Le matin était plutôt frais, mais Kaleea savait que la journée serait de nouveau sous l'égide de Solar, qui avait éclairé tout le territoie ces derniers jours. La course s'était terminée sans encombre, lauréant Irina, sa cousine. La louve aurait pu en être heureuse, ou même jalouse, si elle n'était pas aussi angoissée. Elle leva le museau vers le ciel, ou la nuit noire laissait peu à peu place à un ciel blanc laiteux, signe que le soleil se lèverait bientôt. Alors, Kaleea se mit en route.

[?????? à voir avec le rp avec Logan mais rien d'impactant]

Hier, la jeune louve avait commencé à ressentir une sensation étrange, des tiraillements, des douleurs dans son ventre. Dès la première fois, la peur l'avait prise. La deuxième, et ce fut la panique. Elle n'était pas stupide, elle savait ce qu'elle avait fait, et même si elle ne le comprenait pas, c'était à présent le dernier de ses soucis : c'était hors de question qu'elle ai des petits. La décision fut vite prise, il fallait qu'elle se débarrasse de ce qui grandissait en elle, s'il y avait quelque chose, le plus vite possible, aussi elle avait décidé de rendre visite à Eris dès les premières lueurs du jour. La gris n'avait quasiment pas dormi, et arborait à présent des cernes noires sous ses yeux rouges, mais enfin le jour se levait.

Arrivée devant la tanière de la médecin, elle hésita. Etait-elle là ? Cela faisait longtemps qu'elle n'avait pas vu Eris, à l'époque la démonia lui avait appris les à reconnaitre et utiliser quelques plantes. Ces leçons avaient vite été coupées court par ... l'incident, et Kaleea n'était plus jamais revenue. Peut-être que la rouge était passée quelque fois, l'examiner ou la nourrir de plantes alors qu'elle était perdue dans la nuit, mais elle ne s'en souvenait pas. L'ancienne apprentie juge passa le museau dans la tanière, laissant ses yeux s'habituer au noir. Il fut un temps ou elle aurait demandé à voir Eris, peu importe l'heure du jour, quitte à s'énerver si elle n'était pas servie immédiatement. Mais aujourd'hui, elle n'en avait plus la force. Elle chuchota :

"Eris ? Tu es là ?"

-Kaleea-

Seul le silence répondit à l'appel de Kaleea. Cette dernière sentit son ventre se tordre. Elle avait peur, elle avait si peur ... Et si personne ne lui répondait ? Pire, si Eris ne pouvait rien pour elle ? La louve aux longs cheveux avait entendu parler d'une plante, que les médecins gardaient cachées, qui permettait de faire ce qu'elle voulait faire. D'effacer son erreur. D'éviter de mettre au monde des petits malheureux, dont la mère ne pourrait pas s'occuper. Mais si elle refusait ? Ou si c'était juste une légende ? Kaleea savait qu'une grossesse était risquée, elle n'avait toujours pas résolu le problème de ses absences, de ce qu'elle devenait, de qui elle était. Elle appela une nouvelle fois, sa voix tremblante, puis enfin quelqu'un lui répondit :


Au fond de la tanière sombre, alors que les premiers rayons d'un soleil encore timide éclairait à peine la cime des arbres, elle aperçut Eris se lever et s'ébrouer. le soulagement la prit si fort qu'elle faillit en pleurer.


La louve baissa le museau, se tordant les pattes au sol. Oui, elle avait besoin de quelque chose, elle avait besoin de réponses à ses questions, elle avait besoin qu'on lui dise que tout allait bien se passer, elle avait besoin d'un câlin. Mais elle se contenterait d'un médecin. Elle releva la tête, puis regarda autour d'elle, anxieuse, avant de demander :

Je ... Je peux entrer ?

Lorsque la médecin eu accepté, elle pénétra dans la demeure, assez vaste, aux odeurs multiples, d'Eris. Les herbes coupées, les pots en terre regorgeant de morceaux de champignons ou d'algues, les peaux qui pendaient au plafond, tout était une source olfactive nouvelle qui débordait les sens de la jeune louve, qui avait déjà du mal à se concentrer sur ce qu'elle voulait. Son unique envie était de retourner se coucher, et seule son angoisse la maintenant debout. Elle s'assit, et, le regard fuyant, exposa son problème :

J'ai ... un gros problème Eris. Je ne sais pas si tu peux m'aider mais ... J'espère. Aux dernières chaleurs j'ai ... je sais pas ce qui m'a prit, je sais vraiment pas. J'ai ... Je suis allé voir un mâle et ça a dérapé.

Elle releva ses yeux cernés de mois d'insomnies et de sommeil compliqué.

Je veux pas de petits, j'en suis pas capable, pas maintenant.

-Kaleea-

La medecin en face d'elle resta silencieuse, l'écoutant. Il n'y avait plus trace de la Eris qu'elle connaissait, uniquement un docteur et son professionnalisme. Finalement, et au grand soulagement de Kaleea, elle comprit immédiatement sans que la jeune louve eu besoin de lui faire un dessin. Elle la regarda droit dans les yeux, comprenant la gravité de la situation :


La cendrée hocha la tête, mais ne s'attendait pas à un contact aussi rapide. Elle n'avait touché personne comme ça depuis ... Bah pas si longtemps finalement. Mais elle ne s'était pas sentie elle-même les dernières fois, et à vrai dire elle ne se souvenait pas avoir eu de contact avec une femelle depuis longtemps. Peut-être que Kelekt ... Mais non. C'était de sa faute. Elle secoua la tête, laissant la médecin l'examiner non sans se sentir mal à l'aise, à la limite de l'agressive. Mais ses émotions étaient toutes dominées par l'angoisse de l'inconnu, et la peur de ce qui grandissait déjà peut-être en elle. Puis, le jugement tomba :

Un peu sonnée, la louve ne réagit pas. A vrai dire, elle se doutait un peu au vu des douleurs que ce qu'elle avait fait avait engendré des conséquences. Mais la suite était plus douloureuse à entendre. Saigner, avoir mal, tout ça lui donnait déjà le tournis. Son corps amaigri était-il même capable de supporter une intervention comme celle-là ? Elle tangua un peu sur ses pattes, puis se coucha pour se stabiliser en respirant. Elle n'avait pas le choix, une grossesse serait encore pire pour elle, et elle refusait de donner naissances à des presque orphelins. Elle releva desyeux faibles, puis hocha la tête :

Je dois faire quoi ?

-Kaleea-

La cendrée maintint son regard, perdu mais déterminé dans celui d'Eris, jusqu'à ce que la rouge prit une grande inspiration. Eris était jeune, plus grande qu'elle mais jeune. Elle n'avait peut-être jamais utilisé les fleurs dont elle venait de parler. La vie de Kaleea était donc entre ses pattes. La jeune louve eut un frisson. Et si .... Elle essayait de la tuer ? Elle leva le museau vers Eris, qui s'affairait à présent dans ses affaires. Non, ça serait bien trop évident. Elle secoua la tête, se souvenant que la demonia était la "petite amie" de son cousin Aymeric. Il faudrait qu'elle lui demande de garder le secret, si elle le pouvait.

Quelques pots vinrent finir leur vie au sol, faisant sursauter Kaleea. La cendrée était sur les nerfs, tendue et anxieuse, tant par la promesse de la douleur et du sang que par ce qui arriverait si elle ne le faisait pas. Elle n'était pas une guerrière, comme sa maman ou son papa. Elle était juste épuisée. Eris avait cessé de s'agiter, et elle se retourna lentement, déposant deux fleurs devant Kaleea.


Ellle sorti sans sommation, laissant l'ancienne apprentie juge seule avec ses pensées. Elle sentit de nouveau le sol tanguer légèrement sous ses pattes, ne comprenant pas comment elle en était arrivée là. Tout ce qui se passait était comme dans un rêve, comme si elle ne dirigeait pas ses pas, ne pensait pas. Elle était en pilote automatique, depuis bien longtemps. Il n'y avait que ces rares fois, donc celle avec Balder, ou réellement elle s'était sentie bien. Sa vision rétrécie par la deuil, dont les couleurs de la joie, du plaisir avait disparu, tout cela était son quotidien. Elle pencha la tête, puis sans réfléchir avala les deux fleurs. Elle ne pria pas. Elle n'en avait pas le droit.

Elle se leva alors, sentant comme un bourdonnement dans ses oreilles, mais l'ignora pour aller se coucher sur le tas de peaux. Elle n'avait pas sommeil, mais sentait que son corps allait bientôt devoir travailler pour réparer son erreur. Elle posa sa tête sur ses pattes et ferma les yeux, s'interdisant de penser. Elle était passée maitre dans ce genre de jeu, d'abord pour oublier sans avoir à dormir, puis pour réapprendre à manger, à dormir correctement. Mais le résultat était là : elle ne savait plus qui elle était. Eris revint vite, et Kaleea lui lança d'une voix morne :

"Tu pourras ne parler de tout ça à personne ? Surtout mes cousins, je sais qu'ils vont s'inquiéter ..."

Elle secoua la tête, laissant ses longs cheveux blancs mal entretenus cacher une partie de son visage. Son père savait déjà, de toute façon, ou l'apprendrait bien vite. Il serait soulagé lui aussi de ne pas devenir grand père trop vite. Peut-être que dans un monde parallèle, Kaleea aurait gardé ces petits. Mais tel quel c'était impossible.

-Kaleea-

Un autre médecin était déjà beaucoup pour la jeune louve, qui sentait le poids de ce qu'elle portait lui pesait sur les épaules. Elle voulait seulement disparaitre, ou du moins revenir avant tout ça, avant ses bêtises. Elle gémit, posant la tête sur sa couche. Elle espérait au moins que cet autre médecin, qu'elle ne connaissait pas et en qui elle n'avait aucune confiance, saurait tenir sa langue. Elle était de toute façon à la merci d'Eris, et n'avait d'autres choix que de se plier à elle en espérant qu'elle ne lui veuille pas de mal.

La louve coucha ses oreilles sur sa tête. Si cela se passait mal .... Elle ne voyait qu'une seule personne qui était au courant, et qui de toute façon saurait bien avant qu'Eris ne vienne le trouver que quelque chose n'allait pas. Elle répondit simplement, sentant les forces la quitter :

Mon père.

Eris, satisfaite, se releva alors, et vint s'allonger à côté d'elle. Sa chaleur venait conforter le flanc de Kaleea, et même si la jeune louve n'en dit rien, elle était reconnaissante de ce contact lupin, un des seuls qu'elle avait eu à part sa famille depuis bien longtemps. Elle ferma les yeux, ne réfléchissant pas à ce qu'il allait arriver, aux risques qu'elle avait prit, se concentrant uniquement sur la fourrure rouge à côté de la sienne, sur l'autre qui lui tenait compagnie.


La louve sentit son cœur se serrer. Malgré tous les mots d'Eris, elle se sentait complètement seule dans sa vie et dans son malheur. Mais cette épreuve, elle la traverseraient ensemble. Ou bien, elle ne la traverserait pas, et dans ce cas irait retrouver presque avec soulagement sa mère et son frère. Elle ne dit rien, ne laissant pas l'émotion la renverser comme elle avait pu le faire avant. Non, elle devait être forte ce soir, car le pire était à venir.

Ce pire commença doucement une demi-heure après. Elle sentit son ventre grogner, se mouvoir d'une première contraction. Puis, dans son bas-ventre, elle sentit une autre, et encore une autre, chaque fois plus forte. Alors que l'inconfort se changeait peu à peu en douleur, elle bougea un peu en gémissant, avertissant Eris qu'elle sentait les effets de ce qu'elle avait ingéré. Elle tendit le cou pour boire, et l'eau fraiche lui procura un instant d'apaisement, oasis de bien-être vite recouvert d'une tempête de douleur.

Les premiers saignements commencèrent un peu après, alors que le soleil commençait sa course dans le ciel. Au début peu importants, ils s'intensifièrent, tachant les peaux et coulant sur les pattes faibles de Kaleea. La jeune louve entreprit d'abord de se lécher avant d'abandonner, sentant son ventre se tordre et ses pattes trembler. Le sang ne s'arrêtait pas, et la cendrée sentit la peur se rajouter à la douleur. Elle allait peut-être mourir, se vidant de son sang sur le sol de cette tanière. Les yeux mi clos, elle attendait que ça passe.

Le reste de la journée s'écoula lentement. Eris faisait tout pour Kaleea, la rassurant quant à l'évolution de son corps. Si tout se passait bien, les saignements s'arrêteraient après une journée, et la cendrée n'avait pas encore passé les 12h. Alors, il ne fallait qu'attendre. Elle avait l'impression d'être une proie, que l'on vidait pour laisser la chair plus tendre aux enfants, ou bien d'assister impuissante à la punition d'Eleonore. Mais Eris, elle, gardait son calme, l'incitait à boire ou à manger, la gardait en vie. Et le calme de la médecin l'apaisait, chassant ses pensées noires.

La majorité de la journée se passa ainsi, laissant Kaleea épuisée sur le tas de peaux qui s'amenuisaient. Cependant, alors que le soleil s'approchait lentement de l'horizon, se préparant à exploser en une gerbe de couleurs chaudes les nuages autour de lui, la jeune louve sentit une nouvelle douleur se joindre à celle de son bas-ventre. Son estomac, jusqu'ici docile, se tordit, et elle ne put que se relever pour vomir ce qu'elle avait ingéré sur le sol de la tanière. Elle sentait ses pattes trembler, faillir sous son poids, et sa tête tourner et tourner, comme devant Eleonore. Elle se laissa tombe sur sa couche, sentant tout son corps se tordre et se tendre, et la peur la regagner de nouveau. Que se passait-il ? Est-ce que c'était normal ? Elle sentait sa gorge s'assécher, pourtant sa gueule salivait d'une écume blanche qui coulait le long de son cou. Elle gémit :

"Eris ..."

Mais son corps ne lui laissa pas le temps, et elle vomit de nouveau, presque que de la bile cette fois-ci, qui lui remontèrent dans le gosier et lui brula la gorge. Haletante, la louve cherchait du regard la médecin sans vraiment la trouver. Elle sentait le sol tanguer sous ses pattes, mais parvint à revenir s'allonger sur les peaux alors que tout tournait autour d'elle. La douleur était devenue puissante, sourde, comme un long sifflement dans tout son corps, et elle ne pouvait plus rien faire d'autre que de gémir. Parfois, son corps était parcouru d'un spasme incontrôlable, et elle vomissait de nouveau, comme si son ventre cherchait à expulser ce qu'elle avait avalé il y a maintenant plusieurs heures. Entre ses pattes, le saignement ne s'arrêtait pas, la laissant affaiblie et trempée de sang. Sa conscience sombrait peu à peu, sa vision tournant autour d'elle comme une nuée de moustique, et elle ne voyait plus Eris, plus les peaux, plus les bols. Il n'y avait qu'elle et sa douleur. Et, alors qu'elle luttait corps et âme contre ce mal qui la prenait, un voile noir se posa devant ses yeux, lui apportant le confort de l'évanouissement contre la douleur.