Cela faisait maintenant deux semaines, et malgré elle, la vie d'Hywel avait drastiquement changé depuis son "entrevu" avec le loup dragon.
Elle qui manquait autrefois de confiance s'était muré dans un silence douloureux. Les premières nuits, il continuait de la hanter dans ses cauchemars. La journée, il répétait sans cesse ce sketch cruel. Bien caché aux yeux de tous.
Et de son coté, la petite louve angélique comprit bien rapidement qui il était vraiment.
Un fou furieux qui savait plaire, qui savait parler et qui cachait un comportement bestial derrière un masque de sympathie.
Plusieurs fois, alors qu'elle passait au clan, elle regardait jalousement les autres loups, ceux qui avait une carrure un peu proche de la sienne qui riaient et s'amusait, car ils étaient nourrices ou médecins, plus adapté pour leur condition physique, ils n'avaient pas à autant souffrir.

En cette fin d'après midi, elle avança presque instinctivement en direction des collines. C'était peut être le pire dans cette situation. Elle avançait maintenant d'elle même vers sa propre torture. Comme si dans un certain fatalisme elle avait finit par accepter la situation. Comme si celà devenait presque "normal".

« Bonsoir, ma Petite Plume. »

A son habitude, elle ne répondit pas, baissant simplement la tête, les pattes un peu tremblante, elle ne dit rien et ne bougea pas. S'attendant à se prendre une claque ou une morsure habituelle. Toutefois, aujourd'hui le loup dragon ne semblait pas de cette humeur. Il semblait plus...joueur.

« J’ai une idée qui changera un peu de nos habituelles sessions. Nous, ou plutôt tu, va chasser du petit gibier. Au fond, les espions n’ont que peu de missions à l’heure actuelle. Le clan aurait presque plus besoin de chasseurs. Qui sait, tu seras peut-être meilleure dans ce domaine ? »

Baissant les oreilles, le regard toujours fuyant, elle répondit d'une petite voix, s'attendant à un piège. C'était même évidement, mais elle ne pouvait pas se permettre de refuser, il n'en serait que plus violent si elle refusait.

T-très bien monsieur Svalrog...

Ne bougeant pas, elle le laissa reprendre la parole, se taisant comme la louvette bien docile qu'elle était devenu.

« Comme la nuit tombe, certains rongeurs vont montrer leurs museaux. Ce sera moins difficile que de chasser en pleine journée, les proies ne s’attendront pas à un chasseur à cette heure-ci. Bien sûr, il faudra s’en tenir à du gibier modeste. Des campagnols, lapins et autres rongeurs de petites tailles sont à privilégier. De toute manière, tu serais bien trop petite pour chasser du gros gibier. »

Ne cherchant même pas à croiser son regard. Ayant peur qu'il prenne ça pour une provocation. Hywel commença par renifler un peu les alentours. Un certain malaise montant en elle alors qu'elle sentait le regard du loup dragon. Toutefois, le regard d'une espionne étant aiguisé. Elle finit par repérer au bout de quelques minutes un petit campagnol.
Avançant d'un pas feutré malgré le malaise. Ayant bien trop peur de se prendre un rouste si elle échouait. Hywel sauta sur le petit être d'une incroyable finesse. Serrant bien rapidement la mâchoire pour faire cesser les gigotement un peu perturbant du rongeur dans sa gueule.

Presque rassuré de ses capacités lors qu'elle sentit le corps du rongeur entre ses crocs. Hywel se retourna lentement vers le loup dragon.
Pas vraiment qu'elle espérait une moindre reconnaissance, mais au moins un peu d'espace et d'acceptation de son erreur.
Toutefois, ce loup était Svalrog, et nulle autre loup ne pouvait être aussi vil et borné que ce géant aux écailles de roches lorsqu'il s'y mettait. Ni une, ni deux, il s'approcha, lui arrachant sa prise avant de l'avaler d'une bouchée, le ton toujours aussi hautain et méprisant alors qu'il ajouta.

Ce n'était qu'un jeune campagnol. Une proie peu alerte qui serait sans doute faite avoir par un louveteau. D'ailleurs, tu as mis beaucoup de temps à la repérer. Recommence.

Malgré tout son aspect minable. Aux mots du brun, Hywel sentit une certaine rancœur envahir son cœur. Elle n'aurait pas été assez folle pour l'exprimer cela dit. Mais plus le temps passait, plus elle finissait par accepter son sort d'une certaine fatalité, plus Svalrog devenait détestable.
Le oreilles basses, ne répondant d'aucun mot, elle se remit toutefois au travail, essayant de retrouver une autre proie.
Dans tout les cas, elle n'avait pas vraiment le choix. La seule solution qu'elle avait était de continuer de chasser jusqu'à qu'il se lasse de lui demander.
Et alors qu'elle repéra un nouveau campagnol, se mettant en position pour s'approcher. Ses oreilles tiquèrent au bruit d'une brindille se brisant sous un poids lourd.

Mais quelle maladroite ! Même un louveteau qui apprend à chasser n’aurait pas fait l’erreur de marcher sur une brindille ! Recommence !

La fourrure un peu gonflé, elle se retourna d’abord un peu dubitative, regardant d’abord ses pattes puis celles du loup dragon, repérant sans mal a brindille brisé aux pattes de ce dernier.
Prenant son courage à deux pattes, elle leva alors un peu le museau, lâchant presque comme dans une impulsion.

Sauf votre respect Svalrog, la branche est brisé à vos pattes..

Maintenant son regard sévère avant de le baisser comme machinalement, comme si elle se rendait compte trop tard de son erreur ou de son "impudence". Elle sentit son cœur de gerbille battre derrière sa poitrine.
Certainement un moment d’égarement..
Elle ne pouvait tout de façon plus reculer, elle espérait pas prendre une trop grosse rouste.

Voyant Svalrog avancer. hywel garda sa position. Elle voulait paraître un minimum fière mais face à ses pattes tremblantes et ses oreilles en arrière, elle faisait plus de la peine. Comme bien souvent ces derniers temps.

Un frisson la parcouru d'ailleurs tandis qu'il se frotta à elle. Ses plaques d'os étaient certe une bonne protection mais elles n'étaient pas agréables...Comme si il avait des espèces de croûtes immondes sur tout le corps.
Au fond, avec un peu de recul, il n'était pas si loin des monstres qu'elle pouvait imaginer dans ses cauchemars quand elle était enfant.

Baissant alors un peu sa croupe sous le poids de sa patte, malgré sa terreur, malgré son dégoût. Hywel essaya de rester impassible et cela même si elle tremblait. Son museau se froissant légèrement, comme par reflexe alors qu'il lui susurra quelque chose à l'oreille.

« J’apprécie cet instant de rébellion. Mais fait attention à ne pas trop dépasser les limites. »

Son murmure, son odeur...
Plus que la terreur qu'il lui inspirait, elle se demandait même si il ne commençait pas à développer une obsession malsaine envers elle. Rien que d'imaginer ça, elle aurait à la limite préféré qu'il la frappe. Elle ne voulait pas de lui. Ni de sa haine, ni de sa pitié, ni de son affection.
C'était comme avoir une boule dans la gorge qui lui hurlait de chercher à attaquer ou à s'enfuir. Mais elle ne pouvait rien faire. Elle était bloqué face à lui. Face à ce monstre qui s'amusait un peu plus chaque jour à la tourmenter.
Resserrant un peu ses pattes arrière, elle se tortilla, s'extirpant un peu de son emprise alors qu'il leva la patte. Cherchant rapidement à s’éloigner de lui de son odeur.

Elle avait peur mais elle se sentait plus froide..peut être un peu plus courageuse. peut être que le dégoût était cette fois un peu plus fort que le reste.

L'entrainement est t-il terminé pour ce soir ? Elle marqua une courte pause reprenant. Demain est un nouveau jour et je suis un peu fatiguée, Svalrog. J'aimerais juste rentrer et aller me reposer chez moi si ce n'est pas trop vous demander..

Elle ne laissa rien transparaître de sa colère ou de son dégoût. Un noble savait par nature mentir et cacher ses émotions. Bien que d'habituel elle n'aurait jamais eut l'audace de demander.

Le regardant pas vraiment. Attendant une réponse, un pouffement moqueur ou encore un soupir agacé qui annoncerait d'une certaine manière sa liberté.
Hywel resta immobile, son coeur manquant de louper un battement alors qu'elle entendu le craquement des brindilles, synonyme de déplacement de l'imposant loup dragon.
Il se rapprocha de nouveau, elle chercha à s’éloigner. Mais avant même qu'elle puisse faire un pas, elle sentit son épaisse patte s’écraser sur sa joue dans une violente gifle:

« Fait attention à tes manières. Respecte les limites. »

Clignant des yeux, sentant rapidement la douleur monter contre sa joue, elle posa sa patte contre la blessure, le regard vidé, fixé sur le sol. Le corps prostré contre elle même.
Elle avait fait une bêtise et il l'avait punit. Elle avait mal mais elle n'allait pas pleurer pour ça. Dans toute cette horreur, elle était devenu plus forte. Assez pour aujourd'hui oser lui réponde. Elle devait rester forte, peut être qu'avec un peu d'espoir il finirait par se lasser, par l'oublier...peut être que..

« Pour ce qui est de rentrer chez toi. J’ai pris une décision afin de mieux veiller à ta sécurité et d’éloigner ceux qui voudraient te faire du mal de façon certaine. Maintenant, chez toi, c’est chez moi. Bien entendu, nous pouvons rentrer à présent si tu te sent fatiguée. »

N'arrivant pas à assimiler tout de suite les mots, elle ne réagit tout d’abord pas. Immobile, la patte contre sa joue, comme si elle n'avait pas entendu... Ou plutôt comme si elle n'avait pas souhaité entendre.
A vrai, seules les larmes qui roulaient maintenant abondamment sur ses joues trahissaient son esprit.
Elle secoua la tête, les paroles lui revenant comme une griffe glacé qui s'amusait un peu plus à triturer ce qu'il restait de son âme brisé.
Elle chercha à reculer mais la queue du monstre bloqua ses pattes.
Elle ne pouvait pas faire marche arrière, pas reculer, ni hurler qu'on l'aide. Car dans ce mal elle était cette fois belle et bien seule.
Elle essaye de relever la tête.

Vous pouvez pas enfin je...vous êtes chef d'armé ! et j-je suis une louve minable.... Vouloir ma protection, perdre votre temps à ça trahirais même la promesse que vous avez fait de me rendre plus forte.

Un excuse comme une autre, elle doutait fort que cela le ferait changer d'avis. Un monstre comme lui avait toujours une idée derrière la tête.
Et voler ces derniers moments de solitude qu'elle avait encore.. Si il prenait ce peu d'intimité qui lui restait elle n'aurait plus rien..

Je...s-s'il vous plait..