■ Dans les plantes mouvantes, vit un monstre gigantesque. Un loup redoutable, imposant, créé par Amiria elle-même. Cet être est le fruit d'une punition que la déesse de la fertilité infligea à une jeune louve lui ayant manqué de respect sur plusieurs points. Cet animal appelé l'Ours ou l'Ogre aurait jadis vécu dans le clan de la Terre durant 70 ans avant de s'isoler totalement. En tant que création d'Amiria, il est lié à elle et est le gardien de son espace. Quiconque fait du tort à Amiria ou fait l'affront d'arracher ses fleurs verra l'Ours le châtier.
■ Histoire écrite par Atamagahen. Personnage et images d'Atamagahen. Joué par Fracture46.

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L’Ours, tel fut le nom de celui qui aujourd’hui est aussi vieux que la terre elle-même.
Son histoire, ou plutôt son mythe, remonte à ceux des premiers loups. Alors que les dieux venaient de créer la terre et remontèrent à leur univers céleste. Que les quatre clans n’étaient que de jeunes créations.
Une jeune louve, une des premières druidesses de la déesse Amiria, se lamentait à la nuit tombée.
Elle, qui avait accordé sa vie à la naissance en ayant le cœur sur la patte, et qui aidait toute jeune mère à s’occuper de sa progéniture, cette louve fut née d’une fleur à jamais fermée. Qu’importaient les tentatives et les efforts que son instinct maternel lui dictait, la jeune louve était née stérile. Elle pria donc Amiria sans relâche, chaque soir, à la même heure, elle se tenait devant la statue, pleurante et implorante la déesse à qui elle avait consacré sa vie. Cette déesse qui, paradoxalement, l’avait punie.

Un soir, alors qu’elle continuait son rituel nocturne, Amiria lui apparut en vision. Alors que la déesse essaya d'expliquer à la druidesse que son rôle était de prendre soins des autres sans pour autant créer, la jeune louve devint folle. Elle était encore trop jeune et immature pour comprendre cette décision. Elle trouvait le choix de la déesse injuste. Alors, elle menaça cette entité qu’elle avait toujours idolâtrée, d’arracher les fleurs de sa fontaine si jamais elle devait mourir stérile.

Vexée de cet affront, la déesse accorda cependant à l’impudence un enfant : l’Ogre.

L’Ours fut le nom que les loups de la Terre donnèrent à cet être quelques secondes après sa naissance. Le louveteau était si massif qu’il tua sa mère en cherchant à sortir. Son épais pelage brun d’écorce et ses pattes énormes, l’Ours faisait à sa naissance la taille et le poids d’un louveteau de cinq mois : c’était un véritable monstre. Cependant, les loups de la Terre acceptèrent de s’occuper de l’orphelin qui venait de tuer sa mère en naissant.

L’Ours était différent de la plupart des autres loups. D’un naturel calme, il n’était ni très bavard, ni très joueur, mais il grandissait. Il grandissait à un point tel qu’à six mois, il fit la taille d’un loup adulte. À un an, il atteignit la taille d’un mètre trente au garrot avant de finir par s'arrêter à un mètre quatre vingt à l'âge de ses trois ans.

Tout le monde finit par avoir peur de L'Ours. Entre sa taille et son poids monstrueux, personne n’osait l’approcher ou le défier. Les mères racontaient à leurs petits que le loup les mangerait si jamais ils n’étaient pas sages.
Le monstre passa donc la plupart de son existence à observer à distance. Bien qu’il ne parlât que peu, il était loin d’être sot. Son rôle était celui d’être un combattant redoutable. L’Ours avait tué pour la Terre maintes et maintes fois, mais il perdit au fil des années le goût du sang. La solitude avait finit par peser sur son être. Le temps passait, emportant sur son sillage la plupart de ceux qui avait été parent, transformant ceux de sa génération en vieillards tandis que sur son visage, pas un seul poil blanc n’était apparu en plus de dix ans d'existence. L’Ours comprit alors qu’il n’était pas vraiment comme les autres, ce n’était pas spécialement à cause de sa taille ou de sa force, mais le temps ne semblait pas avoir d’emprise sur le géant. Il continua toutefois sa vie au clan, tandis que les générations défilaient, craignant de plus en plus le monstre que seul les plus vaillants ou fous osaient approcher. Il prit alors l’habitude d’être seul et solitaire, cela ne lui importait que peu. À vrai dire, les autres l’importaient peu.

Jusqu’au jour où apparut cette louve à la couleur sable. C’était une enfant farouche, une jeune guerrière que la plupart des loups de la Terre appréciait. Elle n’avait peur de rien, ni de personne, même pas de l’Ogre. Elle fut d’ailleurs la seule, pendant quelques années, à l’approcher et à lui montrer de la sympathie ou même de l’amitié. Du haut de ses soixante dix ans, il n’en fallu pas plus pour que le cœur encore immature de l'immortel succombe à la beauté éphémère de la belle. Ces années furent d’ailleurs les plus belles dont l’Ours se souvint, mais également les plus douloureuses.

Un jour, alors que la louve l’aimait déjà depuis quelques années, elle souhaita porter leurs enfants, un amour qui perdurerait dans le temps, un simple moment d’égarement. Quelques mois après leur danse, alors qu’elle pensait que cela n’avait pas marché. Elle se retrouva gestante. Tout d’abord folle de joie, le couple laissa place aux doutes et la crainte tandis qu’au fil des semaines, le ventre de la mère continua d’enfler. Ce fut un spectacle horrible pour l’Ours, alors qu’il vit son amante hurler de douleur puis succomber pour donner naissance à un enfant unique : un monstre, tout comme lui. Le chagrin et la culpabilité envahirent l’Ogre qui pleura pour la première fois. Il aurait aimé avoir une famille, mais comme si Amiria l’avait maudit, seul sang et douleur ne pouvaient naître de son ascendance.
Les loups de la Terre tuèrent le second ogre, sa naissance avait couté la vie à l’une des plus aimées du clan. L’Ours, quand à lui, le cœur brisé, partit en ermite dans la dense forêt des plantes mouvantes. Pendant des centaines d’années, il porta le deuil de la louve, son cœur lourd s'apaisant au fil du temps qui emportait tout sur son sillage.

Les loups finirent alors peu à peu par oublier l’Ogre qu’avait créé Amiria. Son histoire devenant superstition avant de devenir comte.
Cependant, l’entité existe toujours bel et bien, vivant dans sa bulle de chagrin, hors du monde depuis maintenant des centaines d’années. Ce n’est que lors de la venue d’Akui, qu’Amiria apparut au géant. Il appartenait au clan de la Terre et ne pourrait jamais en sortir sans conséquence. La déesse commanda alors à l’Ours de protéger sa fontaine et ses fleurs, de préserver la forêt de la folie des divins qui, comme elle, avait créé des monstres. À présent, le retour de l'Ours ne devrait plus être très long.


L'Ours, dessinée par Atamagahen

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