Elle était aux anges. Il y a de ça deux mois, Gaor et elle se sont retrouvés et au fil de leur retrouvaille, il lui a proposé de venir vivre chez elle, ce qu'elle avait accepté en suivant et avec un grand enthousiasme. Ensuite, il avait employé le mot compagne pour la désigner et elle lui avait finalement avoué son amour. Bien que leur retrouvaille eue un passage orageux à cause de ce qu'il s'est passé au camp de l'Eau, tout c'était formidablement bien terminé. Widys a ensuite emménagé chez son amour en fin d’après-midi, à la fin de son boulot.

Deux mois passés auprès de son amour : c'était le bonheur. Elle avait réussi à faire en sorte que Gaor la laisse soigner sa queue coupée. Ainsi que les autres blessures et cicatrices parsemant son corps. Il avait une allure plus belle à présent et ses cicatrices n'étaient plus boursoufflées. La journée, il arrivait qu'ils ne se voient pas du tout. Il a ses responsabilités et obligations de chef. Elle, elle fait son travail et puis, comme souvent, elle se retrouve accaparée par des choses. Parfois, ce fut même lui qui vint la chercher pour dormir. Ou quelqu'un qu'il envoie s'il ne peut pas. Ils dorment l'un contre, partageant leur chaleur et profitant de l'odeur de l'autre. Tout est parfait.

Ce matin, avant d'aller à sa tanière de médecin, elle partit se balader. Aujourd'hui, elle se sentait toute légère et très heureuse. Au réveil, Gaor avait été très câlin et ne voulait pas la lâcher. Elle n'avait pas remarqué tout de suite, pourquoi. En quittant le domicile et en trottinant dans le campement en chantonnant, des regards de mâles s'étaient tournés vers elle et certains l'avaient salué chaleureusement. Depuis qu'elle est en couple avec l'un des alphas, elle a fait un bon au niveau de la popularité. Enfin, elle est plus connue, c'est tout. Et certains la choisissent comme médecin par curiosité.
Elle gambadait joyeusement quand elle se fit interpeller par quelqu'un qui se mit à la renifler. C'est à ce moment qu'elle comprit. Elle avait plaqué sa queue en vitesse contre ses pattes et était partie en courant. Ses chaleurs sont là. Ça expliquait le comportement de Gaor et des mâles qu'elle a croisé. Cette fois, elle ne pouvait pas fuir le campement sur plusieurs jours. Ça risquait d'être compliqué de gérer ça. Néanmoins, elle ne se démonta pas pour l'instant et continua son petit tour.
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Elle eut à peine le temps de finir de s'installer, qu'une louve arriva à son cabinet. Elle leva la tête pour y découvrir Abby, la louve de Tanyxoth, un chef d'armée. Yogrenn n'aime pas Tanyxoth parce que pour lui, le chef d'armée est une proie. Yogrenn n'aime pas les hybrides tout court. Sauf peut-être quand ça sert au niveau du combat, comme les loups-dragon terrestres par exemple. Bref, ce n'était pas le sujet : Abby souhaite la voir.

Oui bien sûr, entrez ! Dit-elle chaleureusement.

Elle partit s'assoir sur un tas de paille et invita Abby à s'installer confortablement sur celui d'en face.

Qu'est-ce que je peux faire pour vous ?

Widys savait très bien ce qu'il s'était passé. Le drame d'Abby. Des cerfs géants qui lui foncent dessus, la piétinent et une nouvelle désastreuse : la mort de sa portée. La chasseuse avait perdu sa première portée au cours d'une balade avec son mâle... La caverne oshur avait été triste pour eux, mais surtout pour elle, quand elle entendit cette histoire. C'était un drame horrible. Quand une louve veut une portée, la perdre est quelque chose d'incommensurable. Perdre un enfant tout court, c'est profondément triste, alors tous les perdre... Il n'y a pas de mots.

Widys ne connait pas Abby plus que ça. Elle avait ouïe dire que suite à ce drame, la femelle était en dépression, qu'elle ne sortait que peu et que la relation avec son compagnon en avait pris un coup. Le médecin qui avait été appelé lors de ce jour, l'accompagna durant les jours qui suivirent. Peut-être l'accompagne-t-il encore maintenant. Ainsi, une question vint à l'esprit de Widys : Pourquoi venir la voir à elle ? Elle n'est pas son médecin, elle ne connait pas le dossier dans les détails. Si c'est pour un traitement lié à son état émotionnel, ce n'est pas sûr qu'elle puisse le lui donner. Elle ne connaît pas le traitement en cours, s'il y en a un. Mais elle pourra sans doute l'apaiser via son pouvoir.

Abby trouvait que son médecin avait beaucoup de mal pour comprendre tous ses. C'est vrai que, il n'y a qu'une femelle pour pouvoir tout comprendre. Encore faut-il tomber sur la bonne. Quelqu'un qui ne veut pas de petits, ce n'est même pas la peine. Widys voulait des petits et elle avait donc de la pitié pour Abby. Ainsi, elle pouvait comprendre le mal rongeant la chasseuse.

La chasseuse lui parla du comportement de Tanyxoth. Depuis que sa convalescence est terminée, il se fait distant, l'évite, ne lui parle pas et préfère ne pas être confronté à elle. En somme, il avait créé un faussé entre eux. Sa relation avec elle était basée sur l'indifférence. Bien entendu, la femelle ne comprenait pas ce comportement d'évitement. En voulait-il à Abby pour ne pas avoir pu garder ses petits ? Ce n'était pas sa faute, mais de ce qui c'était passé. Se faire piétiner par des cerfs géants, c'était évident que son corps ne pourraient pas garder les petits. Pas tous du moins. Des côtes furent aussi probablement fêlées ou cassées. On ne ressort pas indemne de plusieurs de ces bêtes qui vous galopent dessus.
Abby ne savait pas comment renouer le contact avec son compagnon. C'est parce que Widys est une femelle et en couple, qu'elle est venu la voir. Elle voulait discuter avec une femelle. La médecin comprenait mieux pourquoi elle est venue la voir. Elle voulait de l'aide de sa part et savoir quoi faire. Pour cela, elle ne voyait qu'une chose : les chaleurs. Elles sont là, autant en profiter. Abby ne devait pas échapper à la règle. Bien qu'en ayant perdu sa portée, ses hormones devaient être moins en ébullitions qu'à l'accoutumé pour cette fois.
Widys leva le museau. Tout en commençant à lui répondre, elle fit sonner un carillon de bois de sa patte. Les tubes de bois s'entrechoquèrent plusieurs fois en un son agréable. Elle aimait bien ce son, ça avait un côté apaisant.

Profitez des chaleurs pour ravoir son attention. Elles ne sont pas fortes, mais il sera un tant soit peu titillé par votre odeur. Vous pourrez l'attirer à vous plus facilement pour lui parler de votre mal. Vous devez communiquer et savoir pourquoi il agit comme ça. La perte de votre portée l'a forcément affecté lui aussi. Il a aussi besoin d'aide, même s'il ne pense pas en avoir besoin.

Elle marqua une pause avant de poursuivre :

Comme vous en parlez, c'est comme si vous étiez invisible. Là, il verra. Quand vos chaleurs partiront, peut-être que le fait que vous ayez discuté, amorcera une bonne ligne directrice pour la suite. A part renouer le contact verbal, je n'ai pas d'autres solutions à vous apporter.

Quelqu'un lui vient ensuite à l'esprit. Il lui semblait bien que le chef à la ramure de cerf avait un fils. Seulement, elle ne voyait pas vraiment qui il est ni comment il s'appelle. Widys n'avait vu aucun jeune ressemblant à Tanyxoth. Widys n'était pas le médecin de la famille. Du coup, elle n'était pas au courant plus que ça de tout ceci. Le chef d'armée n'avait rien à voir avec elle en plus, alors qu'elle passe à côté n'était pas étonnant la concernant.

Tanyxoth a bien un fils ? Pourquoi ne pas lui demander de l'aide ?

Abby a besoin d'aide. De toute l'aide disponible. Si ce fils est disponible, il peut tout aussi bien l'aider pour comprendre un tant soit peu l'état émotionnel de Tanyxoth. Encore faudrait-il que le beau-fils aime la belle-mère...