Début mars 270

Perché sur son piédestal habituel, Le Faucheur sentit deux individus s'approcher du cimetière. Ils ne s'étaient pas trop aventurés, restants au pourtour du territoire. Concentrés sur eux, il usa de son sens accrue pour définir l'identité des deux individus. Il s'agissait de deux membres du Désert : Okazeh la bêta et Logan, un garde. Il y a un mois, ils sont aussi passés, pour aller en direction des terres libres situés après lui. S'ils reviennent dans cette direction, c'est qu'ils rentrent. Le maître des lieux ne s'en formula pas plus et reposa la tête sur ses pattes.

Plus tard au crépuscule, le solitaire immortel se leva, s'étira, bailla à s'en décrocher la mâchoire, puis descendit de sa pierre. En direction d'un des quelques mausolées, il contourna de plusieurs mètres les deux individus. Il huma l'entrée du bâtiment de pierre et s'y engouffra sereinement, ne sentant pas l'odeur des deux claniques. Soulevant une peau de peau, il dévoila une carcasse dont il se délecta.

Lorsqu'il sortit, se léchant les babines, il vit Okazeh, marcher d'un pas lent et l'esprit semblant ailleurs, entre des pierres tombales, s'attardant sur les mots et symboles écrits.
Il semblait que les deux claniques s'était établit pour la nuit. L’attitude de la femelle montrait qu'ils sont en pause, puis Moon prendra bientôt place dans le ciel. Okazeh et Logan avaient de la chance : Rahawk n'est et ne sera pas présent cette nuit. Pas qu'il aurait fait quelque chose, enfin peut-être pas, car ça reste un lieu de recueillement et un lieu libre de passage malgré tout, mais bon, c'était mieux. Peut-être qu'Anvie, par contre, pourrait leur tomber dessus. Excédée de sa parentalité et ayant besoin d'air, il est probable que la mère sorte pour se dégourdir les pattes lorsque ses petites boules de poils dormiront profondément. La descendante d'Atamagagen et Zal est assez imprévisible lorsque quelque chose ne va pas ou qu'elle est énervée... Enfin, ce ne sera pas son problème. Les loups du Désert pourront très bien se débrouiller, d'autant plus que le mâle est imposant : il saura rivaliser face au diable de Tasmanie qu'elle est.

En regardant Okazeh déambuler, il finit par se souvenir d'un évènement en son encontre. Un évènement qui ne sera pas anodin pour elle... Puisqu'elle est ici, il pouvait le lui dire. Comme ça, elle sera déjà au courant en arrivant au campement et elle aura eu tout le trajet pour digérer un temps soit peu l'information. Il s'approcha d'elle, arrivant par le côté et vers son dos. Elle ne le remarqua pas jusqu'à ce qu'elle entende son souffle.

C'est vous (Jeff) ?

Il se décala de la stèle qui le cachait en grande partie, faisant mieux face à la louve aux petites ailes. Il ne dit rien pour affirmer son identité. Elle l'avait probablement déjà vu, la fois où Adès attaqua leur campement. Il ne se souvenait pas de tous les individus présents, ceux qui l'avait accosté ou observé du coin de l’œil durant son travail.

Bonsoir, Okazeh.

Début mars 270

Okazeh n'avait pas peur. Elle n'était pas anxieuse, ni stressée de sa présence en face d'elle. Elle avait simplement baissé la tête vers la stèle, lisant ce qui y était marqué. Tout en étant à moitié absente, elle demanda :

Désolée de marcher sur votre territoire. Nous ne faisons que passer.

Le Faucheur ferma les yeux en hochant doucement la tête de gauche à droite. Par la suite, il l'observa de nouveau et dit simplement :

C'est aussi un lieu de recueillement et ça peut être un lieu de passage. Je laisse libre accès pour ça.

Jeff est tolérant sur ces points. Même s'il s'est approprié le cimetière, puisqu'il y vit et le marque, il n'oublie pas que tous ont potentiellement des proches enterrés dans ce lieu. De plus, pour passer des tanières à la plaine savane, l'une des solutions les plus simples est de passer par-là. Il tolère moins les squatteurs qu'il va gentiment dégager quand il décide que leur temps de présence est terminé. Parfois, il fait un compromis, comme ce fut le cas avec Atamagahen, en mettant l'individu à contribution.

Le Faucheur ne dit rien de plus, laissant le silence s'installer. La bêta du Désert sembla se rappeler quelque peu son rôle sur ces terres et releva la tête. Si LaMort venait à elle, ce n'était pas pour taper la causette autour de la stèle. Est-ce qu'elle venait d'en prendre conscience ? Pourtant, elle restait calme et mélancolique. Rien chez elle ne semblait avoir changé.

Quand tu rentreras, il te manquera un proche. Non pas Aslan, ni l'un de tes petits.

Il commençait doucement de sa voix solennelle. Il lui immisçait l'idée que des individus de son entourage sont morts. Bien que ce n'était pas son Amour, ni l'un de ses petits, ça restait des êtres chers à ses yeux. Il soupira un peu et poursuivit :

Okazeh, ta mère est partie auprès de Rhéa.

Seulement, il n'y avait pas que ça. Il ne l'avait pas souligné, parce qu'il ne s'agissait pas de membres de sa famille. Deux autres proches sont partis au Royaume des Dieux. Dans les souvenirs de l'un, il y avait beaucoup vu Aslan et Okazeh. Il épargna à Okazeh la réception de trois mauvaises nouvelles d'un coup. Ça ferait beaucoup. Quelqu'un se chargera d'annoncer les deux autres morts à son retour. Il avait choisi de ne faire que le "plus important".

Début mars 270

À l'introduction de son annonce, la bêta se tendit, s’apprêtant à recevoir la terrible nouvelle.
Okazeh baissa la tête et la tristesse l’envahit. Néanmoins, elle ne pleura pas. Elle resta silencieuse, immobile, digérant cette évènement funeste. Chacun à sa façon de réagir et la louve aux petites ailes sembler bloquer, pour l'instant, ses émotions. Bien que ses pattes tremblèrent un peu. D'une voix éraillée par la douleur de cette perte, elle demanda si sa mère a souffert. Ce à quoi, Le Faucheur répondit :

Ne t'en fais pas pour l'objet de sa mort : elle est partie dans son sommeil.

La meilleure mort qui soit et la plus douce. Sa mère n'avait pas pu se rendre compte de sa fin, déjà plongée dans le sommeil. Ainsi, aucune inquiétude à avoir, elle avait pu partir sans peur.
Okazeh avait besoin d'être seule après ça. Le Faucheur ne comptait pas s'éterniser de toute manière : il ne le faisait jamais. Il n'est pas un soutient et qui le voudrait comme tel de toute façon ? Il se contentait de délivrer les messages, quand il en avait l'occasion, puis il partait, laissant la famille et/ou le veuf avec son deuil.

À présent, je te laisse. Ma tâche est terminée. Si tu souhaites placer quelque chose en son honneur ici, tu pourras le faire sans problème.

Avant de partir, il ajouta :

Sache qu'elle fut très fière de ce que tu es devenue.

Ensuite, il s'éclipsa derrière la stèle d'où il était apparue et repartit d'où il venait.