Jeremiah

Guerrier — Source

Courbettes et bonnes façons

Le déménagement des Cavernes s'était bien passé dans son ensemble. Sygrid avait marché aux côtés de son père, tandis que j'avais marché aux côtés du mien, en rentrait de notre Roi. Les missions de reconnaissance nous avais indiquée le chemin à suivre, et il n'y avait eu aucun incident durant le voyage. Les proies avaient été rabbatue sur nos nouvelles terres avec soin, par nos chasseurs, à l'insu du clan de la Source qui n'avait rien vu venir. Notre Roi avait joué là un coup de main de maître. Lorsque la Source s'était rendu compte de quelque chose, nous étions déjà parti, il était donc trop tard pour eux...

Cela faisait à présent quelques temps que nous étions installé sur les terres de nos ancêtres. Père m'avait fait part de la décision de Yogrenn que j'épouse sa fille, et il était grand temps que je m'investisse dans cette relation. Certes, je n'étais pas de ce genre de mâle mielleux et crèmeux à vomir avec les femelles. Mais ce n'était pas parce que nous étions obligés de nous unir que cela devait obligatoirement être désagréable, pour elle, ou pour moi. De plus, si je parvenais à me rapprocher de sa fille, je marquerais probablement des points auprès de notre Roi. Je n'avais pas perdu mon objectif de succèder à mon père, lorsque son temps serait révolu, mais si je voulais que cela se fasse, je devais rester dans les bonnes grâce de notre Roi.

C'est donc toujours dans cette optique de me faire bien voir par le Roi que j'avais invité Sygrid à me rejoindre à la Plaine. Je ne lui avais pas exposé d'autre motif que le fait que nous devrions commencer à passer du temps ensembles, puis que notre union allait probablement bientôt se faire, si mes calculs étaient correct, la Princesse approchait gentiment mais sûrement de ses deux ans. Et son père ne tarderait sûrement pas à exiger notre union après qu'elle ait atteint son âge adulte.

Je l'attendais depuis quelques minutes seulement lorsque je la vis enfin arrivé. Ce qui me frappa le plus, c'est qu'elle avait, désormais, plus les formes de louveteau. Non, de plus en plus, elle prenait des formes d'adulte. D'ailleurs sa taille était celle d'une louve adulte. Elle n'avait probablement pas encore fini de developper sa musculature de Caverne mais elle était belle et désirable à souhait... De plus, même si je ne le reconnaitrait probablement jamais devant elle, elle était une louve forte et déterminée, et une combattante redoutable, bien qu'encore inexpérimentée en situation réelle. J'avais pu observer discrêtement ses entrainements et ses combats... En bref, je songeais de plus en plus que m'unir à elle ne devrait pas être trop difficile en soit... Je m'inclinais vers l'avant en un signe de respect dû à son rang, puis prit la parole d'une voix calme :



Je savais que la jeune louve était caractérielle et caprieuse, et afin de gagner des points auprès de son père, je comptais bien la brosser dans le sens du poil, autant que possible...



J'attendais sa réaction, faisant bien attention à ne pas fixer mon regard dans le sien, ce qui aurait été un défit. Me soumettre ainsi à une femelle était extrêmement difficile, mais si je manquais de respect envers sa fille, il est clair que notre Roi me virerait de ses bonnes grâces sans le moindre scrupule... Alors je prenais sur moi, pour lécher les bottes de cette princesse capricieuse qui allait devenir ma compagne, du mieux que je le pouvais...

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La demoiselle arriva en retard, et cela ne semblait pas la déranger le moins du monde. Tout comme pour ma part, je savais qu'il en serait ainsi. Sygrid était une adolescente caractérielle et bornée, mais je devais m'en accommoder et faire preuve de respect envers elle, si je voulais gagné les faveurs de son père. Elle sembla dubitative alors que je la saluais avec la politesse et le respect qui sont dû à son rang. C'est sur qu'elle ne s'attendait probablement pas à ce que j'agisse ainsi avec elle. Mais je n'étais pas qu'une brute sans cervelle, et elle finirait probablement par le comprendre... Certes, faire preuve de tant de respect et faire attention à ne pas avoir de geste dominant envers cette gamine prétentieuse était clairement un défi, mais je devais tenir bon, sinon, aucune chance que je puisse succéder à mon père dans le rôle de bras-droit du Roi.

Elle semblait encore plus surprise lorsque je lui proposais de chasser ensembles. Cela ne m'enchantait pas plus qu'elle, mais je devais gagné des points, et même si je savais que comme moi, elle aurait probablement préféré se battre, je ne pouvais pas envoyer la fille du Roi au tapis, ou me soumettre à elle. Dans le premier cas je ne serais qu'une brute irrespectueuse de la hiérarchie et dans le second, un pleutre et un faible. L'un comme l'autre me ferait clairement perdre des points face à son père, ce qui n'était pas envisageable. Elle prit une profonde inspiration et lança :



Elle n'avait clairement pas pu s'empêcher de tenter de me rabaisser et de me faire savoir combien je n'étais rien à ses yeux. Qu'à cela ne tienne. Je ne comptais pas m'attirer ses faveurs à elle, mais celle de son père... C'est simplement que cette petite capricieuse et imbue de sa personne ne voyait pas plus loin que le bout de son nez... Grand bien lui fasse, et cela était tout bonnement idéal pour moi. Si elle rapportait à son père que j'étais agréable avec elle dans l'unique but de gagner des points auprès de lui, il était également très clair que je risquais de chuter de mon piédestal... Je me contentais de hocher la tête et de paraitre légèrement déçu face à ce qu'elle venait de dire, mais j'ajoutais tout de même d'une voix calme, avec une légère note d'amusement sur la fin :



Je lui adressais un léger sourire qui était un mélange d'ironie, d'amusement et de défis. Finalement, elle se leva, et c'est la queue bien droite, et la tête haute qu'elle avança de quelques pas, puis m'indiqua qu'elle acceptait finalement cette partie de chasse. Je me joignis à elle, la tête haute, la démarche sûre, mais toujours légèrement en rentrait d'elle, en signe de respect. Nous marchâmes quelques minutes ensembles, en silence, puis, je lui fis signe de prendre à droite, en silence. J'avais eu le temps de repéré les lieux et donc de localiser le troupeau avant qu'elle n'arrive. Alors que nous avancions, nous arrivâmes au sommet de la colline, je m’aplatis au sol, l'invitant poliment à faire de même, puis je m'approchais du sommet de la colline.

En contrebas, dans la vallée, se trouvait un petit troupeau de chevaux rustiques, fait pour résister au climat extrême de cette plaine. Le troupeau comportait une dizaine de chevaux, dont un bel étalon dans la force de l'âge, plusieurs juments et deux petits poulains qui devaient avoir deux ou semaines seulement. L'une des juments semblait âgée et plus lente que le reste du troupeau, mais pas blessée. Elle semblait être la proie idéale. Pas trop facile comme un poulain, mais pas trop difficile comme cet étalon qui se débattrait sûrement comme un beau diable. Nous n'étions que deux, après tout... Malgré tout, je lançais un regard à Sygrid, lui laissant l'honneur de choisir notre proie. Nous nous trouvions en hauteur, bien caché dans les herbes hautes, et de plus, nous étions sous le vent. Le troupeau ne sentirait pas notre présence avant un moment, à moins que la demoiselle ne perde patience...

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L'héritière de notre Roi accepta de m'accompagner et ne rechigna pas lorsque je lui indiquait le haut de la colline. Intelligente, il ne lui fallut que peu de temps pour comprendre que le troupeau de chevaux serait notre cible. Lorsque je lui laissais le choix de notre proie, elle prit un moment de réflexion, puis elle me désigna finalement la vieille jument qui guidait le troupeau. Au moins, elle savait reconnaître ses limites, sans pour autant se dévaloriser non plus en s'attaquant à une proie trop faible. Puis elle me signifia que je mènerai la chasse. Bien qu'étonné, je n'en montrait rien physiquement. La voilà qui se mettait même en arrière, reconnaissant que je chassais probablement bien mieux qu'elle. Elle m'étonnait de plus en plus. Mais je resterais tout de même vigilant avec elle.

J'analysais la situation afin de choisir la meilleure tactique avant de me lancer. La vieille matriarche se trouvait légèrement à l'écart du troupeau, ce qui était une bonne chose. Le troupeau était tranquille, vigilant, mais détendu, ce qui signifiait qu'ils ne se doutaient pas le moins du monde de notre présence. Il nous faudrait nous approcher le plus possible de l'espace qui séparait notre cible du reste de troupeau, afin de les empêcher de se rejoindre... Sygrid étant plus petite que moi aurait plus de facilité à ramper sans se faire voir jusqu'à se glisser entre la jument et le troupeau, puis à bondir pour faire fuir la jument dans ma direction. Au sol, j'attendrais le dernier moment pour bondir sur la jument qui foncerait droit dans ma gueule, ce qui la surprendrait, laisserait le temps à Sygrid de la rattraper et de lui bondir sur la croupe pour finir de la déséquilibrer et ensuite il n'y aurait plus que la mise à mort. J'expliquais ensuite le plan à ma futur compagne en quelques mots, chuchotés, pour ne pas alerter le troupeau et je la laissais agir.

Demeurant sous le vent, elle rampa vers le bas de la colline, tout doucement, se plaçant rapidement entre la jument et le reste du troupeau. Pour ma part, j'avançais un peu dans la descente, toujours tapit dans les hautes herbes et sous le vent, m'approchant de la jument, et me plaçant sur la trajectoire la plus probable de sa fuite. Une fois en place, il n'eut pas bien longtemps à attendre pour que le troupeau en panique se mette à fuir et que la vieille matriarche en fasse de même. Il écouta attentivement, il ne devait pas se montrer trop tôt à la jument, sinon elle changerait de trajectoire et ce serait toute la chasse qui tomberait à l'eau. Mais l'herbe le dépassait largement, l'empêchant de voir ce qu'il se passait. Les pas de la jument se rapprochaient, le bruissement des herbes également.

Soudain, je bondis en avant, me dévoilant. Je n'avais nul besoin de me montrer agressif, la jument savait de quoi il retournait. Elle savait qu'elle était une proie, autant pour la louve qui la coursait à l'arrière que pour moi, qui me trouvait en face d'elle. Elle se cabra, autant par frayeur que par tentative de dissuasion. Je pris soin de me tenir à l'écart de ses sabots, puis, dès qu'elle reposa pieds à terre, je me jetais à son encolure. Mon attaque la déséquilibra, mais pas assez. Je plantais mes crocs et mes griffes dans son encolure, m'accrochant comme je le pouvais. Puis soudain, je sentis un choc, et je constatais que Sygrid se trouvait sur la croupe de la jument qui n'avait rien pu faire, trop déstabilisée par ma présence. L'arrivée de la jeune héritière acheva de déséquilibrer la vieille jument et elle commença à chuter. Je me jetai du coté de sa chute, les crocs toujours planté dans son cou. Une fois à terre, je grimpais sur son flanc et je la maintint au sol, faisant signe à Sygrid de la mettre à mort.



J'espérais qu'elle se rendrait compte du sacrifice que je faisais pour elle. Mettre à mort une proie, c'est une sensation de pouvoir inouï selon moi, et lui céder cette place me coutait beaucoup. Néanmoins, au delà du fait de vouloir m'attirer les bonnes grâces de son père, mettre à mort sa première proie était capital, quel que soit le rang... Elle devait connaître cela au moins une fois dans sa vie. Et qui sait, peut-être y prendrait-elle goût ? Chasser pour nourrir la meute, une corvée en soit ou chasser uniquement pour le plaisir de tuer une proie et la satisfaction personnelle de manger une proie chassée soit-même, c'est totalement différent. Pour ma part, je ne chassais pas si souvent que cela, mais de temps en temps, cela faisait un bien fou, et puis ça défoulait bien...

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Tandis que j'expliquais la marche à suivre à ma future compagne, je vis très clairement son inconfort lié probablement au fait que je lui donne des ordres. Mais elle faisait l'effort d'écouter et de hocher la tête en signe d'assentiment. Puis elle mit mes consignes en exécution et parti en rampant en direction du troupeau, toujours sous le vent.

La chasse se déroula pour le mieux, personne ne fut blessé, hormis notre victime, et Sygrid n'attendit même pas que je lui fasse signe pour décider de mettre un terme à la vie de notre proie. Les loups savaient, normalement, d'instinct, ce qu'il convenait de faire dans ce genre de circonstances. Elle hésita un peu entre la gorge ou la nuque. Et finalement elle opta pour la nuque. Excellent choix, la proie garderait toute sa saveur. Elle posa une patte sur l'encolure de la jument, puis saisit sa nuque. Dans un sursaut, la jument releva brusquement la tête. J'étais prêt à intervenir s'il le fallait, mais la demoiselle se débrouilla parfaitement bien toute seule. Elle frappa la tête de la vieille carne de sa patte, pas assez fort pour l’assommer, mais tout de même assez pour la faire se tenir tranquille.

Dans les yeux de la jument, je vis rapidement briller la résignation et je sus qu'elle ne se débattrait plus. Elle avait compris que sa vie touchait à sa fin et qu'elle n'avait plus aucune chance de s'en tirer, de plus, le troupeau était déjà loin, partis sans un regard pour elle qui les avait pourtant guider si longtemps. Alors pourquoi lutter ?

Sygrid n'attendit pas d'avantage et la nuque de la jument dans sa gueule, elle se mit à tirer, posant les deux pattes avant sur l'encolure afin de donner plus de force, puis elle secoua sa propre tête et un sombre craquement retentit dans la plaine. La tête de la jument retomba mollement lorsque la princesse des Cavernes lâcha l'encolure. Puis tout le corps de l’équidé devint mou et l'odeur de la mort se rependit autour de nous. Lorsque ma future compagne releva la tête, c'était affublée d'un fabuleux sourire qu'elle me regarda. Un sourire étira également mon visage. J'avais visé juste. Mettre à mort sa première proie l'avait grisée.



Je descendit de la jument et même s'il me fallut énormément de retenue, je laissais Sygrid manger d'abord. Si elle m'invitait à manger avec elle, je ne me priverais pas, mais tant qu'elle ne me le signifiait pas, je me devais de rester à ma place. Elle était la fille de notre Roi, et par conséquent, bien au-dessus de moi dans la hiérarchie. C'était inhabituel pour moi de devoir attendre mon tour pour manger. Étant le fils du bras-droit de notre Roi, un excellent combattant et également bon chasseur, j'étais le plus haut gradés dans les équipes de chasse, j'avais facilement su m'imposer en tant que tel aussi, je mangeais donc parmi les premiers... Je m'assis un peu plus loin, lui laissant de l'espace autour de son repas, histoire qu'elle ne se sente pas menacée, attendant mon tour pour ce fabuleux festin.

Jeremiah

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Tandis que j'attendais qu'elle m'invite à manger, avec elle, ou après elle, celle-ci se mit à manger avec avidité et bonheur. Un fin sourire étira mes babines en la regardant manger, bien que la faim me tiraillait l'estomac. Après quelques morceaux, sa tête émergea de la carcace, pleine de lambeaux de chairs et elle déclara consternée :



Sa tête replongea aussitôt dans les entrailles de la bête, mais elle ne me quitta pas des yeux. J'espérais bien que ce qu'elle voyait lui plaisait, mais je ne fis aucun commentaire. Je ne voulais pas gâcher mes efforts fournis afin de nous rapprocher un peu, avec un commentaire qu'elle pourrait mal prendre... A mon tour, je plongeai mon museau dans les chairs encore chaudes et mangeait.

Lorsqu'elle releva à nouveau la tête, elle se lécha les babines, puis se frotta le museau dans l'herbe afin d'enlever le plus possible de sang. Elle se retourna vers moi et lança :



Je lui adressais un sourire un brin charmeur tout en hochant la tête, signifiant mon accord, alors qu'elle me lançais un regard appuyé. Puis elle fit demi-tour et s'en alla en direction des tanières et je la laissais faire sans la retenir. Je mangeais encore quelques morceaux de ma proie, puis estimant avoir assez manger, je décidais de rapporter la proie au camp. Les proies étaient limitées, on ne pouvait pas se permettre le luxe de laisser une carcasse à moitié mangée, pourrir dans la plaine, alors qu'elle pourrait nourrir plusieurs loups du clan. Une fois mon butin rapporté et offert au clan, je m'en allais.