• La Forêt des Rêves Bleus

Ébène faisait les cent pas dans la petite clairière où avait eu lieu sa rencontre avec la petite Stella la semaine précédente. Le vampire était intrigué par cette jeune louve si noble par son comportement! Elle n'hésitait pas à se sacrifier, semblait-il, si la cause en valait la peine. Elle avait bien donné son sang à un inconnu affamé, vampire qui plus est! Heureusement, cette fois, Ébène avait 'déjeunait' plus tôt dans la matinée d'un louveteau du Clan de la Terre. Maintenant, cela faisait bien une dizaine de minutes qu'il patientait - certes, il était en avance ! L'impatience, que voulez-vous... - et sursautait à chaque bruit, nerveux et impatient. Secouant ses larges ailes blanches et écarlates, signe démontrant de sa nervosité, il huma enfin dans l'air une odeur humide qu'était celle de la brume. Rassuré, immobilier s'assit et regarda dans la direction de la senteur, heureux de revoir sa nouvelle amie.
- Je t'attendais.

Ébène fut surpris par le comportement de Stella puis sourit en songeant que ce n'était quand même qu'un louveteau de un an. Ce prêtant au jeu, il s'arc-bouta et, ouvrant ses grandes ailes, il se mit à la poursuite de la fugitif d'un coup d'aile.
- C'est ce qu'on va voir!
À tire d'aile, il la rejoint et la fit tomber en aggripant son bassin par ses pattes en gardant toute fois ses griffes cachées ; il ne se battait pas, il jouait. Comme le louveteau qu'il n'avait pu être à cause de son enfance volée, il la fit rouler sur le dos avec douceur et, mi-sautant, mi-volant, rejoint sa tête où il mordit joyeusement l'oreille de son amie.
- 1 à 2! Je te rattrape!

Ébène eût le souffle coupé lorsque Stella bondit sur elle et le cloua au plus de toutes ses forces. Après s'être fait malicieusement mordiller le dos, le vampire capitulaire, essoufflé :
- C'est bon, tu as gagné!
Alors la jeune louve se coucha alors sur le torse d'Ébène. Ce contact était doux, étrange. Jamais Ébène n'avait été aussi proche de quelqu'un. Étrange, certes, mais agréable. Surtout avec Stella.
Lorsque la louve se dégagea de leur étreinte, Ébène leva la tête, déçu. Mais il vit que Stella avait juste besoin de se nourrir, et, un sourire tendre aux lèvres, il appréciation son retour qui le réchauffait. Cet instant était purement merveilleux et Ébène aurait voulu qu'il ne s'arrête pas. Là, il n'y avait plus que Stella et lui. Le monde s'effaça autour d'eux, les laissant dans une béatitude méritée.
Ébène ne sur combien de temps dura leur étreinte mais lorsqu'ils durent se dégager l'un de l'autre, Ébène fut légèrement surpris par ma fraîcheur environnante. Le temps avait passé. Ébène sourit et demanda :
- As-tu déjà voler dans les airs?

Ébène vit que Stella montait sur son dos, impatiente. Le grand loup noir rit de bon coeur et lui dit :
- Je doute d'arriver à voler si tu empêches mes ailes de bouger ainsi!
Alors la louve redescendit, déposa les restes de son repas sous la statue du Dieu Dalnar et chercha quelques baies. Ébène pensa qu'elle était hyperactive et qu'en grandissant elle deviendrait plus sage et aguerrie. Lorsqu'elle s'arrêta sagement devant lui, il sourit et cala ses épaules avec ses pattes. Alors, il la tint fermement mais sans moins de douceur avec sa gueule en tenant la peau élastique de son cou. Comme un aigle tenant une souris entre ses serres. D'un coup d'aile sec et rapide, Ébène bondit du sol.
La journée était magnifique. Le soleil brillait intensément sur un ciel bleu azur. En-dessous du couple volant s'amassaient les arbres de la Forêt, dont là brise estivale faisait trembler leurs longues feuilles saphir.
Ébène portait Stella sans trop de difficultés, autant grâce à sa force qu'au poids encore tout léger du louveteau qu'était Stella. La promenade dans le ciel était revigorante et le vampire ne vit le temps passer tant il était heureux et s'amusait comme un enfant.

L'euphorie de la louve emplit Ébène. Il se mit à faire des loopings, des saltos, il voulait impressionner cette petite louve déjà si chère à son coeur. Lorsqu'elle entreprit de chanter, le coeur du vampire s’emplit de sa douceur et sa plénitude. Il se sentait si bien en présence de Stella... c'était sa seule amie, et il ne voulait pas la perdre. Il voulait la chérir de tout son être et se demandait si son sentiment était réciproque. Lui-même se mit à accompagner la douce mélopée d'un hurlement mélancolique. Leur choeur était telle un rayon de soleil traversant des nuages d'orage. Tandis que la chanson d'une tristesse et d'une douceur sensibles attendrissaient les coeurs, le hurlement d’Ébène les remplissaient d'une harmonie et d'un calme étrange. Les deux troubadours improvisés volaient ainsi dans le ciel en égayant les âmes en peine qui passaient sur leur sillage.
Lorsqu'Ébène dut se poser, non parce que Stella été trop lourde mais parce que ses ailes fatiguaient d'un si long voyage, Ébène tut son chant et descendit doucement. Lorsqu'il se posa, ses membres étaient engourdis mais son âme paisible. Il se sentait bien, calmé.
Levant le museau pour voir où ils avaient atterris, il s’aperçut qu'ils étaient à l'orée de la forêt et avaient traversé tout le bois en vol.
Ébène sourit à Stella.
- Pas trop fatiguée ? demanda-t-il à son amie.

La douce mélopée m'envahit accompagnée d'un sentiment de mélancolie. Il promena son regard sur les alentours lorsqu'un hoquet de surprise l'envahit. Il s'écria, coupant court à la chanson pourtant si belle :
- Regarde !
Une griffe pointait dans la direction indiquée, Ébène ne bougeait plus. A quelques arbres près s'étendait une zone de terrain vague. Mais le vampire reconnaissait au marais qui se découpait dans le lointain que c'était là l'emplacement jadis de la Grotte aux Souvenirs, terre appréciée par Pandore l'Impératrice. Si Ébène n'avait pas été si aguerri, il se serait mis à trembler. Les loups de tous clans, à la fin de la guerre et à la mort de la louve maudite, avait détruit la Grotte à coups de pattes, de griffes, de pierre et par fracas de pouvoirs. La caverne ainsi démoli, plus personne n'avait osé allé de nouveau sur cette terre dite maudite.
Le vampire jeta à regard à sa nouvelle meilleure amie. Que faire ? Ignorer et passer chemin ? Ou traverser la terre battue, déshonorant les morts de Pandore ?

Je hochai la tête. Stella avait raison, cet endroit ne m'inspirai rien qui vaille. L'air était saturé d'une étrange énergie, une sorte d'aura malfaisante qui me fit frisonner. Pour pas que la jeune louve à mes côtés ne le voit, je fis semblant d'ébrouer mes ailes ; il ne fallait pas qu'elle ne croit que je suis une mauviette ! Je balayai l'air de la queue, nerveux, et lui lançai :
- Nous ferions mieux de partir.
Je la pris par la peau du coup et m'envolai vers la Forêt d'où nous venions.