Ray avait passé la nuit blottit contre Yoru, comme d’habitude de toute façon. Elle était toujours la truffe dans son pelage quand il s’agissait de dormir. Elle avait bien conscience que c’était un peu étrange, surtout qu’il son frère et sœur. Mais la présence de son frère la rassurait beaucoup plus que celle de son père ou de sa mère. Pourtant elle aimait énormément ses parents. Néanmoins elle n’y pouvait rien si elle était plus proche de son frère de Kaleea que de ses aïeux. En levant le museau, la femelle observa la tanière désertée par ses parents, sa sœur, et Drakili. Son frère dormait encore comme une masse à ses côtés et cela la fit sourire. Elle espérait que dans l’avenir Yoru se trouverait une compagne qui le mérite vraiment, sinon Ray risquait de toute façon de l’en protéger. Elle savait déjà qu’elle serait capable de se montrer mauvaise si on s’en prenait à Yoru ou Kaleea.

Sortant silencieusement de la tanière, la petite louve observa le paysage autour d’elle. A la recherche de sa mère. Dont elle était plus proche de Deenos. Après tout Triss avait toujours été aux petits soins avec ses enfants, alors forcément ça crée des liens. Et puis Ray aimait beaucoup observer sa mère. C’était un de ses passes temps favoris quand elle n’avait pas envie de faire quelque chose en particulier. Remuant lentement sa longue queue dont les poils devenaient si longs qu’elle songeait à les attacher. C’était de pire en pire cette longueur, ça la fatiguait presque.

Elle décida d’ignorer cet embêtement en roulant des eux et en s’éloignant de la tanière pour se promener un peu. Comme ils avaient bien grandit, maman les laisser avoir plus de liberté et d’espace pour bouger. Ray avait donc visité la totalité du camp et avait déjà parcouru la forêt des Lys de Feu, principalement pour se jeter dedans et se rouler sur le dos comme une idiote. A ce souvenir un sourire effleura ses babines avant que la voix d’une nourrice ne lui fasse dresser les oreilles. On venait de la saluer. Elle se retourna et hocha la tête en souriant calmement. Elle n’avait toujours pas prononcé un mot, de sa naissance à aujourd’hui, elle avait gardé le silence.

Pas qu’elle ne sache pas parlé, bien au contraire, mais elle ne veut pas vraiment communiquer avec les autres membres de sa meute. Ce n’est pas qu’elle ne les apprécie pas. Seulement, elle sait que les mots sont un problème. Du moins de son point de vu. Ils peuvent portés à interprétation, être déformés, répétés alors qu’elle n’a pas envie que ses dires se répandent partout. En plus les mots peuvent être blessants, ou mal exprimés sous la colère. Alors oui, parler, ça ne la tente pas plus que ça. Et puis les mots ça se mélangent dans sa tête, ils s’entrechoquent et la blase en finalité. Pourtant il y a des choses qu’elle souhaiterait dire. En traversant le campement elle remarqua l’absence de sa mère. Elle huma alors l’air, ayant prit l’habitude de suivre sa génitrice, il lui était devenu facile de repérer son odeur et de la suivre. Au début ça avait été une véritable horreur, dès qu’elle la perdait de vue, elle se perdait elle-même. Mais en grandissant c’était devenue beaucoup plus facile. Elle pencha la tête, se demandant si le rang de pisteuse existait dans la meute. Pour retrouver quelqu’un de perdu, un fugitif, ou un condamné. Faudra qu’elle demande aux grands chefs.

S’éloignant du camp pour suivre la piste de sa mère. La jeune louve s’éloigna au petit trot, puis au galop pour se dégourdir les pattes. Ralentissant au cours de sa route avant de marcher calmement en apercevant au loin la silhouette de sa mère. Un sourire effleura ses babines, elle s’arrêta pour regarder la louve qu’elle trouvait des plus belle et élégante. Elle ne lui ressemblait pas au niveau morphologique. Ray était plus large et un peu plus charpentée. Même si elle ne restait pas désagréable à observer. Du moins elle l’espérait. Le bruit de l’eau lui parvint et en s’approchant un peu elle découvrit une superbe cascade. Ses yeux brillèrent sous le spectacle alors qu’elle s’était arrêtée juste à côté de Triss, mais en laissant un peu d’espace entre elle. Ray ne savait pas où elle était arrivée, ni depuis combien de temps elle était parti. Elle avait juste cherché sa mère et elle l’avait trouvé. C’était tout.

Elle s’assit calmement, observant la femelle, elle tourna la truffe vers elle avant de reposer ses yeux sur la cascade. Le bruit du liquide était assourdissant, mais pas désagréable pour autant. Elle se sentait très fière d’avoir retrouvée Triss, même si elle espérait ne pas se faire gronder par la louve. Ça lui gâcherait sans doute son plaisir et le reste de sa journée. Après tout, Ray supporte très mal de se faire gronder sans raison. Quand c’est pour protéger quelqu’un ou qu’elle a réellement fait une bêtise elle ne bronche pas. Elle ferma les yeux et poussa un soupir, avant de souffler à peine.

« Je vous admire mère… »

Avoua-t-elle d’une voix douce et chantante, très calme et presque pure. C’était les touts premiers mots de sa vie. Elle ignorait si Triss l’avait entendu, où si le bruit de l’eau avait absorbée sa voix et masquée ses mots si bien qu’elle n’aurait pas été entendu par la louve. Ou peut être que Triss avait entendu un morceau de phrase, mais pas la phrase complète. A moins que la femelle ai seulement perçu un murmure indéfini et flou, pas de mots, juste un son qui se perd au milieu des autres. Elle ne savait pas, mais si Triss n’avait pas entendu Ray, était prête à se répéter.

Assise prêt de sa mère, Ray attendait une réponse, ou une réaction. Mais celle-ci ne vint jamais. Un peu déçue, la femelle baissa les oreilles. Elle ne savait pas si sa mère avait ignoré ses paroles, parce qu’elle n’en avait peut être rien à faire, ou si la cascade avait avalé ses mots. Mais elle restait triste au fond d’elle. Elle savait qu’il était dur de vivre avec une loupiote qui ne parle pas, et un petit qui est toujours difficile à intéressé. Mais Ray aimait énormément son père et sa mère, et se sentait énervée de ne pas avoir été entendue ou de ne pas avoir eut de réponse.

La femelle se sentait particulièrement frustrée. Les oreilles en arrières, elle ferma les yeux. Sinon elle allait finir par partir en battant de la queue, courroucée. Mais elle ne devait pas se laisser envahir par ce sentiment d’injustice et de mal être. Elle entendit alors la question de la femelle à son coté et dressa à nouveau les oreilles avant de poser son regard sur la femelle. Elle roula ses épaules sous son épais pelage comme pour les hausser et roula des yeux. Il fallait en comprendre qu’elle était blasée ou agacée par quelque chose. Dans l’instant c’était plus une lassitude profonde qui la traversait. Elle observa la louve, parler ne marchait pas, sa voix n’était pas assez puissante, et les bruits autour la couvraient trop.

Elle se mit à faire les cents pas à côté de Triss, puis derrière elle, réfléchissant. Elle voulait se faire comprendre, oralement, pour une fois. Parler ne l’intéressait pas. Dire des choses pour au final ne rien en retenir et n’en garder aucune trace morale était risible, si ce n’est complètement stupide aux yeux de la femelle. Elle continua de faire les cents pas avant de s’immobilier et de tourner la tête vers Triss, une idée venait de lui traverser la cervelle.

Triss avait toujours su jouer avec ses enfants. Du moins aux yeux de Ray, elle savait aussi bien jouer que Yoru, qu’elle adorait profondément d’ailleurs. Elle se mit alors en position de jeu et recula. Espérant que Triss allait suivre et répondre à sa demande muette. Elle recula encore, jusqu’à disparaître derrière les fourrées. Elle savait que sa mère faisait souvent exprès de perdre quand elles jouaient ensembles. Et pour cette fois, ça allait être utile. Elle attendit que Triss soit suffisamment éloignée de la cascade pour bondir à ses côtés. Mais sur le moment elle se sentit ridicule et stupide, elle se rassit alors violemment dans la terre avant de détourner la tête en mettant les oreilles à l’horizontal. Triss devait avoir honte d’avoir une fille pareille. Elle soupira et se coucha sur le ventre avant de mettre une patte sur son museau en poussant un autre soupir. C’est trop dur de s’exprimer, c’est trop dur de parler, pourquoi ça ne sort pas naturellement ?

Elle se mit à sangloter comme une idiote, se sentant misérable et honteuse. Ses petits couinements et ses sanglots à moitié étouffés par sa nature silencieuse. Elle avait les oreilles totalement basse et se frotta le museau du bout de la patte avant de chercher à se calmer.

« Je… veux juste lui dire… que c’est la meilleure… De toute les mamans… Et que je l’admire… vraiment… beaucoup…C’est pas si difficile… Pourquoi j’y arrive pas ? »

Demanda-t-elle à voix haute sans se rendre compte que le surplus d’émotions l’avait poussé à parler et non à seulement le penser. Sa pensée était sortie naturellement. Ses mots étaient exactement les pensées qui c’étaient bousculées dans sa petite tête. Et cette fois, comme elle gémissait un peu, elle parla plus fort entre ses hoquets. Permettant à sa mère de l’entendre très distinctement.