Mon annonce s'est bien prise en général, enfin je suis en un seul morceau quoi. Vu la réaction du grand loup des cavernes cela aurait pu se terminer de bien d'autres manières à mon avis. Il devra rapporter à Gaor que l'alliance perdure. Et ça se sera seulement après être passé par le camp du Feu et de l'Air.

Je regarde mes pattes avancer dans la végétation, pensif. Je me sens de moins en moins fébrile depuis que j'ai quitté le camp de la Terre. Je remonte mes pupilles brunes vers le loups devant moi, c'est le même loup m'ayant emmené avec ses bois dressés sur la tête. Je me sens moins sur mes gardes qu'à l'allée en sa présence et mon pas et plus détendu ainsi que mon visage. Je regarde une énième fois ses cornes et trébuche par mon manque d’inattention. Je m'écroule, menton en avant dans une léger jappement de surprise. Je me relève et le rattrape en quelques foulées, ma gueule se tordant de gêne. Quelques secondes plus tard, ma chute est oubliée et je finis par lancer un peu avec hasard et surtout de bonnes intentions.

-C'est étrange ce que tu as sur ta tête.

Je ne le vouvoie plus, comme si j'aurais pu laisser ma conscience professionnel à son camp. Après avoir rempli ma mission de messager dans ce territoire je ne suis plus qu'un chien de l'Eau. Je ne l'ai pas totalement terminé, il reste Amélia. Je lance un regard autour de nous, je dois voir la louve âgée de tout à l'heure.

Amélia avait réussi à semer le loup qui la suivait. Yogrenn allait être furieux, mais ça n'avait plus d'importance. Elle avait ce besoin impérieux d'en apprendre plus sur la vie de son fils. Cela faisait des années qu'elle n'avait plus vu Gaor, qu'elle ne l'avait pas serré dans ces pattes. Elle l'aimait, c'était son fils. Elle avait besoin de savoir comment il allait. Elle voulait en apprendre plus sur sa vie. Comment avait-il fait pour devenir alpha su clan de l'eau ? Il avait dû se montrer courageux. Non Gaor était courageux. C'était un enfant extra, plein de bonté et d'une volonté sans faille. Il était curieux et joyeux. C'était une bonheur de s'en occuper. D'ailleurs avait-il lui-même des enfants ? C'était possible. Gaor était largement en age d'avoir une compagne ou un compagnon.

L'idée que Gaor soit heureux entouré d'une famille et d'un clan rendait Amélia particulièrement heureuse. Elle avait réussi quelque chose, que son fils ait une vie heureuse, même ailleurs.

Après être sorti du clan, la louve avait mis un certain temps à perdre son chaperon. Elle avait eut très peur de ne pas retrouver le messager. Il était probable qu'il ne soit pas seul. Tanyxoth, le grand chef d'armé avait du l'accompagner. A plusieurs reprises, Amélia pensa les avoir perdu. Mais elle les rattrapa néanmoins non loin de la frontière. Si Yogrenn apprenait qu'elle était allé jusqu'ici... Elle n'osa pas imaginer les conséquences.

Elle vit au loin, les deux silhouettes qu'elle poursuivait. Elle cria :

-ATTENDEZ !

Amélia s'était mise à courir. Elle était épuisée et avait peur de ne pas réussir à les rattraper. Quand elle arriva à leur hauteur, elle était transpirante et haletante. Depuis quand avait-elle réellement couru comme ça ? Son poids n'aidait pas.

-Attendez...

Amélia reprit alors plusieurs longues respirations. Elle devait absolument se remettre à courir plus souvent. Alors qu'elle était encore largement essoufflée, elle demanda :

-S'il vous plait, Monsieur le messager, dites moi comment va mon fils... Dites moi comment va Gaor..

C'était la simple question d'un mère qui s’inquiétait de la vie de son enfant. Mais quelque part, elle avait terriblement peur. Le chien pouvait tout simplement partir, il n'avait aucune raison de lui répondre si ce n'est celle de la pitié.

-Ce sont des bois, un héritage très précieux dans ma famille.

Oh ! Un héritage de famille. Curieux comme héritage. Le seul héritage physique que je possède de mes parents est mon pelage bleu de mon père et brun de ma mère. Je tourne mon museau vers la forêt qu'il me montre.

-Continuez dans cette direction et vous arriverez à la frontière avec le désert, longez le à l'ouest, vous irez chez les Air en suivant le fleuve, à l'ouest et vous irez vers les Feux, bonne route messager.

Je ferme un instant mes paupières pour mémoriser ses paroles. Je passerais d'abord chez les Airs pour délivrer mon message puis terminerais par les Feux pour enfin rentrer à mon camp. Cette idée me fait sourire, j'ai hâte de retrouver ces visages familiers.

-Merci beaucoup.

Je baissa légèrement la tête en signe de respect et d'adieu mais une voix s'éleva derrière nous.

-ATTENDEZ !

Je pivote et fixe avec des yeux ronds le loup peinant à courir jusqu'à nous. Une louve plutôt, et celle qui est probablement Amélia. Le fait qu'elle soit enrobée ne doit pas l'aider, j'ai soudain légèrement pitié d'elle. Peut être que dans sa jeunesse elle m'aurait même dépassé à la course.

-Attendez...

Je m'avance vers elle, elle reprend sa respiration. Une lueur inquiète brille dans mon regard, elle n'aurait pas dû se surmener ainsi.

-S'il vous plait, Monsieur le messager, dites moi quand va mon fils... Dites moi comment va Gaor...

J'écarquille les yeux et reste bouche bée. C'était évident ! Comment ai-je pu passer à côté de ça ? La vague de surprise passant, un sourire plein de compassion écarte ma gueule. Elle transpirait la maternité, une mère qui se soucie de son fils bien qu'il soit dans un autre clan. Elle semble si démunie en cet instant que je referme ma bouche avant de répondre spontanément. Je coule un regard derrière moi, le cerf est là. Je me doute que dire haut et clair que Gaor se remet de blessures qui n'ont pas été énoncé au camp n'est pas la meilleure des idées. Cela me dérange mais la mère devra attendre quelques secondes avant ma réponse, bien que sa question était toute légitime. Je me tourne vers le mâle en lui offrant un sourire gêné.

-Je suis désolé mais je ne peux me permettre de repousser mon retour à mon clan de quelques minutes. Cette louve peut accompagner mon voyage sur quelques mètres pour que je la rassure.

Pour appuyer mes paroles je me met en marche, d'un pas lent mais décidé pour permettre au loup bicolore de répondre et à la louve de me suivre. Juste quelques mètres, justes quelques secondes. Il me semble primordial de parler à la femelle mais je ne veux pas que des oreilles nous entendent. Je préfère prendre des précautions inutiles que des risques énormes.

Quand le messager évita de lui répondre, Amélia sentit un énorme désespoir s'écraser sur ses épaules. Elle voulait juste être rassurée. Juste savoir qu'au moins un des enfants était vivant et heureux car elle ne l'était pas. Incapable de se retenir, la louve sentit des larmes lui monter aux yeux. Ses yeux la brûlaient. Elle avait déjà trop pleuré aujourd'hui et dans sa vie en général.

-Je suis désolé mais je ne peux me permettre de repousser mon retour à mon clan de quelques minutes. Cette louve peut accompagner mon voyage sur quelques mètres pour que je la rassure.


Amélia eut peur qu'il ne veuille pas prendre le temps de lui parler. Puis quand elle remarqua le regard du messager envers le chef d'armé, elle se posa intérieurement la question: est-ce que le messager ne voulait rien dire devant lui ? Elle n'en était pas certaine.

Bien que je ne doute pas de votre confiance, je ne peux laisser madame seule sans protection, dans ces conditions tendues que nous donne Akui.

Alors que Tanyxoth était en train de répondre au messager, Amélia s'avança et barra sciemment le chemin du messager. La louve n'était pas très impressionnante avec son air essoufflé et son surpoids. Mais elle mesuré bien plus 10 cm que le chien. Elle le regarda avec un air suppliant. Si le messager ne voulait pas lui répondre directement, c'est que Gaor avait un problème. Un problème suffisamment important pour le faire taire aux membre du clan de la terre.

Cela voulait donc dire que Gaor n'était pas en bonne santé ? Que se passait-il pour lui ? La louve pensait qu'il était en bonne santé, qu'au moins quelque chose se passait à peu prêt correctement. Mais cela n'avait pas l'air d'être la cas. Amélia avait-elle était une si mauvaise mère ? Incapable de protéger ses enfants, incapable de se protéger elle-même. Cette fois, s'en était trop.

La pauvre louve était devenu pathétique. Elle pleurait et répéta seulement :

-Je vous en supplie, je ne vous demande qu'une seule chose. Dite-moi comment il va !

Sans compter que les conséquences des actes d'Amélia risquait d'être terrible. Elle avait fuit la vigilance des sbires de Yogrenn et se trouvait au bord de la frontière. Si elle mettait ne serait-ce qu'une patte en dehors, elle ne pouvait pas imaginer les conséquences.

KANTUA

Je retiens une grimace à la réponse du mâle, c'était évident. Mon pas étant d'un coup plus lourd se stoppe quand la louve se place devant moi. Je fait presque un pas en arrière et la dévisage, surpris. Son regard plongé dans le miens me sers la gorge, retenant mes paroles de sortir. Elle a l'air sur le point de fondre en larme mais pourtant ses yeux humides ne laissent aucun pleurs s'en échapper. Elle semble désespérée, j'imagine sans mal qu'elle a dû être une mère tendre et aimante envers ses petits. Je prends une longue inspiration, est ce que je ne risque rien en parlant de l'état de Gaor ? Je glisse un regard hésitant vers Tanyxoth, est ce que c'est raisonnable ?

-Je vous en supplie, je ne vous demande qu'une seule chose. Dite-moi comment il va !

Sa voix me fit l'effet d'une morsure au poitrail. Ma gorge semble tellement se tordre que je ne fait même plus attention de reprendre une goulée d'air. Une vague d'empathie me prenait une nouvelle fois aux tripes. Tellement forte que je laisse de côté mon dilemme intérieur. Je m'approche d'un pas vers elle, si ce n'était pas une noble j'aurais surement eu une réaction plus tactile et laxiste. Je plonge enfin mon regard dans celui que je tentais de fuir, préoccupé. Je parle d'une voix pressée et basse mais mes mots roulent dans ma gueule avec douceur dans le but de la rassurer.

-Gaor a était blessé par Akui, il a perdu un œil et une patte. Mais il se remet. C'est un loup fort, il ne laissera pas ses blessures handicaper ses fonctions d'alpha.

Me doutant de la dureté de ma première phrase pour sa mère, je m'étais dépêché d'enchaîner avec une voix se voulant réconfortante. Je laisse un moment avant de me pencher pour que seule Amélia entende, car maintenant j'étais certain de son prénom, délivrant enfin mon dernier message.

-elle est vivante et en a quatre.

Je me recule pour la regarder, attendant un signe pouvant m'affirmer qu'elle est comprit.

Le chien fit un pas vers elle et la regarda enfin dans les yeux. Il se mit à parler d'un voix rapide mais se voulant douce. Inconsciemment, Amélia s'était arrêté de respirer.

-Gaor a était blessé par Akui, il a perdu un œil et une patte. Mais il se remet. C'est un loup fort, il ne laissera pas ses blessures handicaper ses fonctions d'alpha.

Elle le regarda sans pouvoir émettre le moindre son. Elle était comme paralysé. Son fils, Gaor. Il était blessé. Il avait affronté Akui et avait perdu un oeil et une patte. Son coeur se serra brusquement et lui fit terriblement mal. Quand Gaor avait quitté le clan, elle avait continué de se bercer dans l’illusion qu'il avait pu échapper à une vie malheureuse. Mais ce n'était manifestement pas le cas.

Le messager enchaina rapidement, sans laisser le monde d'Amélia s'effondrer un peu plus.

-elle est vivante et en a quatre.

Amélia reprit alors une brève respiration et eut un cris du cœur :

-Oh mon dieu.

Elle le répéta plusieurs fois tout en réalisant quelques pas sur le côté. Elle finit par s'effondrer, incapable de se tenir debout sous le poids de l'émotion. Elle était choquée.

-Oh mon dieu...

Son fils était blessée, amputé, profondément mutilé... Et Mya était vivante. Rien que de prononcer le nom de sa fille dans ses pensées la fit frémir. C'était le nom maudit, la parias. Elle était vivante ... Et surtout elle était devenu mère. Cette image fit un bien fou à la louve. Mya avait dû trouver l'amour de sa vie, elle devait être heureuse. Elle avait eut quatre louveteaux. Comment allait Mya ? Comment avait-elle nommé ses enfants ? Qui était son compagnon ?

Les questions se bousculaient dans l'esprit de la louve, tout comme les larmes qui s'étaient mises à perler. C'était un jour horrible, mais par ces quelques mots, le messager avait redonné de la force à Amélia... Mais surtout de l'espoir.

Yogrenn pouvait corrompre, détruire ou anéantir tout ce qu'il avait autour de lui, mais la liberté finirai toujours par refleurir ailleurs. La tête de la louve était devenu lourde et la terre semblait vaciller. Son cœur battait à tout rompre sous la joie, la colère et la tristesse de ces nouvelles.

Elle finit par tourner la tête vers le messager, réalisant un effort afin se pouvoir croiser son regard.

-Merci.

C'était tout ce qu'elle pouvait dire. Elle aurait aimé en apprendre plus, lui poser des questions pendant des heures, retrouver ses enfants qu'elle aimait temps. Mais elle savait très bien que tout cela était impossible. Cela serait dangereux.?Surtout pour eux. Parfois aimer se résumer à disparaître de la vie de ceux que l'on aime. Et c'est ce que compter continuer de faire Amélia. Juste ne pas exister.

Je fit un pas en avant, retenant presque un léger cri de surprise quand ses pattes vacillèrent sous son poids. Je n'ose pourtant pas lui offrir mon aide pour se relever, son regard semble bouleversé et elle a bien l'air incapable de se relever sur des pattes vigoureuses en cet instant, et certainement aussi car c'est une noble. Si je suis un chien d'un autre clan, je reste incapable de rester neutre face à un visage blessé. C'est la raison qui fait que je n'aurais jamais pu être guerrier, ça et mon gabarit fin et petit. Je retiens ma respiration quand je vois son visage se tourner vers moi pour que son regard effleure le mien, ses yeux humides sont profonds d'émotions, de sentiments, de sens.

-Merci.

Je n'arrive même pas à articuler un mot, la gorge serré devant cette femelle qui semble si vulnérable en cet instant. Alors je baisse la tête bien bas, le museau touchant presque le sol et remue légèrement ma queue en fermant mes paupières pendant quelques secondes. Un geste silencieux et empreint de respect qui souhaite lui témoigner de ma considération pour elle. Je me relève doucement avant de me tourner vers le garde, le visage encore marqué par la réaction d'Amélia. Je reviens vers lui dans un pas pressé et lance un regard préoccupé à la louve, est-elle entre de bonnes pattes dans son clan ? Cela ne me regarde pas.

-Je voudrais te remercier de m'avoir emmené à votre camp et de m'avoir laissé lui parler.

Cette fois c'était un remerciement qui lui était directement adressé, certain ne m'aurait certainement pas laissé m'approcher d'une noble. Je lui fait un petit signe de tête respectueux en reculant déjà vers le bord de la frontière. Je m'arrête pour la dernière fois sur le territoire des Terres pour adresser ce même mouvement, presque formel si on oubliait mes manières amicales prononcées, à la femelle.

-Amélia.

C'est en prononçant son nom sans atténuer mon accent, presque écorchant sa prononciation dans ma gueule, que je leur tourne le dos pour reprendre ma marche vers les Airs.

Le messager du clan de l'eau était d'une grande politesse et ne fit aucun commentaire par rapport à l'état d'Amélia. Il se mis à parler au chef d'armée, mais la louve n'écouta pas. Elle était trop occupé à se remettre de ses émotions. Des larmes coulaient de ses yeux sans qu'elle puisse vraiment intervenir. C'était des émotions trop fortes pour être contenu dans son corps. Il lui faudrait du temps.

Le clanique de l'eau la salua simplement. Amélia lui répondit par un sourire alors que des larmes roulaient sous ses yeux. Kanta avait gagné le soutient de la louve. Amélia n'avait guère de pouvoir, mais si un jour elle pouvait l'aider. Elle le ferait.

Le messages finit par se mettre en route. La louve resta silencieuse en le regardant partir. Elle aurait aimé être libre comme lui, mais cela ne serait jamais le cas. La frontière était bien pire qu'un mur invisible. La franchir était synonyme de douleur et désespoir.

Le chef d'armé finit par venir la saluer. Ce geste la fit sourire. Il n'y avait plus que les jeunes pour la respecter de cette façon. C'était un bon loup. Il était gentil et intègre. La petite nouvelle du clan l'avait bien trouvé. Ils formaient un beau couple.

-Il le faut.


Elle n'avait pas d'autre choix que de rester enfermé. Elle ne finirait jamais à s'habituer à cette vie... Elle repensa à Yogrenn. Celui-ci devait être fou de rage. Amélia était sorti de ses griffes pour quelques heures. Un de ses sbires devait la surveiller a vu de son état. Amélia allait peut-être porter de nouveau des louveteaux. Elle était bien vieille pour être de nouveau mère. Elle regarda Tanyxoth. Si celui-ci la raccompagnait, Yogrenn pourrait se faire des films. Il rentrerait dans une colère démoniaque et risquerait de s'en prendre à lui.

Amélia se releva doucement, l'esprit abimé par les dernières informations et le corps meurtrie de la matinée. Elle finit par répondre au chef d'armée :

-Il vaut mieux que je rentre seule.

Elle regarda le loup-cerf droit dans les yeux et ajouta :

-Tanyxoth, je ve vous remercie pour ce que vous avez fait aujourd'hui. Mais par pitié ne dites à personne que j'étais avec vous et que j'ai pu parler au messager. Cela doit rester un secret absolu. Puis-je avoir votre parole ?

Une fois qu'elle fut certaine que le loup ne parlerait pas, la louve se mit lentement en route vers le camps. Elle devait profiter de ces derniers instants de liberté... Peut-être qu'elle pourrait chasser. La louve s'était levée avec cette idée, autant la réaliser.