C'est seulement car tu es dragon

Comme toujours levé à l’aube et d’humeur tranquille, le dragon que j’étais avait quitté son nid douillé avec le soleil levant. J’avais envie de me dégourdir les pattes avant d’aller prier. Il fallait aussi que je vois Gaor. C’était important pour moi. Il fallait que je lui parle de cette tension palpable dans le camp. Elle n’était pas bonne pour nos loups. La tension créait la compétition et celle-ci laissait les plus faibles derrière et rendait les forts plus qu’insupportables. Secouant mes ailes je m’envolais pour passer un petit moment dans les airs.

A la demande de Nansaa j’avais pris des nouvelles de son fils et j’avais assisté les guérisseurs. Le petit n’avait pas encore reprit connaissance. Il était toujours dans un étrange sommeil, mais ne semblait pas avoir conscience de ce qui se trouvait autour de lui, ce qui m’inquiétait malgré moi.

Continuant ma promenade au sol, j’avais finit par sentir une présence et mon regard glissa vers l’arrière. La femelle qui me suivait pensait-elle que je ne la voyait pas ? Ce n’était encore qu’une loupiote et je savais qu’elle n’avait toujours pas de mentor. Elle n’était pas discrète, ni dans ces geste, ni dans sa respiration. Elle ferait fuir une biche même si elle se tenait à l’écart. Mais je restais tranquille et continuait ma route comme si je ne la voyais pas. Enfin, si ça lui faisait plaisir de croire qu’elle était discrète, il faudra que je lui montre qu’elle ne l’est pas autant qu’elle ne l’espère.

Lorsqu’elle arriva vers la statue de Moon face à laquelle je m’inclinais, je disparu dans les ombres quand j’arrivais. Le soleil n’était pas encore assez haut pour illuminer la totalité de l’endroit. La femelle se mit à me chercher, remarquant que je lui avais faussé compagnie. Ma discrétion au travail je me posais derrière elle dans un silence de roi avant de sourire, ma queue s’agitant lentement dans mon dos tandis que je regardais la femelle.



Je repliais calmement mes ailes sur mon dos en observant la femelle. Elle devait sans doute être un peu agacée que je lui ai faussé compagnie et que je sois passé derrière. Mais je voulais lui montrer que je l’avais repéré, et qu’elle était bien loin de ma discrétion. J’avais voulu être espion avant de me lancer sur la voie de la sagesse et des dieux. Et j’avais les bases du métier. Il faudra qu’elle apprenne, son père est bien meilleur que moi, et je suis sur qu’il saura très bien lui enseigner.

C'est seulement car tu es dragon

Calmement derrière elle, mon regard la parcours. Je ne connais pas la mère de la femelle, mais elle a les ailes de son père. Le dragon ressort bien. Mais je sais que Nansaa n’apprécie pas cette espèce. J’ignore pourquoi d’ailleurs lui qui en ai pourtant un et qui a la puissance dévastatrice de son espèce. Mais il semble refouler sa nature ce qui semble également lui causer des souffrances.

Observant la femelle qui semble m’ignorer, j’entends sa remarque et penche la tête. Si elle espère me faire tomber amoureux c’est peine perdu. Je suis dix fois plus vieux qu’elle, j’ai déjà eut plusieurs vies, et je sais qu’elle n’es pas mon type de femelle. Elle peut sans doute être une amie très chère, et encore, je ne cherche pas vraiment l’amitié. Juste la paix et la douceur, mais elle me semble loin d’avoir ces qualités. Quoi que, je peux me tromper, et comme toujours, je ne cherche pas à la juger. Entendant ensuite sa question suivante je la rejoins pour m’asseoir à ses côtés, rabattant ma longue queue sur mes pattes.


Oui j’étais inquiet pour son frère et je l’admettais ouvertement. Il méritait autant de douceur et de bienveillance que n’importe quel autre individu. Mon regard se déposant sur la femelle, je l’observais avec douceur, un regard simple et sans émotion, preuve que je ne veux pas qu’elle lise en moi.



Mon habitude à vouvoyer toujours ici bien présente. Dame Saladem mérite autant de respect que n’importe quelle femelle, et ce peut importe son caractère. De plus ce n’est pas une femelle désagréable, juste un peu trop sûre d’elle. Enfin, de ce que je peux observer. Pour ma part je suis plutôt simple et n’apprécie pas de manipuler les autres, alors je déteste en retour que l’on me manipule. C’est l’une des rares choses qui me met vraiment en colère.

C'est seulement car tu es dragon

Calmement assit face à Moon, mon moment de paix et de prière vient de me filer entre les pattes. Déranger par la présence de Saladem, je n’ai pourtant pas le cœur à l’envoyer promener. De plus je ne tiens pas à entrer en conflit. Mais disons que son attitude est fortement dérangeante. Mon calme plat et ma tranquillité sont olympiques, j’ai bien vu le sourire de la femelle, mais je ne l’apprécie pas tellement tant je ressens la fausseté en lui. Moi qui suis honnête dans mes sentiments, je mets mes oreilles à l’horizontal et regarde la louve.


Autant la couper tout de suite dans ses désirs de conquêtes. Je sais comment elle est, les loups du clan ne parlent que de la descendance de Nansaa depuis son arrivée. Et Saladem est connue et réputée pour faire tourner les têtes, mais ça ne fonctionnera pas avec moi.

Ce que je cherche c’est de la sincérité, de sentiments sincères qui ne sont pas joués ni cachotiers. Et enfin elle a ce que je veux quand je parle de son frère, soit, elle se noircit, mais rien de plus normal à mes yeux. Zelvect est son frère après tout, un membre de sa famille. Comment pourrait-elle ne pas être touchée par ce qui arrive à ce jeune loup ? A sa question je fus presque outré. Pour qui d’autre que lui sinon ? Je lève les yeux au ciel en soupirant.



Je lance un coup d’œil à la femelle, puis finalement lui donne un petit coup de museau pour qu’elle redresse la tête. Elle ne doit pas s’apitoyer. Moi qui suis mort tant de fois pour revenir autant de fois seul et perdu… Je comprenais mieux que quiconque la douleur que la perte d’un être cher créait en nous. C’était un vide impossible à combler, douloureux, et profondément assassin. Je penchais alors la tête en observant la femelle.


Je crois que souvenir que le jeune loup n’aime pas les êtres abattus qui se plaignent pour un rien. Si sa sœur se met à se plaindre pour lui c’est vraiment un comble. Si Zelvect l’apprenait à son réveil il risquait également de lui faire comprendre son désaccord par rapport à cela. Mais à mes mots suivants elle retrouve joie et entrain, et sa peine et sa douleur me paraissent alors mensongers, envolés et volatilisés par mes mots. Peut-on si vite oublier nos soucis et notre peine en si peu de secondes ? Pour ma part cela m’est tristement impossible.

Puis elle me réponds, son voyage c’est bien passé, elle me remercie de m’en inquiéter, et me parle de son goût pour voler. Ça, le clan entier le savait, combien elle aime voler. Elle devrait sans doute être messagère pour se servir de ses ailes comme moyen de transport, elle serait alors utile au clan, et en plus de cela elle pourrait voler à loisir. A sa question je soupir et lance un regard à la statue de Moon, qu’est ce que j’aurais aimé pouvoir être aussi silencieuse et stoïque qu’elle à cet instant présent. Il est vrai que j’aime voler, et le souvenir agréable de ma soirée avec Kantua me traversa. Mais voler avec la fille de Nansaa me faisait-il vraiment envie ? Je regardais la femelle et fit calmement rouler mes épaules sous mon pelage.


Oui, sans doute, quand tu seras plus grande, plus mature, et surtout moins … Comment dire cela ? Pimbêche ? Non ce n’était pas le terme. Mais je volerais avec toi, quand tu ferais cela de manière désintéressé. Quand ça sera un désir sincère qui veut passer du temps avec une personne qu’on aime, et non juste pour mêler deux choses… Je vole en solitaire où avec ceux que j’aime vraiment, mais malheureusement, tu n’en fais guère partie jeune louve.

C'est seulement car tu es dragon

Ma queue caressant calmement l’air, je la vis passer devant moi et l’écoutais en rabattant les oreilles sur mon crâne et en relevant les babines. Je n’aimais pas sa proximité. Et en écoutant sa remarque un soupir m’échappa alors que je secouais doucement la tête en me demandant comment cette petite avait été élevé par ces parents… Pour en faire autant il fallait vraiment qu’elle est un problème affectif…


Oui, dans cette vie là il allait seulement avoir deux ans. Mais c’était déjà beaucoup pour lui qui voyait le temps défiler depuis bien plus longtemps. Il mourait, revenait, puis mourait de nouveau. C’était un cycle sans fin, insupportable et lassant don il souhaitait souvent se débarrasser. Il voulait que cette vie soit la dernière et pour cela il voulait choisir sa compagne avec beaucoup de temps et en calculant si elle était vraiment faite pour lui ou non. En tout cas une chose est sur ça n’était pas Saladem qui allait réussir à l’avoir dans ces filets.

Elle n’était pas du tout son genre de femelle, surtout qu’elle était dragon et qu’il n’avait pas envie d’avoir une compagne comme lui. Il tenait à la différence, au mélange des races. Si tant est qu’il puisse se mélanger, chose don il n’était absolument pas convaincu. Dans l’une de ses vies il se souvenait ne pas avoir pu avoir de descendance, et cela pouvait très bien recommencer.

Il entendit la femelle gronder et faire la gueule comme si ce qu’il disait ne lui plaisait pas. Il haussa vaguement les épaules et leva les yeux au ciel. Il fallait qu’elle comprenne que tout ne se passait pas toujours comme elle le souhaitait. Que parfois les choses se faisaient différemment que selon ses envies, et que râler ne changerait rien.

Il l’entendit ensuite lui dire de se mettre à prier et cette fois il lâcha un grondement, franchement exaspéré par son comportement. Sa queue fouetta violemment l’air dans son dos alors que ses ailes vibraient d’agacement.



C’était sorti dans un sifflement draconnique alors qu’il se retenait de grogner d’avantage. Qu’est ce qu’elle pouvait être casse pieds cette gamine. Il s’approcha de la statue et se rassit avant de rabattre sa queue et d’incliner complètement la tête, commençant à prier calmement. Laissant les minutes et le silence s’écouler dans la paix et la tranquillité qu’il était en train de retrouver grâce à sa prière et à la présence rassurante qu’il sentait émaner de Moon mais que Saladem ne sentait sans doute pas.