Le grand mâle blanc fut perché toute l’après-midi sur son haut piédestal rocheux. Il profitait des rayons du soleil encore chauds, car nul doute qu'ils partiraient bientôt pour laisser place à la fraicheur de l'automne, puis la froideur de l'hiver. Après un faon en guise de repas et une poussée de la patte pour faire chuter la carcasse tout en bas de l'espèce de pic rocheux, le grand mâle blanc s'était octroyé une sieste. Une longue sieste qui dura des heures. Quand il rouvrit les yeux, ce fut à cause d'un énorme corbeau qui s'amusait à lui tirer les poils avec entrain. Les poils ainsi récoltés, serviront à un nid pour le corbac solitaire et compagnon du loup. Soupirant, il essaya de se rendormir, mais voilà que son ami à plume vient lui tirer l'oreille. Tapant de la queue, le loup finit par grogner et se redressa. Il envoya un regard mauvais au corbeau qui se contenta de croasser puis de monter sur le dos du loup blanc. Après un bâillement à s'en faire décrocher la mâchoire et un étirement, il observa le ciel qui lui paraissait bien gris par rapport à tout à l'heure. Bien que le ciel avait baissé en clarté, des nuages gris le peuplaient à présent. L'air était aussi plus humide, il le sentait à présent. Sans nul doute, qu'il allait pleuvoir d'un moment à l'autre. Une goutte vient s'écraser sur la truffe noire du mâle. Il passa sa langue dessus pour l'en sortir. D'autres gouttes suivirent çà et là, tombant à côté de lui, sur lui, et même ailleurs dans le cimetière. D'abord pas très dérangeante, la pluie se fit de plus en plus rapide. Il se leva d'un coup et descendit avec prudence de son perchoir, la pluie ayant le don de rendre la pierre glissante.

Jeff trottinant, la pluie tombant grassement, le corbeau prit finalement son envol. Le mâle devait se trouver un mausolée et vite, pas trop chiant à ouvrir ou même déjà ouvert. Il fallait qu'il se mette à l’abri. Pas question de rester sous la pluie. Seulement, il devait d'abord slalomer entre plusieurs mètres de tombes avant d'en trouver un. Il soupira de nouveau. Il était trempé... Au moins, il n'avait pas besoin de bouger de chez lui pour se laver. C'était le bon côté de la chose.

C’est vous l’habitant des lieux ? C’est un peu lugubre pour une tanière…

Il s'arrêta à l'entente de cette voix et tourna la tête vers l'origine du bruit. D'un air blasé, il scruta l'individu originaire du clan du Feu. Il avait mal choisi son jour pour débarquer en ce lieu. Peut-être voulait-il un renseignement ? Quoiqu'il en soit, Jeff n'avait guère envie de discuter sous la pluie.

Pourquoi cette question ? J'ai pas le temps de discuter sous la pluie.

Puis, sans attendre de réponse, il reprit sa route en trottinant en direction du premier mausolée à quelques mètres de là. Celui-ci n'avait pas de porte, ce qui était parfait. A l'encadrement de la porte, il se secoua vivement, débarrassant son pelage d'un maximum d'eau qui giclèrent contre la pierre de la sépulture. Il s'y engouffra un peu plus, prit au passage un os qu'il avait laissé là et prit place sur un cercueil de marbre gris installé au centre du mausolée. S'y allongeant et l'os entre ses pattes, il commença à le ronger. Il savait pertinemment que l'individu du Feu était encore là-bas. Deux possibilités s'envisageait ensuite : soit il partait, soit il venait le rejoindre... Bien que Jeff lui ait mis un vent, certains n’hésitaient pas à insister...

Comme il le pensait, le loup du Feu l'avait suivi. Il pivota ses oreilles vers l'avant, lui lançant un regard dur du coin de l’œil. Il devra se le coltiner jusqu'à la fin de la pluie, ou jusqu'à ce que l'un d'eux ne décide de partir. Jeff n'avait aucune envie de mettre la truffe dehors. La pluie tombait en trombe, frappant les pierres, générant un bruit constant. Entre sortir pour changer de mausolée et rester ici avec de la compagnie, le choix était vite fait. Il n'y avait plus qu'à espérer que cette personne ne soit pas une vraie pipelette, sinon tant pis, il se jettera sous l'eau. Et en plus, l'individu bouchait le passage en restant assis comme un idiot à l'entré du mausolée, sous la pluie battante.

On m’a dis que vous étiez proche de la mort. Vous pourriez peut être m’éclairer.

L'os se brisa en deux entre les mâchoires du loup blanc. Allons bon. Qui lui avait dit ça ? Il lança un regard indéchiffrable en sa direction. Savait-il qui il était réellement ? Auquel cas, il récoltera des données sur l'informateur de ce loup du Feu, pour aller lui-même lui remettre les pendules à l'heure. Il n'avait guère envie de voir des jeunots se précipiter en son territoire pour espérer voir Le Faucheur ou lui parler. C'était déjà arrivé par le passé. De plus en plus de jeunes venaient à sa rencontre. Le cimetière était devenu une vraie attraction. Il avait dû mener une vendetta contre les informateurs pour arrêter tout ça. Les détails vous seront passés, mais vous attirer les foudres de Jeff n'est clairement pas une excellente idée. Il était donc, hors de question que cela arrive de nouveau. S'il avait pu garder une couverture quasiment parfaite depuis qu'il exerçait, c'est bien parce qu'il prenait soin que ceux sachant qui il étaient réellement n'en disent rien et emporte le secret dans leur tombe.

- Tu n’as jamais trouvé absurde la peur de la mort ?
- La peur de la mort est quelque chose de naturelle. Si certains individus ne l'ont pas, tant mieux pour eux.

La peur de la mort était quelque chose de naturelle, se manifestant dans des moments critiques, quand on vieillit ou simplement quand on y pense trop. Et bien qu'il y en ait qui disent ne pas avoir peur de la mort, en règle générale, cette peur se manifeste au moment fatidique de leur existence. Quand la Mort vous tend les pattes, vous ne pouvez pas dire que vous ne ressentez rien. À défaut de la peur, il y a eu moins une appréhension quelconque. L'appréhension de ne pas savoir ce que l'on va devenir après ce cap. Réincarnation ou néant ? Quand notre vie s'éteint, continuons-nous de vivre ailleurs ? Ou sommes-nous simplement effacés à tout jamais, incapable de voir et ressentir de nouveau ? La mort s'est la finale, le sommeil s'est l'entraînement. Seulement, les rêves et le réveil, tu ne les auras guère. Une phrase que Jeff prononce souvent entièrement ou en partie aux gens, lors de leur départ généralement, quand on lui pose des questions. En l’occurrence, Jeff n'avait pas peur de mourir et il pouvait clairement s'en vanter, pas comme certains (bien que des personnes à part n'aient réellement pas peur de le mort, tout comme lui). Cette terreur ne l'affectait plus depuis bien des décennies, étant lui-même le symbole de votre fin de vie. Il se savait immortel en tout point, rien ne pouvait le tuer, sauf lui-même. Alors, si un jour il décide de donner sa place, peut-être aura-t-il peur de lui-même le moment venu. Seulement, ce jour n'est pas près d'arriver. Non pas, car il avait peur de s'affronter lui-même, mais simplement parce que Rhéa et Éléonore l'avaient choisi. Si un jour il doit donner sa place, alors ce sera la décision des déesses. Mais à présent, il était bien trop expérimenté et proche d'elles pour qu'elles le remplacent. Peut-être lui accorderont-elles cette faveur s'il leur demande ? En tout cas, tant qu'il avait Odine, Chérubin, quelques vampires, ses amis fantômes et qu'il se plaisait dans ce pays qu'il connaissait par cœur, il restera là, faisant son travail et gouvernant le cimetière, un royaume peuplé de morts dont l'existence ne s'était pas achevée.

Cassant de nouveau son os, puis avalant un morceau, il leva finalement la tête vers Reymsaa. Il cessa son activité pour l'observer de son air ennuyé. Ce loup n'était clairement pas venu pour simplement rendre visite à un ou plusieurs disparus. Il l'avait cherché, il l'avait trouvé et il l'avait suivi. Maintenant, il était là, face à lui, bouchant l'entrée du mausolée et il ne comptait pas bouger. C'est donc qu'il y a bien une raison à tout ceci. Ce loup n'était pas venu depuis le clan du Feu dans l'unique but de lui poser une question. Ou alors, c'est qu'il avait beaucoup de temps à perdre pour ne récolter qu'une seule réponse.

Qu'est-ce que tu veux réellement ?

Bien que la pluie l'empêchait de faire autre chose, il aurait pu dormir ici, sombrant dans le sommeil grâce au bruit adéquat pour ça de le pluie. Au lieu de ça, il avait à faire à quelqu'un. Il avait intérêt à être direct et clair dans ses propos. Jeff n'avait guère envie d'avoir quelqu'un qui tourne autour du pot face à lui.

La première réponse de Reymsaa fit hausser un sourcil à Jeff. Il ne chercha pas le pourquoi de cette réponse, il n'en avait que faire. Seulement, si c'était sa seule réponse, alors il n'allait pas pouvoir l'aider comme ça. Il n'avait guère envie de se lancer dans un semblant de philosophie. Il voulait quelque chose de clair et précis.

En fait j’ai beaucoup de questions qui me traversent l’esprit et je pense que tu peux répondre à certaines d’entre elles. Mais je doute que tu le veuilles, néanmoins qui ne tente rien n’a rien.

Beaucoup de questions... Jeff soupira et eut un regard ennuyé. Cela signifiait que cet individu ne partira pas de sitôt. Il était définitivement bloqué avec lui. Voyons le bon côté : ça va m'occuper jusqu'à la fin de la pluie... Certes, il pourrait refuser de but en blanc et le renvoyer d'où il venait : Reymsaa lui en donnait la possibilité. Néanmoins, il n'avait vraiment rien à faire par ce temps pourri... Alors autant rendre service. Ce n'est pas vraiment comme si beaucoup de personnes venaient ici pour converser avec lui. Pour une fois, il pouvait bien s'accorder un temps de sociabilité. Il lança un simple "Très bien" au jeune loup du Feu et lui accorda son attention.
Le loup noir se redressa, s’asseyant. Comme s'il n'y avait pas assez de luminosité, il empêchait à présent celle-ci de pénétrer facilement dans le mausolée. Néanmoins, ce léger changement de lumière ne l'affecta guère. Au contraire, Jeff se fondait un peu plus dans l'ombre et ça lui allait parfaitement. Le loup noir resta à l'ouverture, n'osant pas rentrer, appréhendant sans doute la réaction du maître des lieux. Jeff ne dit rien.

Est-ce vrai que les dieux peuvent ramener un loup à la vie ? Pourquoi une partie de la population doit-elle mourir plus tôt qu’une autre ?

Il était temps de donner un petit cours sur les divinités qui lui sont chères. Pour lui, elles n'étaient pas de simple divinités, elles étaient aussi ses supérieurs. Des supérieurs qui toutefois n'étaient pas exigeantes et le laisser faire son travail comme il l'entendait.

Éléonore et Rhéa jugent. Rhéa réincarne ou détruit l’existence suivant le jugement final. Le comportement et les actes ne sont pas anodins. La manière dont on vie est jugée à la fin de notre existence. Si tu es jugé comme une personne nuisible, comme Pandore pour citer la plus populaire, tu ne pourras jamais refouler ces terres ni aucune autre.

La réponse paraissait peut-être désagréable, voir un tantinet cruelle. Mais à bien y réfléchir, c'était bien justifié. Pourquoi remettre sur Terre quelqu'un qui risquait irrémédiablement de reproduire la même déviance ? Après tout, il n'y avait pas tant de personne qui étaient si nuisible que ça. Les vies sont regardées de A à Z et la plupart ayant commis des écarts, l'ont fait à cause d'un ou plusieurs incidents. Leur âme pouvait tout à fait être lavée, remise à zéro, pour permettre une nouvelle vie, sauf cas exceptionnels. Les cas comme Pandore sont punis à juste titre. Les personnes atteintes d'une quelconque maladie mentale sont sans doute plus délicates à évaluer. En tout cas, ce boulot ne revenait pas Jeff et il ne savait pas entièrement comment fonctionner les déesses sur cette phase de jugement. Il n'avait que des suppositions à fournir. Il continua d'un air détaché :

Crois-tu que les immortels sont heureux tout au long de leur existence ? Chacun d'eux à déjà pensé à la mort. Les vampires sont une race à part. Ils ont été créé tel quel. Dans un but précis ou non, je n'en sais rien. Je ne peux pas non plus te dire si les premiers sont issus d'une malédiction ou d'une génétique particulière. Mais ça ne signifie pas qu'ils sont nombreux, au contraire. Outre les vampires, il en existe qui le sont par le biais d'une malédiction ou car c'est leur pouvoir. Mais ils sont encore moins nombreux. Quoiqu'il en soit, être immortel peut faire rêver, mais ce vœux n'est pas à prendre à la légère.

Les immortels n'ont plus aucune famille, du moins leur actuel famille n'a plus rien à voir avec eux. Pour ceux auxquels Jeff pensa, ils sont bien trop anciens pour se sentir encore membre de leur propre famille. Leurs proches sont décédés. Leurs amis sont décédés. Ils n'ont plus qu'une seule option : apprécier leurs semblables et devenir amis avec eux au besoin, même si à la base ce sont peut-être des ennemis. A quoi bon se lier d'amitié avec des mortels pour finalement les voir se dégrader et partir ? Cela fait bien longtemps que le grand loup blanc avait arrêté de se lier avec des mortels. Il ne voulait plus être attaché à l'un d'eux et devoir le voir vieillir, parfois même être oublier de lui et apprendre sa mort. Ce détachement émotionnel envers les vivants lui allait parfaitement. Il avait la chance d'avoir des proches et amis parmi les fantômes du cimetière et ça lui suffisait amplement.

Fixant le vide depuis tout à l'heure, depuis la deuxième partie de sa réponse en vérité, il soupira. Il cligna des yeux, semblant revenir à la réalité et sortir de cette pseudo déprime dans laquelle il s'était plongé. Il posa son regard de nouveau blasé, ennuyé, sur Reymsaa, attendant la suite de son questionnement.

Le jeune clanique restait dans son coin, écoutant les réponses de Jeff. Au moins, c'était fort appréciable d'être écouté. Il ne parlait pas pour rien. Attentif à ses dires, il n'aurait sans doute pas besoins de répéter les choses. A chaque question, Jeff y répondait quasiment en suivant. Après tout, il n'avait pas besoins de réfléchir beaucoup pour délivrer des réponses qu'il connaissait de toute manière ou non. S'il ne savait pas, il ne tournait pas autour du pot, comme pour la question suivante concernant Rhéa et Éléonore :

Je ne sais pas. De toute façon, la réincarnation ne se fait pas du jour au lendemain, mais dans plusieurs années, sauf cas très rarement exceptionnel, dans un but précis. Et puis, la réincarnation est une remise à zéro totale, donnant un nouvel être.

Jeff savait très bien pourquoi il lui posait cette question. C'était en rapport avec son défunt frère. Le loup du Feu ne devait pas se faire d'illusion : il ne le reverra jamais. Ils pourront peut-être être de nouveau frère, dans un futur plus ou moins lointain, mais sans aucun souvenir de cette vie-ci. Peut-être qu'ils se détesteront, s'éloigneront l'un de l'autre ou au contraire, seront très proches. Quoiqu'il en soit, c'est fini pour cette vie.

La réponse qu'il donna ensuite au sujet des immortels, fit réfléchir Reymsaa. Tandis qu'il fixait un point invisible, le grand loup blanc se remit à croquer son os. S'occuper avec ça était un bon passe temps. Cela fit d'ailleurs penser à Jeff qu'il lui faudrait arpenter les terres en quête d'os à ronger. C'était son dernier et ronger était un passe temps qui lui plaisait bien. En plus, plus ils sont gros, plus de temps ça occupe. Celui-ci était petit et se cassait facilement... D'ici quelques instants, il l'aura mangé.

Une nouvelle question vient. Une question logique, à réponse facile. Néanmoins, le jeune loup l'avait posé alors qu'il connaissait déjà la réponse. Pour le coup, il était plus en quête d'une affirmation que d'une réelle information. Cela ne dérangea pas Le Faucheur qui n'aurait pas à servir une réponse explicative. Finissant de mâcher et d'avaler un morceau d'os, il répondit ensuite :

Oui, c'est possible. Sauf peut-être certaines malédictions.

Les malédictions, il y en avait peu. Peu avait le savoir et l'essence magique nécessaires pour le faire. Bien souvent, les êtres capables de donner une quelconque malchance ou malédiction sont les religieux, car ils ont une proximité divine qui renforce plus ou moins leur pouvoir. Mais aussi, car ils sont susceptibles de connaitre certains rites et incantations. Ou alors, simplement, car c'est le but même du pouvoir octroyé. Quoiqu'il en soit, à ce jour, aucun être maudit n'est encore sur cette terre et ce depuis le commencement. Du moins, maudit par un mortel.

Jeff sentit une profonde tristesse émanait de son interlocuteur. Comme un glaive, la nouvelle était tombée, réduisant ses espoirs à néant de revoir un jour son frère. Même en fantôme, il ne pourrait le croiser, car son âme avait été conduite aux déesses pour un repos méritait. Il lui restait, néanmoins, les souvenirs de cet être adoré ainsi que les rêves qui pourraient potentiellement l'inclure. Perdre un être de cette façon était quelque chose d’irréversible.
Le loup du Feu se reconcentra sur Le Faucheur, souhaitant poursuivre la conversation. Au fil de la conversation, il sembla oublier son frère, pour l'instant, pensant sans doute à ce qu'il allait demander de plus.

- Serais-tu, toi, capable de maudire un être vivant ?
- Peut-être bien.

Il posa sur Reymsaa un regard indéchiffrable. Était-il capable de le faire ou non ? Jamais il n'aurait la véritable réponse. "Peut-être", c'était très bien comme réponse. Ça imposait le doute. Soit, il bluffait et il ne pouvait pas le faire, soit, il laissait entendre qu'il en était capable. Quoi qu'il en soit, ce n'est pas avec son regard ou son faciès que le loup du Feu aura la réponse. Jeff était un maître dans l'art d'être indéchiffrable, quand son caractère n'était pas parasité trop intensément par celui de son interlocuteur.

- Les dieux agissent-ils de temps à autre parmi les vivants, ou y envoient-ils des loups qui seraient alors comme leur subordonnés ?
- Les religieux sont faits pour ça... Bien qu'il arrive qu'ils entrent en contact avec d'autres. Tu connais l'histoire du "Royaume des dieux" ? Si tel est le cas, alors tu as déjà des réponses à certaines questions.

Faire référence à cette histoire était une manière habile d'empêcher Reymsaa de poser d'éventuelles questions comme : Pourquoi ne reviennent-ils pas parmi nous comme Akui ? Pourquoi nous laisse-t-il nous entretuer en des guerres ? Pourquoi ne vivent-ils pas parmi nous ? Pourquoi ne rentre-t-il pas en contact avec nous ? Et d'autres. Tant de questions que Jeff n'aurait pas besoins de répondre par le biais de cette histoire véridique. Bien qu'à travers les âges, certaines informations ou détails sur leur monde ont pu être modifiés ou oubliés, ce qui est normal, le récit restait dans sa globalité inchangé.
Jeff balaya les morceaux d'os restant du revers de la patte. Les morceaux tombèrent de la structure en marbre, se fracassant au sol en pierre, se brisant encore pour certains. Il avait regardé les morceaux chuter et atterrir d'un air morne. Il soupira. Voilà, maintenant il n'en avait plus.

La réponse de Jeff concernant sa possible capacité à lancer des malédictions, sembla amuser le loup du Feu. Il hocha simplement la tête et ne fit aucune remarque. Ensuite, il se leva et s'étira. Quand Le Faucheur lui parla du "Royaume des dieux", Reymsaa ne répondit pas, mais le remercia. Pourtant, il avait bien entendu cette question, c'était sûr, vu l'attention qu'il portait à son interlocuteur depuis le début. Néanmoins, cela ne dérangea pas Jeff qui passa outre cette esquive. Après tout, c'était plutôt une question n'attendant pas de réponse. La réponse aurait été un oui ou un non, leur entrevue se serait de toute manière terminée. Si ça avait été oui, Jeff lui aurait dit de disposer. Si ça avait été non, il lui aurait dit d'aller se renseigner auprès des loups de son clan. Dans les deux cas : le même résultat. Reymsaa l'avait-il perçu comme le signal que le questionnement était terminé ? Peut-être bien. En tout cas, celui-ci s'ébroua, lui fit une révérence fort appréciable, tourna les talons et repartit sous la pluie, laissant Jeff seul dans le mausolée. Le regardant s'éloigner puis disparaître, les babines de Jeff s'étirèrent en un petit sourire. Bien que son tempérament ennuyé fut de sortie, il devait bien reconnaître une chose : Finalement, ce loup fut une agréable compagnie et le renseigner fut un bon passe-temps. Observant une dernière fois la pluie battante, puis son os éparpillé au sol, il soupira pour la énième fois. Puis, il posa la tête sur le marbre blanc, ferma les yeux et se laissa bercer par la mélodie de cette pluie.